Battletoads (et par extension la version snes Battletoads in Battlemaniacs) entrerait facilement dans mon top 20 des tous meilleurs jeux video. Ce n'est pourtant ni son gameplay varié et nerveux, ni ses coups spéciaux marginaux, ni ses personnages satiriques et encore moins son mode coopération de qualité qui feront de Battletoads un jeu de légende. Battletoads est le jeu qui redéfinira à lui tout seul la notion de sadomasochisme dans l'industrie du jeu vidéo, tout particulièrement grâce à son fameux Turbo Tunnel, un stage qui nécessiteait un sens du rythme et de la précision hors norme, frustrant et pourtant addictif comme il faut. Le Turbo Tunnel, avec sa ligne de basse sautillante, servait de stage charnière.
Bien placé au milieu, le stage charnière sépare en deux parties un jeu et lui offre un pouvoir symétrique et mathématique ennivrant. Un délice de game design. Turbo Tunnel sépare donc Battletoads en deux drôles de faces. La première partie et les premiers stages forment un jeu d'action plateforme démoniaque où la variété et le fun sont de mise et où la rigueur n'est pas encore nécessaire. La première partie de Battletoads est ainsi un jeu éclatant que l'on pratiquera à 2 pendant des parties acharnées où l'on s'amusera sans se poser de questions. Battletoads part.1 est l'un des meilleurs jeux d'actions jamais conçus.
Mais une fois Turbo Tunnel lancé, la difficulté augmente de 10000000 crans sans la moindre courbe de progression et le jeu laissera à ce moment là une majorité de joueurs sur le carreau. Turbo Tunnel met en scène nos héros dans une course de jetski au scrolling extrèmement rapide (sur la fin) et à la précision de folie. Le joueur pris au dépourvu ne peut pas finir ce stage du premier coup. Il faudra maitriser chaque obstacle et apprendre par coeur les mécanismes du stage pour espérer passer chaque sous parties. Une rigueur extrème et un timing sans concession seront nécessaires. On se rend compte alors que l'aventure en coopération en mode 2 joueurs s'arrette là, car à la moindre erreur (qui arrive bien vite) de l'un ou deux joueur, c'est retour au précédent check point. Les vies perdues défilent et le game over ne se fera pas attendre. Turbo Tunnel est tout simplement le meilleur stage de jeu video qu'il m'ai été donné de jouer, et malgré son level design sans la moindre générosité (chose que j'aime pourtant dénoncer) la sauce prend grâce à une intensité sans commune mesure. C'est bien simple, à chaque check point atteint on avait l'impression d'avoir sauver le monde, d'avoir couché avec la plus belle fille du lycée et d'être devenu Rocky Balboa.
Cet unique stage est un Shmup dans lequel on ne peut pas tirer. Il faut savoir appréhender chaque obstacle grâce à sa mémoire du level design et à une gestion du timing et du rythme hallucinante, comme si l'on jouait la partition rigoureuse d'un morceau classique. En vérité Turbo Tunnel est une ligne, une ligne de basse intolérante. Turbo Tunnel aurait pus être le dernier niveau d'Ikaruga.
Turbo Tunnel, en tant que niveau charnière sans concession, lachera les moins motivés d'entre nous, qui préfèreront refaire les premiers niveaux plutôt que de forcer le destin. Pourtant, Turbo Tunnel n'est que le début d'un tout nouveau Battletoads destiné ce coup ci aux joueurs les plus sadomasochistes, comme en atteste le niveau des serpents qui suit qui est un segment de plateforme absolument intraitable.
Quid de la difficulté de Turbo Tunnel ? Est-ce un gachis qui empèche le jeu de devenir une référence ? Ou est-ce un trésor de game design qu'il faut apprendre à apprécier ? Quelqu'en soit la réponse, Turbo Tunnel reste le More Frustrating NES Moment, et c'est pour ça qu'on l'aime.