Cinq ans après la sortie d'un troisième épisode,
Nocturne,
la série fétiche d'
Atlus est de retour avec
Shin Megami Tensei: Strange Journey. Première surprise, la plateforme choisie est la Nintendo DS alors que les fans attendaient plutôt un opus sur console de salon. Deuxième surprise, l'intrigue ne se déroule pas à Tokyo mais en plein cœur de l’Antarctique contrairement aux épisodes précédents.
Alors, véritable suite ou simple jeu surfant sur le succès de la série ?
Un étrange voyage...
Tout commence lorsqu'une masse noire d'origine inconnue fait son apparition au pôle sud, en plein milieu de l'Antarctique. Le problème est que ce phénomène appelé "Schwartzwelt" s'élargit à grande vitesse et absorbe toute matière sur son passage, ce qui est plutôt gênant pour l'humanité, vous en conviendrez... Les Nations Unies décident donc d'envoyer un groupe de chercheurs et de soldats dans cette zone afin de l'explorer, mais surtout d'empêcher son expansion qui menace toute vie sur Terre. Et vous, fier soldat américain (ou japonais en version original), faites bien entendu partie de cette équipe d'explorateurs prêts à tout.
Cependant, le voyage à l'intérieur du Schwarzwelt ne se passe pas tout à fait comme prévu : seul l'un des quatre véhicules envoyés arrive à destination, tandis que les autres se sont crashés ou perdus. Mais les problèmes sont loin d'être terminés et le groupe découvre rapidement que cet endroit est infesté de démons au comportement plutôt agressif. Heureusement pour vous, tout l'équipage est doté d'une tenue spéciale facilitant l'exploration du Schwartzwelt (et conçue par un styliste au goût très douteux). Cette tenue, en plus de stabiliser le corps humain dans cet environnement hostile, permet à son utilisateur de voir, combattre et communiquer avec les démons. Vous êtes donc fin prêt à vous lancer dans l'exploration de ce monde très étrange où il vous faudra à la fois comprendre et vaincre les démons y résidant, afin de sortir votre équipage de cette situation et éventuellement sauver le monde de la destruction.
Le pitch de départ est donc plutôt intéressant, mais permet surtout de plonger le joueur dans une ambiance inquiétante et glauque qui perdurera pendant l'intégralité de l'aventure. Le scénario se laisse suivre tout du long, et apporte régulièrement de nouvelles questions et réponses pour maintenir éveillé l'intérêt du joueur. Le problème est que le rythme de la narration est vraiment lent, il faut souvent avancer des heures dans les donjons pour au final n'avoir qu'une petite scène de dialogue qui ne fera pas beaucoup avancer les choses, et le tout est mis en scène le plus simplement possible : un artwork par interlocuteur et du texte défilant. Les personnages sont dans la même veine, c'est à dire plutôt intéressants à la base mais auraient mérité d'être beaucoup plus travaillés. Heureusement, les alignements (parmi l'habituelle trinité Law/Neutral/Chaos) sont toujours bien présents et permettent de mieux s'impliquer dans le scénario grâce à quelques choix pouvant l'influencer, surtout dans la dernière partie de jeu.
Bien qu'originale, la trame scénaristique de Strange Journey n'est donc pas l'élément qui retiendra principalement l'intérêt du joueur, mais elle soutient un gameplay bien rodé et maîtrisé.
Dédales et démons
Première différence avec les opus précédents : nous avons droit ici à un pur Dungeon-RPG. Votre vaisseau fait donc office de quartier général où il est possible d'acheter des objets, de se soigner et surtout d'accéder aux différents secteurs du Schwartzwelt.
Leur exploration se révèle très agréable grâce à une vue subjective classique sur l'écran du haut et une carte qui se remplit automatiquement et qui contient beaucoup d'informations sur l'écran du bas. Le level-design est éprouvant, comprenez par là que les développeurs s'en sont donné à cœur joie et ont conçu des niveaux où passages secrets, téléporteurs et autres pièges en tout genre sont légion. Il faut donc passer beaucoup de temps à explorer les donjons de fonds en combles afin de trouver le bon chemin pour poursuivre l'histoire. Cet aspect pourra rebuter certains joueurs mais ceux aimant se prendre la tête dans des niveaux bien tortueux seront aux anges (si si, il en existe vraiment). En plus de la mission principale, il existe un bon petit paquet de quêtes annexes qui vous seront données par les membres de votre équipage ou par certains démons rencontrés dans le Schwarzwelt, et qui ont le mérite d'être assez intéressantes, notamment grâce à leurs nombreuses références mythologiques.
