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West of Loathing
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West of LoathingLes mystères complètement à l'Ouest
Période de l'histoire pas moins fascinante que d'autres, la Conquête de l'Ouest est synonyme, dans l'imaginaire collectif, de westerns spaghettis et d’entraînantes musiques à base de sifflements, de guitares et d'harmonicas. Il faut dire que ce morceau de l'histoire américaine, par le côté chaotique et violent dont il est imprégné (à tort, apparemment !), a été une source d'inspiration continue pour nombre de cinéastes ou de romanciers. Beaucoup moins du côté du jeu vidéo en revanche, car la liste de jeux puisant dans cet univers n'est pas grande, et que pour pas mal de monde, la liste des exemples s'arrête à Red Dead Redemption, Call of Juarez et Wild Arms. Donc, quand un jeu sort en prenant le grand ouest comme inspiration, ça attire l’œil. Encore plus quand il le fait... avec des bonhommes en bâtons dans un jeu monochrome qui donne l'impression d'avoir été dessiné par un enfant de 8 ans...?
Le bon, la brute, et le mec qui marche de manière loucheWest of Loathing commence de la manière la plus simple qui soit, par un écran de sélection où l'on va choisir le nom, le sexe et la classe de notre personnage entre Cow-Puncher (combattant qui préfère le corps à corps), Beanslinger (adepte de la magie), et Snake Oiler (as de la gâchette bien roublard). Eeeeet oui, jeu est tout en anglais. Et une fois le choix fait pas de temps à perdre, car notre avatar a rendez-vous avec le destin, et surtout avec le grand Ouest où se situe Frisco, la ville où tout semble être possible. Le seul souci étant qu'il y a un continent à traverser entre le nid familial et l'objectif fixé. Quelques larmoiements avec papa et maman, un message d'encouragement du petit frère, qui nous voit clamser avant même les fêtes de Noël, et l'aventure peut donc commencer. Une aventure où la magie côtoie les revolvers, où la bière à base d'eau de cactus transforme le consommateur en cactus, où un créateur sadique semble avoir pris du plaisir à cacher des objets dans les crachoirs de tous les Saloons, et où la plus grande menace existante est la présence de vaches démoniaques venues d'une autre dimension. Bienvenue donc dans le Wild West façon West of Loathing !
Vous vous en doutez donc en lisant ces quelques lignes, et surtout en voyant la tronche du jeu, il va donc faire partie de cette catégorie qui va miser sur l'humour et les mots comme principaux moteurs, qui vont aller jusqu'à se nicher dans les options du jeu. On est d'ailleurs vite mis dans le bain entre le déblocage d'une capacité pour marcher de manière stupide, des descriptions d'objets farfelues ou l'application littérale d'expressions - les aiguilles qui servent à crocheter les coffres se trouvent dans des bottes de foin, par exemple. Mais il ne faut pas non plus attendre longtemps pour voir que le jeu d'Asymmetric Studio est bien plus subtil qu'il n'y paraît, donnant l'impression d'être plus une aventure textuelle qu'un RPG "classique" dans sa construction, vu l'importance qu'il donne à l'écrit, et la manière dont il enchaîne paragraphes, figures de styles et jeux de mots, parfois de manière plutôt soutenue. Le style bonhomme en bâtons contribue à cette impression d'aventure textuelle, un choix volontaire du créateur histoire de mieux stimuler le joueur par la magie des mots; il faut aussi dire qu'après 15 ans à développer Kingdom of Loathing, première aventure du studio qui est un jeu par navigateur (et qui est encore vivant aujourd'hui !), il a eu le temps de s’entraîner et de se perfectionner. Et ça se ressent car, même si le jeu enchaîne et multiplie les lignes de dialogues et les rencontres ,chacune est unique, ne tombant dans la lourdeur ou la redondance que de manière volontaire le temps d'une quête ou deux. Bref une "vraie" aventure comique, et pas juste un empilement de références et de clins d’œils appuyés à la pop culture, comme ça s'est beaucoup fait ces dernières années.
