"Il n’est jamais parti sans dire au revoir”, lit-on sur la description iTunes de Deemo, jeu de rythme sur smartphone très connu et acclamé réalisé en novembre 2013 par Rayark, une compagnie Taiwanaise d’à peine une dizaine d’employés. C’est un jeu à l’esthétique très prononcée, qui a réussi à se démarquer de la concurrence à la fois par sa réalisation artistique mais aussi par ses compositions, toutes au piano et résolument calmes, à l’inverse de ce que l’on peut voir majoritairement dans les jeux de rythme. Alors, mis à part pour vanter les mérites de ce jeu que j’adore, pourquoi parler de Deemo dans cet article ? Bah tout simplement par rapport à cette phrase, "Il n’est jamais parti sans dire au revoir”. Cette phrase au français approximatif mais très intriguante, que l’on ne s’attend pas à voir dans un jeu de rythme, genre qui est généralement caractérisé par une absence totale de scénario. Cette phrase, qui va nous entrainer dans l’histoire cachée de Deemo, et nous permettre de découvrir une triste vérité.



Le commencement
Le jeu nous accueille avec une scène cinématique, où une jeune fille descend du ciel et est rattrapée par une silhouette noire, qui semble seule et amicale, qui se verra être Deemo. Le jeu prend place dans un endroit clos, composé de quelques pièces dont une salle principale où se trouvent un piano et un arbre. Plus le piano est joué, c’est-à-dire plus l’on terminera des morceaux dans la partie jeu de rythme, plus l’arbre grandit et le but, pour l’héroïne, est de se débrouiller le mieux possible pour faire grandir l’arbre et sortir de ce lieu. Au cours de la progression, on débloquera des morceaux, ainsi que les pièces de cet endroit clos, de très rares PNJ (ils sont trois au total), et de rares indices sur le scénario du jeu.

Même si rien n’est mis en évidence aux yeux du joueur, de nombreux indices nous apportent des informations sur les circonstances de cette captivité. Pour cela, il suffit de déceler les rares indices dans le monde du jeu, mais surtout de s’intéresser aux musiques et à leurs illustrations, mettant toutes en scène les personnages principaux de l’histoire. Les deux premiers morceaux, Dream et Reflexion, mettent en scène la vie quotidienne des deux personnages principaux, la recherche de la sortie et cette escalade la journée, ainsi que la prise de conscience sur soi-même, la réflexion, la nuit. Wings of Piano, quant à elle, met en scène Deemo au piano avec des ailes majestueuses sur son dos, elle peut représenter la pratique du piano et l’exutoire qu’il représente. Un morceau très intéressant à regarder est le suivant, Nine point Eight, qui met en scène la jeune fille, la tête en bas, comme si elle symbolsait le moment de la chute, l’arrivée de la fille, dans le monde où elle trouve Deemo. Le titre de la musique peut lui aussi faire penser à une date, ou à une heure. L’image met en scène la jeune fille, vêtue d’une simple robe blanche, et les nombreuses fleurs visibles autour d’elle interpelle également. Elles peuvent faire référence à la mort (on y observe notamment des chrysanthèmes), et le linge blanc fait penser à une tenue d’hôpital.

Et cette hypothèse peut être confirmée par la suite. Les images de Platinum et d’Utopiosphere sont de suite plus parlantes. Pour la première, on peut voir l’héroïne en tenue blanche en train de prier, devant ce qu’il semble être un vitrail. Le ton de la musique fait également penser à une prière religieuse. La seconde, quant à elle, représente le temps qui passe, supposément depuis l’arrivée dans le monde de Deemo (l’hôpital, donc), et cette notion de temps est également visible dans sur l’image de Reverse – Parallel Universe, ou Deemo est cette fois-ci seul.

Les deux dernières musiques que je vais évoquer, Yubikiri-Genman et I hate to tell you, ne sont pas très optimistes également. La première représente le lien entre la fille et Deemo, dans ce qui est un moment difficile, de souffrance. La seconde représente de façon assez explicite la mort, et le deuil du personnage. L’analogie du jeu avec le fait que la fille soit dans une chambre d’hôpital, bloquée entre quatre murs, et avec Deemo, sans doute le médecin, et le piano comme seules attaches, est à nouveau illustrée.


La condition
Plusieurs indices un peu plus explicites sont trouvables en examinant les décors et les personnages du jeu. Il est possible dans le jeu de connaitre les pensées de l’héroïne, qui nous dévoile quelques détails intéressants. Parmi les discussions « rares », moins fréquentes que la normale, on peut voir la jeune fille dire que, même si ils ne se connaissent pas, Deemo lui inspire une certaine confiance. Une autre réplique, où la fille dit « Allons jouer, Deemo ! Tu es le docteur… et je serai la patiente » est une nouvelle indication allant dans ce sens.


