Voilà ce qui me turlupine à propos des jeux vidéo, avec un terme déjà... fatal, en quelque sorte.
Mon problème, c'est de savoir si un jeu vidéo peut cultiver celui qui y joue, comme peuvent y prétendre les arts canoniques ( littérature, arts plastiques, voire cinéma ) ou s'il s'agit seulement, et pour toujours, un divertissement.
J'entends par "divertissement" ce qui, d'une manière ou d'une autre ( et cela n'est pas nécessairement péjoratif ) nous détourne de ce qui est vraiment important dans la vie. Soit parce que nous ne serions pas assez courageux pour l'affronter, le réaliser, soit parce qu'il appartient à notre métabolisme de petite créature de ne pas toujours nous concentrer sur l'essentiel ( auquel cas le divertissement est... nécessaire ! ).
Au contraire, la culture, ce serait ce qu'on absorbe et qui permet de briller dans le monde et de le faire briller davantage ( d'aucuns de parler d'un "étoilement" culturel, un peu comme si quelques étoiles brillaient toujours au-dessus de nos têtes, nous éclairant nous... et les autres ).
Soit les jeux vidéo sont condamnés à nous absorber, soit ils peuvent éclairer la vie, et nous permettre d'éclairer un peu plus celle des autres.
J'ai une opinion ( en défense de mes chers et tendres ) mais pas encore d'arguments solides.
Il y a de l'enjeu.
mimylovesjapan le 06/08/2011 Edité le 06/08/2011 |
ouah ! la question vague ici ! le truc c'est que des mots aussi gros que "art" "culture", ca englobe tout et rien... meme si tout le monde tombe d'accord sans jamais vraiment savoir sur quoi... Bref, c'est de la **** si je puis dire. Et plutôt que de chercher à faire de grands débats sur ce qui entre dans la catégorie "art", ou "culture", on ferait bien de ne plus utiliser ces termes et des laisser croupir au fond d'une cave. edit, parce que je viens de lire ce que tu as repondu a rotka : si tu te renseignes un peu, tu verras que oui, l’interaction a toujours été très forte dans les manifestations dites "artistiques". Et le top du top, si tu t'y interresse un peu c'est quand même les "performances" aujourd'hui, qui mèlent constamment action du public et de l'artiste... quand a la definition d'un mot, elle varie toujours, et pas seulement en 200 ans, mais aussi d'une personne à l'autre dans une meme année... et la photo a effectivement repris le role la la peinture comme "représentation de la nature". C'est pourquoi on voit plus aucune utilité a partir du XXe siecle à faire de la peinture représentative (a part pour mettre sur la cheminée de mamie). |
Golden Leaf le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Althar > d'accord, ça se tient, et c'est surtout le début de ta réponse qui, pour le coup, me plait bien Rotka > malheureusement, je pense que la discussion est close : en portant d'emblée un jugement sur l'art comme divertissement ( première ligne de ta réponse ), tu affirmes quelque chose de fort problématique à mon sens. Je voudrais que tu m'expliques quelques petites choses : - l'exemple fort douteux de Shakespeare pour montrer que l'interaction a toujours été présente. Je dis "douteux" parce que j'aimerais en savoir un peu plus sur la fameuse interaction dont tu parles. - pourquoi la fameuse date de 1800 ? Quelles différences entre une définition contemporaine de l'art et une définition de 1800 ? - à ma connaissance, Beckett ne fait pas participer le spectateur à la représentation. Mais je ne connais pas l'intégralité de l'oeuvre. Concernant la participation du spectateur dans le théâtre le plus contemporain, on pourrait peut-être, effectivement, citer le cas du "happening", mais je ne sais pas si c'est exactement de cela dont tu voulais parler. - d'accord, je tourne les pages du livre. Mais je ne crois pas qu'on puisse parler d'interaction : dans un jeu vidéo, tu fais usage de ton corps, pas seulement pour manipuler l'objet, mais également pour faire apparaître "l'oeuvre". - ta définition moderne de l'art qui est de créer "l'illusion". Pourquoi pas après tout. Mais d'où ça sort cette histoire d'illusion ? - qu'est-ce que c'est que cette histoire en vertu de laquelle le cinéma est l'évolution de la BD ? Et que la photo est l'évolution de la peinture ? Et qu'est-ce que c'est que cette histoire de littérature qui évolue en BD ? Là, j'avoue que je ne comprends pas ton affaire, sans pour autant la condamner a priori. - qu'il n'y ait aucun aspect culturel dans du Shakespeare ou du Wagner, "à la base", c'est toi qui l'affirmes. Wagner est célébré ( dans un premier temps ) par quelqu'un comme Nietzsche, qui est son contemporain ( mais qui y verra ensuite la forme la plus aboutie de la décadence moderne ) mais également par Baudelaire ( entre autres exemples ). Là, en revanche, où je te rejoins complètement ( ce qui semble traverser ton affaire ), c'est que nous mettons effectivement derrière le nom d'art des productions qui n'en relèvent à mon sens pas du tout et qui se cachent derrière un concept qui a fort bonne réputation. |