Le principal "hic", il va venir du fait que le jeu a été conçu par un américain, avec comme toile de fond la culture américaine ; et ça ne se résume pas à l'emploi d'expressions ou de mots valises/d'argots typiques du pays de l'oncle Sam, car le jeu va aussi s'inspirer de l'histoire des USA (saviez vous qu'ils avaient eu un Empereur ?) pour planter le décor. Et avoir confiance dans son anglais c'est une chose, mais comprendre la référence en est une autre. Si la sensation de passer à côté de quelque chose se manifeste pendant une quête, ce n'est peut être pas par hasard. Le far à l'ouestPassé le hameau de Boring Springs servant de tutoriel, l'aventure de West of Loathing commence réellement dans la ville de Dirtwater et la découverte de ce qui sera l'objectif principal du jeu : aider le train de la Manifest Destiny Railroad Company (un rendez-vous avec le destin, disais-je) à rejoindre Frisco en résolvant les différents problèmes qui apparaîtront durant le voyage. Une quête, ni épique, ni vraiment affriolante, plutôt courte même car elle doit représenter 5% du contenu, mais tout aussi marrante que le reste du jeu. La véritable aventure va plutôt se vivre dans la découverte du continent sur lequel elle prend place. Vide au tout début, celui-ci va voir des points d’intérêts pousser comme des champignons au fil du jeu, que ce soit en discutant avec des NPC, en lisant des notes, en acceptant des quêtes, etc. Ces lieux peuvent être de différentes natures, de simples maisonnettes perdues dans la pampa à des forts militaires et, bien sûr, des mines et autre joyeusetés servant de donjons. La structure du jeu est basée sur la découverte de ces lieux, chacun proposant un objectif différent et un ou plusieurs secrets, énigmes, puzzles à trouver et résoudre, et tout un tas d'interactions rigolotes en prime. La progression est totalement libre et le joueur a un contrôle sur l'avancée des événements. Le truc étant qu'il n'aura pas les outils pour tout nettoyer lors d'un premier passage, ce qui va forcément amener à des revisites pour tout dévoiler. Ces dernières sont prévues dans le déroulement du jeu via le format court de ces zones, la possibilité de toujours fuir les affrontements qu'ils soient aléatoires ou non, et la rapidité du déplacement du personnage pour favoriser un rythme soutenu. De plus, histoire de répéter, l'humour agit également comme un moteur dans la volonté de découvrir le dénouement de toutes les situations saugrenues rencontrées au fil du jeu ; les balades d'un point à un autre déclenchent également de nombreux événements aléatoires, ce qui atténue encore plus une éventuelle impression de "temps perdu" pendant les nombreux aller-retours du jeu. Même les quêtes de livraisons sont sympathiques à faire.
Les outils pour progresser se retrouveront dans l'inventaire et le profil statistique de notre personnage. Le développement de notre avatar passera donc par une batterie de capacités actives ou passives, qu'il obtiendra au fil de l'aventure. Un éventail relativement classique qui passe du crochetage ou l'intimidation à des capacités pour augmenter ses aptitudes en combat ou utiliser de la magie pour détruire son adversaire. Le tout est bien sûr habillé du même costume farwesto-comique que le reste du jeu. Toutes les capacités peuvent être améliorées en investissant une réserve unique de points d'expérience, soit en le faisant nous-même soit en laissant le jeu décider automatiquement pour nous. Expérience qui ne s'obtient pas juste via les combats et les quêtes, mais aussi en interagissant avec son environnement, ce qui fait qu'elle tombe très régulièrement dans nos poches. Le jeu va aussi intégrer un système de perks (comme dans les Fallout par exemple), ces bonus - ou parfois malus - qui sont le plus souvent statistiques, récompenses directes de nos choix et nos actions, et dont les effets ou l'obtention sont parfois bien exotiques. Et à ça, il faut aussi rajouter que l'équipement du jeu n'aura pas juste une fonction matérielle, mais qu'à plein de moments dans l'aventure ils pourront avoir une influence sur le déroulement de certains événements - comme le masque de membre de secte, qui permet d'éviter les combats et même d'obtenir des informations auprès des membres. Le système n'est pas non plus hyper profond mais il fait bien le café, assez pour offrir à chaque joueur un parcours unique.
