Suikoden est le premier volet de la série à succès de Classical-RPG de Konami du même nom. Il est sorti en 1995 sur Playstation. Ce fut l'un des premiers RPGs sortis sur ce support, avant la référence mondiale qu'est Final Fantasy VII. Il existe de nombreux épisodes entre les différents épisodes de la série, réputée pour son univers et ses scénarios, par conséquent il est fortement conseillé de les faire dans l'ordre, en commençant par le premier, présenté ici.
La révolution est en marche
Le personnage incarné par le joueur est Tir, le fils de l'un des 6 généraux de l'Empire, Teo MacDohl. La vie est douce pour l'adolescent, couvé par son entourage. Un jour, l'empereur Barbarossa ordonne à Teo de partir régler un conflit à la frontière. Dans le même temps, l'empereur engage Tir à son service. Cela se traduira par des missions mineures, mais à l'occasion de l'une d'elles Tir et son groupe sera confronté à la réalité du monde extérieur...
Une console encore sous-exploitée
Suikoden est l'un des plus vieux RPGs de l'ère 32 bits, et c'est sans surprise qu'il est l'un des plus datés techniquement. Essentiellement en 2D, parfois intégrée dans un environnement 3D comme lors des combats, les graphismes manquent de finesse et les décors sont bien souvent très pauvres, avec une pixellisation importante en particulier lors des gros plans. De ce point de vue, on peut même aller plus loin en disant qu'on ressent très peu de progrès avec les derniers jeux sortis sur Super FamiCom (SFC). On pourra néanmoins apprécier la taille des sprites et leur animation, bien que fort limitée. Malgré cela, les graphismes du jeu ont de bonnes choses à offrir. Outre une introduction impressionnante, le jeu se dénote par un character design varié et parfois très joli, adaptant un style aquarelle original et du plus bel effet. De manière générale, l'ambiance graphique est assez réaliste, évitant les couleurs flashy et les décors extravagants au profit d'un univers où les épées prédominent mais où les fusils ont déjà fait leur apparition.
Suikoden II reprendra la même recette mais avec beaucoup plus de réussite.
Les sorts de magie sont agrémentés de jolis effets, mais cela reste sobre.
Semblant refuser la course à la 3D, comme pourra le faire Squaresoft avec FFVII, au profit d'une approche plus traditionnelle pour l'époque, le jeu ne propose pas de cinématiques. Et c'est sans surprise qu'au final il a mieux vieilli visuellement que les premiers jeux cherchant à exploiter les nouvelles possibilités technologiques.
Un bonheur pour les oreilles
La bande-son est d'une qualité remarquable, dans un style bien particulier, et comme bien souvent les thèmes correspondent à merveille aux situations qu'elles accompagnent. Difficile d'en parler plus en détail, le seul moyen valable de juger étant d'écouter. A noter que Suikoden II reprend un certain nombre de thèmes de son prédécesseur, renforçant le lien entre les deux jeux. On peut d'ailleurs regretter que Miki Higashino ne se soit occupée que des deux premiers épisodes. Il est également à noter que le jeu est doté de bruitages variés et sympathiques.
Bâtir sa propre armée
Au cours du jeu, vous serez amenés a constituer une armée et à bâtir un Quartier Général (vous découvrirez vous-même les circonstances qui vous y amèneront).
Il vous faudra donc rallier à votre cause un maximum de gens. Il y a 108 personnages en tout à recruter, ce sont les étoiles de la destinée (caractéristique récurrente des Suikoden). Bien entendu, certains persos viendront d'eux-même renforcer votre armée, et d'autres attendront de se laisser convaincre. Les 108 persos ne sont pas tous capables de se battre. On peut les diviser en plusieurs catégories. Les bons combattants, les combattants inutiles, ceux qui tiennent un magasin au QG et ceux qui jouent un rôle majeur dans l'histoire, certains appartenant à plusieurs de ces catégories.
Il existe un système qui permet de se déplacer très rapidement entre votre QG et les villages (fini les interminables allers-retours qui rallongent la durée de vie sans rien apporter). Mais il n'est pas à disposition dès le début.
Suikoden ne conte pas l'aventure de jeunes héros, mais une guerre civile. Il s'agira d'effectuer des missions diplomatiques, et de battre l'ennemi avec une armée.
Trois façons de se battre
Combats stratégiques/militaires : Ces combats se déroulent au tour par tour. Il s'agit en fait d'un pierre-feuille-ciseau. L'attaque magique est vulnérable aux attaques des archers, eux-mêmes fragiles face à la charge ennemi, qui est sans défense devant les sorts ennemis.
Duels : Parfois vous serez amenés à vous battre en un contre un. Il s'agit également un pierre-feuille-ciseaux. Il est important de signaler que les caractéristiques en duel tiennent compte des caractéristiques du personnage (points de vie, attaque, défense). Il y a très peu de duels au cours du jeu.