Ahltar le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Je pensais pas l'écrire un jour mais +1 Rotka. |
Rotka le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Ce que tu appel les arts canoniques ne sont en vérité que des formes de divertissements élevés au rang d'art (et seulement tout juste récemment si on prend en compte toute l'histoire de l'art) pour optimiser le hype et l'aspect mercantile de ces produits dans notre société de consommation. Et le jeu vidéo n'est rien d'autre que la forme de divertissement par excellence, la plus évoluée. En somme, dans notre société d'aujourd'hui, le jeu vidéo n'est rien d'autre que la forme d'art ultime (en attendant mieux). L'interaction a toujours été présente dans ces "formes d'arts" (que je met entre guillemet parceque l'art, jusque genre en 1800, c'était pas du tout ça). Check le théatre élizabathain où la scène était ouverte sur le public (Shakespeare utilisait d'ailleurs plein de tricks pour justement donner un rôle actif au public, et le faire réfléchir à sa condition), ou les pièces de Goldsmith qui misaient énormément sur la participation (certes passive, mais pas bcp moins que pour un jeu vidéo ou tu ne fais rien d'autre que rester assis sur ton gros cul) du public; ou plus récemment le post modernisme à la Pinter ou Beckett, etc ... Pareil pour l'art contemporien et les mouvements hype genre l'esthétisme relationnel de nicolas bourriaud, qui comme son nom l'indique met le regardeur au centre de l'oeuvre. Pareil pour la littérature, si tu n'interargit pas avec le book et ne tourne pas les pages, ben le livre s’arrête comme un gros game over. Alors certes c'est le degré zero de l'intéraction, mais c'est une des formes de divertissement les moins évoluées donc c'est tout naturel. En vérité, que ce soit le cinéma, la littérature, le théatre, ou le jeu vidéo, tous se basent sur la définition moderne de l'art qui tient en 2 mots: créer l'illusion. En somme, toutes ces formes d'arts ne sont en vérité que de simple divertissement, et les sois disants artistes de simple entertainers (et comme on a pas de mots français, on balance du "c'est un artiste" a tout va, que tu sois chanteuse de pop niaise, comique pas drôle, présentateur TV, acteur, illustrateur, directeur, game designer, etc ...). Bref, ce qui me gène c'est cette séparation que tu imagine entre le jeu vidéo et le reste, alors que le jeu vidéo n'est que l'évolution logique du medium, comme le cinéma a été l'évolution de la BD, qui était l'évolution de la littérature; ou comme la photo a été l'évolution de la peinture. Normal en somme que le jeu vidéo utilise les codes du ciné, de la littérature, et de toute forme de divertissement qui lui servent de base à son évolution. C'est le processus usuel qu'ont toute connues ces formes de divertissements canoniques. Il n'y a à la base aucun aspect culturel dans du shakespeare ou du wagner; c'était à la base du simple divertissement pour les gens de l'époque. Et c'est comme tu le dit élevé au rang d'étendard de la culture simplement pour briller en société. Un étoilement culturel ... du vent. Dans 200 ans ça sera au tour du jeu vidéo de devenir une preuve de culture, parceque ça sera dépassé par une autre forme de divertissement + évoluée, et ainsi de suite. |
Ahltar le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