Quelques indices pointent également du doigt le travail de Deemo pour soigner sa patiente. L’illustration de Pulses, où l’on voit Deemo et l’héroïne dos à dos, séparés par une machine qui est lié à une pulsation cardiaque, est très parlante. Untitled², quant à lui, montre le côté presque vain de la recherche de Deemo, qui semble perdu avec à ses pieds le fruit de ses recherches. Le titre de la musique peut mettre en avant le fait qu’il n’ait plus d’inspiration.


Deux des dernières musiques déblocables dans le jeu, Entrance et Magnolia, nous confirment ce côté défaitiste. La première montre Deemo avec une apparence de démon, devant une sorte de porte parmi laquelle on peut déceler le mot ‘money’. Elle peut indiquer le moment où les soins ne pouvaient plus durer dans l’état actuel des choses, où Deemo annonce la prochaine fin de l’hospitalisation de l’héroïne, et la fatalité de la mort. Magnolia, quant à elle, nous montre une pierre tombale sur laquelle se trouve la jeune fille, dans son habit blanc aux reflets désormais sombres, méditant sur une sphère, les yeux fermés. L’histoire de la jeune fille et de Deemo touche donc à sa fin, mais un détail un peu plus sordide vient s’ajouter au tableau.


Il est possible, dans le jeu, d’interagir avec nombre d’objets du décor, pour obtenir de nouvelles musiques ou simplement pour avoir les observations de la jeune fille. Deux interactions sortent cependant du lot. Ce sont des chiffres, plus exactement 121.518549 et 25.040854. Ces chiffres correspondent en réalité à des coordonnées, qui pointent directement… à l’hôpital universitaire de Taiwan. Partant de là, on peut se poser la question de si Deemo a réellement une place dans le monde réel, de savoir si l’on suit une histoire vraie, si la fille hospitalisée a réellement existé.


C’est ainsi que la dernière cinématique du jeu, mettant en avant explicitement un arrêt cardiaque de la jeune fille et l’arrêt de la croissance de l’arbre, résonnent comme un incident encore plus tragique qu’il n’y parait déjà. Mais cette cinématique est ponctuée d’un « To be continued », qui peut encore nous laisser un maigre espoir.


Epilogue

En 2015, plus d’une année après la sortie originale du jeu, Rayark publie une mise à jour qui apporte de très nombreuses précisions sur des points de détail du jeu original. Les personnages sont désormais présentés, et les objets sont précisés. L’accident est un accident de voiture. Contrairement à nos suppositions initiales, Deemo n’est pas le docteur de la fille mais son frère. Il s’appelle Hans et est un pianiste de renom, couronné de nombreuses médailles. C’est un frère dévoué, qui apprit à l’héroïne, appelée Alice, à jouer du piano pour oublier quelques instants sa condition. Une poupée sale, trouvée dans l’une des pièces, est en fait une poupée de chat, donnée par Hans à Alice avant son accident, et endommagée par ce dernier. Elle est présente dans le monde de Deemo, ce qui en fait un des rares souvenirs d’Alice datant d’avant son accident, probablement car elle l’a récupéré dans sa chambre après coup.

Un personnage très intriguant du jeu, la femme masquée, est tout au long de celui-ci très antipathique avec Alice, lui demandant d’arrêter ses fantaisies ou se demandant pourquoi Deemo passe autant de temps avec elle. De nombreuses rumeurs ont circulé autour de ce personnage. Il aurait pu être la mère ou la sœur de la fille, qui souhaitait quant à elle arrêter les traitements d’Alice. D’autres hypothèses font de cette personne Alice elle-même, une sorte de matérialisation de son pessimisme, des jours où la volonté lui manque. Cette hypothèse est sans doute la plus proche de la vérité, puisque, dans une nouvelle cinématique, la personne derrière ce masque se révèle être… Alice elle-même.

Les nouvelles révélations sur le scénario du jeu sont aussi présentes dans les musiques de cette mise à jour. Tout d’abord, Magnolia s’est vu bénéficier d’un changement esthétique, puisque la pierre tombale est remplacée par des fleurs, enlevant ainsi la référence directe à la mort. D’autre part, de nombreuses musiques parmi ces dernières remplacent Deemo par Hans une fois la chanson terminée sans erreur. C’est le cas de Fluquor, ou de Sakura iro no yume par exemple. Legacy, qui peut être traduit par héritage, est quant à lui un morceau lié à l’histoire d’Alice puisque, lorsque finie sans erreur, une image de la jeune fille au piano est visible avec le message ‘To the lovely, lonely stranger, and my dearest brother, Hans’. Une sorte de point final entre sa période de maladie et de perte de mémoire, et sa résurrection et son retour à la réalité, en grande partie grâce à son frère.