Mais bien entendu, la promenade n'est pas la seule activité de notre héros et les combats aléatoires occupent une grande part du jeu. Comme dans tout bon SMT, il est possible de converser avec les démons afin d'obtenir des objets ou de l'argent, mais surtout de les recruter car ceci représente le seul moyen d'avoir des alliés combattant à vos cotés. Les affrontements utilisent un système au tour-par-tour des plus classiques : à chaque début de tour, il faut sélectionner les actions à effectuer par votre avatar et ses démons (au nombre maximum de trois) qui seront ensuite exécutées par ordre d'initiative. La principale subtilité vient du fait que lorsqu'une attaque exploite une faiblesse d'une cible, tous les alliés ayant le même alignement que l'attaquant exécuteront un coup supplémentaire. Il est donc important de bien profiter des faiblesses des ennemis et de se protéger des siennes afin de remporter les combats sans trop de soucis. Les joutes sont donc plutôt agréables grâce à cette part de stratégie mais également grâce à la vivacité du système, en effet les chargements sont très courts et les rapides animations s'enchaînent très bien entre elles et sans temps mort. De plus, la difficulté est plutôt bien dosée, chaque boss offre une certaine dose de challenge mais ne poussent jamais au leveling intensif si votre équipe est bien équilibrée.
Fusionnez les tous !
D'ailleurs, Strange Journey laisse pas mal de possibilités au joueur au niveau de la personnalisation de son équipe. Le héros peut se munir de plusieurs pièces d'équipement, notamment un flingue qui donnera accès à diverses attaques spéciales. Le souci est que pour obtenir de nouveaux objets, il faut les échanger contre des matériaux, appelés forma, que l'on trouve dans les donjons ou sur les ennemis tués. Il arrive donc régulièrement de ne pas pouvoir acheter un objet à cause d'un forma manquant, ce qui peut être très frustrant. Mais l'élément le plus important de la customisation est assurément votre choix de démons. En plus de pouvoir recruter pratiquement tous ceux rencontrés, il est possible de les fusionner entre eux afin d'en obtenir de nouveaux toujours plus puissants. De plus, lorsqu'un démon a remporté suffisamment d'expérience en combat, le joueur obtient sa "source" qui permet d'apprendre certaines de ses compétences à n'importe quel démon lors d'une fusion. Il existe plein d'autres petites subtilités (les accidents, les fusions spéciales, ...) ainsi qu'un nombre impressionnant de démons et de compétences rendant le système extrêmement riche. On pourra seulement regretter que les fusions restent un peu plus restrictives que dans le reste de la série (surtout au niveau de l'héritage des skills), mais l'ensemble s'avère être très addictif et vraiment jouissif pour quiconque aime passer des heures à peaufiner son équipe de rêve (ou plutôt de cauchemar dans le cas présent).
Beauté glaciale ?
Le design des démons est d'ailleurs particulièrement réussi. Ils possèdent chacun un artwork et un sprite différents superbement dessinés par le character et monster designer attitré de la série, Kazuma Kaneko. Tous les protagonistes possèdent également un ou plusieurs jolis artworks qui apparaissent durant les scènes de dialogues, souvent par dessus de charmantes planches représentant les divers lieux et retranscrivant parfaitement l'ambiance sinistre du soft. On regrettera principalement le design assez douteux de la tenue Demonica des membres de l'équipage.
De leur coté, les donjons en vue subjective sont plutôt agréables à regarder mais loin d'être transcendants, la faute à des textures redondantes et pixelisées lorsqu'on s'en approche un peu trop. Cependant, l'ensemble est très cohérent et on peut facilement se sentir happé par l’atmosphère étrange du jeu, renforcée de surcroit par une bande originale de grande qualité mais qui ne plaira pas à tout le monde. Les pistes sont intégralement orchestrales, avec notamment une présence importante de chœurs, qui accentuent l'aspect mystique et spirituel du jeu. Le travail de Meguro est donc assez différent de ce à quoi il nous a habitué mais colle parfaitement à ce nouveau SMT. Mention spéciale aux thèmes de combat, assez originaux dans leur style en même temps posés et épiques, mais très motivants pour découper du démon. On déplorera seulement la répétitivité de l'OST : 31 pistes pour 64 minutes de musiques, ça fait un peu léger pour un RPG durant plus de cinquante heures en ligne droite.
Strange Journey est donc un représentant plutôt faible de la série Shin Megami Tensei, principalement à cause de son manque d'ambition aux niveaux scénaristique et technique. Mais son ambiance soignée couplée à un gameplay riche et passionnant en font l'un des meilleurs Dungeon-Crawler de la DS.
Amateurs d'exploration et de gestion de personnages, vous êtes maintenant prévenus !
04/11/2011
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- Monster design impressionnant en qualité et en quantité
- Ambiance sinistre très réussie
- La fusion des démons, toujours aussi addictive
- OST orchestrale parfaitement adaptée
- Level design très travaillé...
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- ...mais qui en fera criser plus d'un
- Système d'achat d'objets assez contraignant
- Mise en scène très pauvre
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TECHNIQUE 3.5/5
BANDE SON 4/5
SCENARIO 3/5
DUREE DE VIE 4.5/5
GAMEPLAY 4/5
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