"est-ce que l'interaction propre au jeu vidéo peut nous apporter quelque chose dans la ( fameuse ) vraie vie ?" A mon sens, complètement. Rien que le côté vitrine technologique d'une époque est un point intéressant de notre histoire et donc, de notre culture. Mais si tu veux parler uniquement de son côté interaction dans un but de nous apporter quelque chose dans la vraie vie, j'ai l'impression que tu dérive un peu de ta question d'origine. Mais soit, une réponse très simple peut-être apportée (même si un peu borderline). As-tu pensé aux simulateurs de conduite ? Quel est la démarcation entre un jeu vidéo et un simulateur de pilotage de navette spatiale par exemple ? Ecran, contrôleurs, actions-réactions, etc... Sinon, on peut toujours argumenter sur l'entraînement à réagire que cela nous apporte ou même sur nos facultés de réflexions rapide. Dans les STR ou les jeux de combats par exemple, il suffit de regarder des vidéos de tournois pour se dire que ces gars ne sont pas humains. Mais en fait, ils ont peut-être simplement dépassé le niveau moyen d'un humain grâce aux jeux vidéos ? Les vainqueurs de ces tournois brillent (pour reprendre ce que tu défini de la culture dans ton billet) largement dans le monde actuel en devenant, en quelque sorte, des stars locales. Donc, à mon sens, les JV ont aussi bien un côté culturel fort de part leur contenu potentiel (tous les jeux n'ont aps le niveau d'un Lost Odyssey non plus hein) qu'un côté développement personnel par ce que chaque joueur sera capable de tirer de son expérience pour lui-même. Si il veut développer son sens de la justice, du sacrifice et ses "valeurs morales" (communément admises), se tapper une bonne grose dose de RPG pourra l'aider (ben oui, on cherche bien souvent à sauver le monde en protégeant le plus de "civils" possible, parfois même au péril même de notre vie). S'il veut améliorer ses réflexes de manière général pour, je ne sais pas, un sport de combat ou autre. Pourquoi ne pas se perfectionner dans les jeux de combat ou les shmup ? Si encore il souhaite développer un sens stratégique, il y a le choix parmis les STR. Bien entendu, l'impact sur le réel n'es pas forcément flagrant ni même quantifiable, mais j'y crois. Mais bon, est-on vraiment conscient de s'améliorer lorsque l'on joue ? |
Golden Leaf le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
D'accord, je suis complètement d'accord avec ce que tu racontes. Je n'ai pas tissé d'équivalence entre "livre" et "littérature", par exemple ( pour revenir sur le cas de Harry Potter que tu donnes ). Sur le fait que, au sein même d'un médium, il faille agir avec nuance, je suis tout à fait d'accord. Je suis encore complètement d'accord lorsque tu parles de l'étude des différents critères ( tu cites, en gros, la musique, les graphismes, le gameplay, les contrôleurs et les contrôles ). En ce qui concerne les nuances, si nous nous attachons au graphisme, nous analyserons le jeu vidéo... en tant qu'art plastique. D'accord. Mais alors ça reviendrait à dire qu'un jeu vidéo c'est... aussi de l'art plastique... ou aussi de la musique. Ce qui est indéniable. Le problème - ce qui m'intéresse - c'est la spécificité du jeu vidéo, c'est-à-dire là où le jeu vidéo n'est plus seulement un agrégat de musique, de littérature, de graphisme. Ce dont tu parles, je pense, à travers le gameplay, les contrôleurs et les contrôles. C'est-à-dire, au fond, puisqu'il pourrait y avoir une culture par la contemplation ( graphisme, musique ), est-ce qu'il peut aussi y avoir une espèce de culture par la pratique ( gameplay, contrôleurs, contrôles ), ou est-ce que, au contraire, les jeux vidéo peuvent cultiver seulement dans la mesure où ils ont une valeur à l'aune de la musique, du graphisme, de la littérature. Là où je m'interroge un peu sur ta réponse ( je veux des explications, je n'essaie pas de coincer qui que ce soit ), c'est que pour donner des exemples, tu ne parviens pas à sortir... de la musique ( Streets of Rage > excellent exemple à mon sens ), du graphisme ( l'intro de Street IV ou Baten > j'aurais sans doute cité moi-même le second ) ou de la littérature ( Lost Odyssey > oui, imparable ). Je n'ai pas affirmé que l'interaction empêchait la culture, j'ai posé une question. Je me demande si le jeu vidéo ( et donc l'interaction ) peut participer d'une manière qui lui est propre à quelque chose comme la culture. C'est-à-dire, comme la musique, le graphisme ou le texte peuvent nous enrichir réellement, est-ce que l'interaction propre au jeu vidéo peut nous apporter quelque chose dans la ( fameuse ) vraie vie ? ( ce qui ne veut bien sûr pas dire qu'en cas de réponse négative je me détourne de la chose ) |