Combats classiques : Ces combats sont lpus riches et intéressants qu'ils n'ont l'air. Ils comportent de nombreux éléments à gérer judicieusement pour éviter les problèmes en combat. Tout d'abord, le nombre élevé de personnages et leurs spécificités font qu'il est important de constituer un groupe cohérent, sur plusieurs niveaux. Premièrement, tenir compte de la portée des personnages, qui impose de ne pas prendre que des bourrins au corps à corps. Ensuite, éventuellement mettre des personnages qui peuvent lancer ensemble une attaque multiple (avec l'option unité). Il est aussi important que le groupe soit complémentaire au niveau des runes (types de magies disponibles, qu'on peut changer à volonté, une rune par personne) et de l'équipement. (Il existe également des runes aux effets hors combats, dont une rune qui permet de se déplacer plus vite) Il est également essentiel d'optimiser en permanence son équipement, c'est-à-dire le niveau de son arme et l'équipement annexe (la place est limitée pour les objets de guérison et autres). De plus, il est important de bien gérer sa magie, en sachant que les MP sont propres à chaque sort et non communs à tous les sorts.
A noter que le système de leveling (semblable à celui des Shining Force) homogénéise rapidement les niveaux, par conséquent l'aspect leveling est presque absent. Au début des combats, il existe une option (free will) qui permet de lancer tous les personnages à l'attaque sans consignes précises. Ça permet de ne pas s'attarder sur des combats sans difficultés.
Au final, un gameplay riche et accrocheur, qui, loin d'en foutre plein les yeux, requiert une gestion efficace et un minimum de stratégie pour que le jeu ne présente pas de réelles difficultés au niveau des combats.
Drôle, bouleversant et passionnant
Suikoden est un jeu rythmé, sans temps mort, où les évènements vous contraignent sans cesse à réagir plutôt qu'agir. Point de recherche de trésor, de détours (genre il faut 3 objets pour préparer une potion, mais il faut une clé pour entrer dans tel lieu...). De plus, les lieux sont assez courts, les combats dynamiques, et on ne perd pas son temps à parcourir la carte du monde. L'histoire est relativement riche, mais extrêmement dense. Il faut compter un peu plus de 20 heures pour le finir la première fois, et environ 30 heures si on essaie de trouver les 108 étoiles. Lorsqu'on connaît le jeu, celui ne prend alors plus que 12 heures au complet.
Pour beaucoup, c'est trop court. Les épisodes suivant de la série sont plus longs. Suikoden est doté d'un scénario exceptionnel, avec des caractéristiques très différentes des autres références du genre que peuvent être Xenogears ou FFVII. Ici point de science-fiction, de vocabulaire compliqué, de révélations chocs. Tout est dans la fluidité et la logique implacable du déroulement de l'histoire. Suikoden nous propose, comme Ogre Battle 64, une révolution des opprimés contre une élite égoïste et corrompue. On découvre l'univers du jeu en même que le héros, et notre position change avec la sienne, allant jusqu'à condamner les privilèges dont on bénéficiait. A ce titre, l'évolution des personnages du groupe initiale est fabuleuse, malgré un nombre total pharaonique de personnages et une durée de vie limitée. D'ailleurs un bon pourcentage des personnages sont très attachants et intéressants. Comment c'est possible en si peu de temps ? Tout d'abord, régulièrement le jeu nous impose des personnages, ce qui permet de les développer lors d'évènements qui les concernent. Mais ce sont surtout les dialogues d'une justesse incroyable et la mise en scène troublante de perfection qui en sont responsable. En un dialogue, Suikoden arrive à donner vie à des personnages bien plus riches que ceux de beaucoup de jeux, malgré 50 heures pleines de dialogues et de situations les concernant. Ça s'appelle le talent. Le jeu utilise également à merveille son énorme casting pour nous offrir une palette très riche de personnages, et ce sans faire appel à des espèces exotiques. Tous les âges sont représentées, les réactions aux différents évènements sont très variées.
En conséquence de cette mise en scène fabuleuse, on assiste à un grand nombre de scènes mémorables, tragiques, émouvantes, ou hilarantes. La frontière entre chacun de ces sentiments est quasi-inexistante dans Suikoden, on passe de l'un à l'autre sans y être préparé. Le ton du jeu est définitivement adulte. Malgré un humour des plus réussis, l'histoire est totalement dénuée de compromis. Jamais il ne s'établit une ambiance agréable et bon enfant comme on peut en avoir l'habitude, par exemple dans les Tales of. Ici la cruauté est bien présente, et elle fait son apparition sous ses pires formes. Aussi bien chez vos adversaires que dans votre propre clan, la pitié, le pardon, ne sont pas permis , contrairement à la lâcheté, la peur, l'intolérance, la haine... Suikoden est avant tout un drame poignant. Il regorge de situations tragiques mais inéluctables. Certaines personnages (et pas les moins attachants) se voient réserver des sorts funèbres. Suikoden est un jeu qui peut se révéler éprouvant psychologiquement pour quelqu'un qui s'investit sans limite dans l'histoire. C'est pour cette raison qu'à mon avis il reste dans les mémoires (comme son successeur).
Notons également que la toute fin du jeu fait référence au chef d'œuvre absolu d'Alfred Hitchcock, Vertigo.
Suikoden se démarque du reste de la production sur bien des points, posant les bases d'une des meilleures séries de RPG existant. Le jeu souffre de quelques défauts de gameplay mais dans l'ensemble, aujourd'hui encore, il s'agit d'une référence. Unique!
12/05/2005
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- Scénario passionnant sans temps mort
- Richesse de l'univers
- Bande-son
- Certains passages et personnages émouvants
- Humour
- 108 personnages
- Le QG
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- Quelques imperfections dans le gameplay
- Techniquement limité
- Un peu court
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TECHNIQUE 3/5
BANDE SON 4.5/5
SCENARIO 5/5
DUREE DE VIE 3.5/5
GAMEPLAY 3.5/5
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