Conclusion

Deemo est l’histoire d’Alice et de son frère Hans, un pianiste de renom très attaché à sa sœur. Un jour, un accident de voiture les envoie à l’hôpital. Là ou Hans a de légères blessures et récupère rapidement, Alice est quant à elle plus sévèrement touchée, perd la mémoire et se retrouve cloitrée dans une chambre d’hôpital, à lutter pour sa survie. Hans va lui apprendre à jouer le piano, pour lui donner de quoi oublier sa condition, et va lui aider à se reconstruire, en lui racontant des histoires, en lui faisant découvrir le monde, depuis la chambre d’hôpital et son piano. Plus Alice joue, plus elle se sort de sa condition et se rapproche donc de la guérison, symbolisée par l’arbre qui grandit.

Alice est accompagnée d’une jeune fille masquée, qui la retient quand Hans l’accompagne. Elle est la partie défaitiste de la fille, ses souffrances, et c’est elle qui bloque la croissance de l’arbre au moment de faire le dernier pas. Mais Hans va aider les deux filles à surmonter cet obstacle qui paraissait insurmontable à première vue.

Ce dernier pas représente la guérison pour Alice, qui retrouve petit à petit ses mémoires et redécouvre le monde. Deemo devient définitivement Hans, son grand frère, et les deux anges qui l’ont accompagnée sont désormais deux infirmières. Alice, pour laquelle tout espoir semblait perdu, a survécu et peut désormais vivre paisiblement.

Deemo est un jeu aux multiples facettes. Jeu de rythme assez classique au premier abord, mais toutefois très stylisé, il cache une histoire touchante et sincère, qu’il parvient à dissimuler dans l’univers qu’il développe. Personnellement, j'ai un faible pour le travail effectué sur la première version du jeu, qui laissait plus de place à l’interprétation. Mais voir qu’Alice et Hans s’en sont tous deux sortis et pourront jouer du piano ensemble à l’avenir est une excellente nouvelle.

NB : Les développeurs ne se sont jamais exprimé sur les théories du joueur. On n'a aucune preuve actuellement, sur le fait que Deemo soit inspiré d'une histoire vraie.
De nombreuses autres théories existent sur le sujet, notamment une selon laquelle Hans serait mort des suites de l'accident. Si vous êtes intéressé n'hésitez pas à jeter un œil à ces dernières un peu partout sur internet !