Botte di NataleCependant, tout n'est pas rose dans cet univers qui utilise la viande comme monnaie. La structure libre et le fonctionnement du système de capacités fait que chaque joueur pourra tacler le jeu comme bon il lui semblera. Mais à l'aléatoire du parcours choisi par le joueur va se cumuler l'aléatoire avec lequel le jeu distribue les friandises ; on peut très bien chopper une capacité dans l'heure, ou ne la voir apparaître que vers la conclusion de l'aventure, et donc pendant un bon moment passer à côté d'actions irréalisables car on a pas le bon talent. Certes la manière dont est agencée le jeu permet de revenir très vite sur ses pas à n'importe quel moment, mais cela n’empêche pas pour autant cette petite impression d'un jeu qui nous fait parfois volontairement tourner en bourrique. D'autant plus que l'inventaire est une véritable poubelle et qu'il n'existe pas de réel outil pour suivre l'avancement de ses découvertes, ce qui peut être problématique face à des quêtes parfois bien retorses. Bref, le jeu n'a pas vraiment l'envie de nous aider dans la gestion de nos tâches. Et si on rajoute à ça le fait qu'il assume totalement son système de choix/conséquences en multipliant les choses loupables (et de manière littérale, on peut échouer à l'obtention d'une sauvegarde 'parfaite' dès les 5 premières minutes de jeu), ça peu empiler un peu plus les frustrations.
On passera vite fait sur le système de combat au tour par tour du jeu, ni trop bon, ni trop mauvais, plutôt bourrin en réalité, notamment grâce au système de points d'actions et de techniques/objets ne gaspillant pas de tours. C'est davantage ce qui existe à côté qui est intéressant, comme le Pardner, un compagnon qu'on peut choisir - ou non - parmi quatre disponibles pendant l'étape à Boring Springs, chacun ayant un panel de compétences pouvant être utiles pendant et en dehors des combats. Il existe également une petite mécanique appelée "Colère" qui gonfle les stats de notre personnage s'il subit une défaite, et un système de nourriture qui permet d'améliorer temporairement ses performances. Pas assez de créativité pour un concours de blagues ou pas assez de force dans les biceps pour tacler un boss ? La bonne bibine peut retourner la situation. Et il y a d'autres moyens de donner un coup de fouet ponctuel à notre héros. Toujours dans cette logique de fluidifier un maximum l'aventure, West of Loathing dispose d'un lot d'options pour contourner les limites de notre personnage afin de continuer à avancer, et c'est plutôt pas mal. C'est tout droitEn l'état, difficile de faire un long étalage sur la technique et les graphismes de West of Loathing : il y a du blanc, du gris, du noir, un peu de rouge durant les combats... tout et très simplet avec de sympathiques effets d'ombres et de lumières dans les zones sombres... et puis c'est tout. Au moins ça tourne en 60 FPS, et il s'offre le luxe de proposer une option graphique pour les daltoniens (!). Bref, a chacun d'apprécier le choix du style bonhommes en bâtons. La musique du jeu offre une vingtaine de pistes aux sonorités western, et même s'il ne faut pas s'attendre à du Ennio Morricone ou à quelque chose du niveau d'un Red Dead Redemption, elle appartient à cette famille de petites OSTs qui s'intègrent parfaitement au cadre de son jeu et qu'on se surprend même parfois à siffloter.
De part sa structure, West of Loathing est un jeu qu'on peut finir plus ou moins rapidement : uniquement viser l'aventure principale n'offrira qu'une partie de 5-6 heures, flâner le double, et il faudra compter environ 20 heures pour gratter tout le contenu d'une partie. L'aventure n'est cependant pas terminée une fois la quête principale finie, car c'est au joueur de déclencher l'apparition du mot fin, qui sera accompagné d'un épilogue résumant notre épopée. Et si le Happy End proposé n'est pas à notre goût, il est toujours possible de retourner collecter quelques objets et compléter quelques quêtes pour le rendre meilleur. À noter que le jeu ne propose pas de New Game+, logique après tout car contraire à sa philosophie. Comme le dit l'expression, on ne juge pas un livre à sa couverture. La plastique simpliste de West of Loathing est à la fois son meilleur et son pire avocat pour attirer l’œil, c'est un jeu qui mise sur le fond plus que la forme, mais il faut faire le premier pas pour le découvrir. C'est un jeu loufoque, étonnement bien pensé sur pas mal de points (et pas très bien pour une poignée d'autres), tout aussi jouable en courtes qu'en longues sessions, et qui assume totalement ses choix. Son seul véritable frein va être la barrière de la langue, car, comme dit plus haut, le jeu est très américo-centré. Et il faut aimer lire. Le passage sur Switch lui a permis de s'offrir un second coup de projecteur, et c'est tant mieux car West of Loathing est une bonne petite surprise, disponible à petit prix, et qui mérite d'être (encore plus) connu.
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