Ahltar le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Mon problème est que tu commences par affirmer que les arts canoniques peuvent le faire. En quoi ? Je ne me sens pas plus cultivé après avoir lu un Harry Potter. Cette distinction EXISTE. Il est éncessaire de nuancer ce genre de propos. Il me semble que l'exercice n'est pas vraiment dans la création mais plutôt dans l'analyse qui suis la cration (parfois des centaines d'années après la création). S'il est possible d'étudier actuellement des anciennes sculptures, peintures, textes afin d'analyser des techniques, des contextes, des messages volontaires de l'auteur ou même encore de trouver des interprétations propres au contexte de l'étude (qui diffère donc généralement de celui de la création). Pourquoi ne pas faire de même sur les JV ? Surtout qu'à l'instar du cinéma, il cumul plusieurs supports (son, images, gameplay). Par exemple, on pourrais s'amuser à comparer, techniquement, l'avancée des JV, et il n'y a pas qu'un seul critère : - évolution des capacités musicales - évolution des capacités graphiques - évolution du gameplay - évolution des controleurs - complexification des contrôles - etc Sans compter que les JV contiennent intrinsèquement des arts canoniques, pour preuve, des graphistes ont fait leurs réputations à travers les jeux vidéos. Pourquoi rester si général en disant "j'admet que les arts plastiques et la littérature peuvent cultiver et je me demande si un JV peut aussi y arriver". Les jeux vidéos contiennent des arts plastiques (l'intro de Street Fighter IV propose une certaine recherche graphique par exemple, ou bien des titres comme Baten Kaitos qui expérimentent sur plusieurs points, et il y a surement un tas d'autre jeux qui proposent des univers visuels propres et recherchés). De même de la littérature, on en trouve aussi dans les JV, à travers les rèves dans Lost Odyssey par exemple. Et le coup de l'interaction, je ne vois pas trop en quoi il empêche la culture, faudrait que tu m'expliques. Quand j'était tout jeune, je laissait tourner Streets of Rage dans ma chambre, alors que je somnolais dans mon lit, juste pour écouter la musique. Quand on s'arrête de jouer à un JV pour se contenter d'admirer le paysage (FFXIII) ou d'écouter les musiques (NieR) l'interactivité n'a plus droit à la parole, seul reste la contemplation. Et si je dis que ta question est à côté de la plaque, c'est simplement car, à mon sens, il faudrait plutôt se demander quand est-ce que la population se rendra compte que, finalement, un jeu vidéo, non seulement on ne fait pas qu'y jouer mais qu'en plus, leurs créateurs ne se contentent pas de les coder. C'est un tout beaucoup plus complexe qu'on ne le croit. Alors peut-être qu'à l'origine ce n'était qu'un divertissement (pong quoi) mais les choses ont changées, évoluées. Tiens, dans le genre contemplatif, t'avais Myst, et il a fait un carton |
Golden Leaf le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Althar > "question à côté de la plaque" : puisque le problème est si facile à résoudre, je ne vois en effet pas pourquoi je me le pose.
Sauf qu'il y a quand même une différence entre le jeu vidéo et les arts canoniques, c'est la dimension interactive. Quand tu lis, quand tu regardes un film ( ou autre ), tu es absolument passif. Ce qui n'est pas le cas dans un jeu vidéo. Sauf qu'il y a quand même une différence entre le jeu vidéo et les arts canoniques, c'est la dimension interactive. Quand tu lis, quand tu regardes un film ( ou autre ), tu es absolument passif. Ce qui n'est pas le cas dans un jeu vidéo. |
Ahltar le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
La volonté des devs est une chose, la sensibilité du joueur une tout autre. Et je dirais même que, la volonté des devs n'a pas grande importance face à la perception du joueur. Et oui, le JV véhicule des choses, mais c'est comme tous les supports, les genres et les thèmes varient du tout au tout. Je doute que l'on puisse comparer le message de Lea passion Cuisine à celui d'Undead Nation. Bref, divertissement ou culture ? Question à côté de la plaque, tout dépend du jeu et de son publique. Si les arts canoniques peuvent cultiver, nul doute que les jeux vidéos aussi. Bien sûr, tous les jeux n'y arriveront pas, mais je doute de même que tous les livres peuvent y prétendre. |
Zak Blayde le 03/08/2011 Edité le 00/00/0000 |
Ça me parait évident qu'un média comme un autre peut véhiculer des choses. Tout dépend de la volonté des développeurs. |