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6 commentaires

Yugo le 16/06/2019 Edité le 00/00/0000	Ces un jeu musicale très magnifique, avec des musique calme unique pas comme certain autre jeu qui propose des musique plus dynamique. Je pence pareille que "Pixel" que Hans serais mort après l'accident en protègent au maximum ça petite sœur, ce qui fais que quand elle a retrouvé ces souvenir et ces réveiller de son comas elle ces mise a pleuré.. Ces un jeu musicale très magnifique, avec des musique calme unique pas comme certain autre jeu qui propose des musique plus dynamique. Je pence pareille que "Pixel" que Hans serais mort après l'accident en protègent au maximum ça petite sœur, ce qui fais que quand elle a retrouvé ces souvenir et ces réveiller de son comas elle ces mise a pleuré.. :bye:
Lucian93 le 21/12/2017 Edité le 00/00/0000	Je savais que l'histoire étais triste mais pas a ce point la. ;-; Il faut que je le crack merde... Je veux toute la Deemo Collection plus les nouveaux livres. Je savais que l'histoire étais triste mais pas a ce point la. ;-; Il faut que je le crack merde... Je veux toute la Deemo Collection plus les nouveaux livres.
Noxcaedibux le 28/04/2017 Edité le 00/00/0000	woah! j'ai trouvé l'article super intéressant et vu que je n'ai jamais réussi à finir les musiques à 100% avec un 0 fautes. J'aurais jamais découvert le fait que de faire certaines musiques à 100% débloquerait des scénarios, alors que je joue toujours à ce jeu et que je le trouve toujours aussi attrayant gameplay, comme les graphisme simples mais magnifique. Comme j'aime bien le dire "Pas besoin de faire quelque chose remplit de détails, si le dessin fait ressentir quelque chose aux autres, c'est qu'il est réussi", mais pour ma part j'adore ce côté peinture, et de découvrir que les dessins évoluent je trouve ça encore plus beau et juste super bien pensé. Merci beaucoup pour cet article que je trouve énormément bien fait. woah! j'ai trouvé l'article super intéressant et vu que je n'ai jamais réussi à finir les musiques à 100% avec un 0 fautes. J'aurais jamais découvert le fait que de faire certaines musiques à 100% débloquerait des scénarios, alors que je joue toujours à ce jeu et que je le trouve toujours aussi attrayant gameplay, comme les graphisme simples mais magnifique. Comme j'aime bien le dire "Pas besoin de faire quelque chose remplit de détails, si le dessin fait ressentir quelque chose aux autres, c'est qu'il est réussi", mais pour ma part j'adore ce côté peinture, et de découvrir que les dessins évoluent je trouve ça encore plus beau et juste super bien pensé. Merci beaucoup pour cet article que je trouve énormément bien fait.
Pixel le 08/01/2017 Edité le 00/00/0000	Salut ! J'ai aussi trouvé l'article très émouvant, mais quelque chose me tracasse. Quand j'ai terminé le jeu, j'ai interprété les choses comme si Hans était enfaite mort dans l'accident. En effet, la cinématique de fluquor où on voit Alice en pleurs, devant dire adieu à deemo, et la phrase "il n'est jamais parti sans dire au revoir" me fait penser que le monde de deemo a été inventé par Alice pendant son coma dans le but de rester encore un petit peu avec son grand frère défunt. Si votre hypothèse dans laquelle Hans aurait seulement quelques blessures légères est vraie, alors il aurait été présent au réveil d'Alice dans la chambre d'hôpital. Or, la toute dernière scène du jeu, est Alice se réveillant dans une pièce simple et blanche, apeurée elle se dirige vers la fenêtre, et se rend compte de ce qu'elle vient de vivre et de la mort de son frère en regardant le monde extérieur, et accablée par la triste réalité des événements se met à pleurer. Voilaaa je sais pas ce que vous pensez de ma théorie donc hésitez pas à me répondre de manière constructive ! Salut ! J'ai aussi trouvé l'article très émouvant, mais quelque chose me tracasse. Quand j'ai terminé le jeu, j'ai interprété les choses comme si Hans était enfaite mort dans l'accident. En effet, la cinématique de fluquor où on voit Alice en pleurs, devant dire adieu à deemo, et la phrase "il n'est jamais parti sans dire au revoir" me fait penser que le monde de deemo a été inventé par Alice pendant son coma dans le but de rester encore un petit peu avec son grand frère défunt. Si votre hypothèse dans laquelle Hans aurait seulement quelques blessures légères est vraie, alors il aurait été présent au réveil d'Alice dans la chambre d'hôpital. Or, la toute dernière scène du jeu, est Alice se réveillant dans une pièce simple et blanche, apeurée elle se dirige vers la fenêtre, et se rend compte de ce qu'elle vient de vivre et de la mort de son frère en regardant le monde extérieur, et accablée par la triste réalité des événements se met à pleurer. Voilaaa je sais pas ce que vous pensez de ma théorie donc hésitez pas à me répondre de manière constructive ! :banana:
kolibri le 25/09/2016 Edité le 00/00/0000	Je viens de lire l'article que tu cites, il est super intéressant et me rappelle à quel point j'adore la narration des Souls <3 Après dans le cas de Deemo, c'est clairement un parti pris, d'étoffer l'univers un maximum des qu'ils le peuvent. J'ai rien pu lire dessus, mais la version Vita du jeu qui est sortie récemment uniquement en Chine et au Japon, possède une histoire supplémentaire. C'est peut être une façon pour eux de pouvoir continuer l'histoire d'une façon ou d'une autre, même si j'avoue que je préfère quand l'imagination des joueurs rentre en compte. Merci pour ton commentaire ! /o/ Je viens de lire l'article que tu cites, il est super intéressant et me rappelle à quel point j'adore la narration des Souls <3 Après dans le cas de Deemo, c'est clairement un parti pris, d'étoffer l'univers un maximum des qu'ils le peuvent. J'ai rien pu lire dessus, mais la version Vita du jeu qui est sortie récemment uniquement en Chine et au Japon, possède une histoire supplémentaire. C'est peut être une façon pour eux de pouvoir continuer l'histoire d'une façon ou d'une autre, même si j'avoue que je préfère quand l'imagination des joueurs rentre en compte. Merci pour ton commentaire ! /o/
cKei le 25/09/2016 Edité le 00/00/0000	Ça a l'air sympa, j'aime bien quand les jeux utilisent ce procédé (graphismes "enfantins" et scénario d'apparence léger) pour faire passer des émotions plus fortes à ceux qui s'y intéressent. Et c'est dommage que comme d'habitude les devs aient fini par rompre le charme en donnant des contours bien définis à l'histoire. Ça a l'air sympa, j'aime bien quand les jeux utilisent ce procédé (graphismes "enfantins" et scénario d'apparence léger) pour faire passer des émotions plus fortes à ceux qui s'y intéressent. Et c'est dommage que comme d'habitude les devs aient fini par rompre le charme en donnant des contours bien définis à l'histoire.