En mars 2002 sort Kingdom Hearts. Après le très grand succès de ce dernier au Japon (puis par la suite dans le reste du monde), Squaresoft décide, pour arrondir ces fins de mois pourtant déjà bien bedonnantes, de sortir une version de son jeu avec quelques bonus : Kingdom Hearts Final Mix. Dans cette version, on a le droit à la fin du jeu à une vidéo bonus nommé Deep Dive. On y voit, dans une mise en scène classieuse dont seul Square a le secret, des hommes en manteau noir discuter, d'autres se battre, tout ça ne semble a priori pas avoir de rapport avec Kingdom Hearts, si ce n'est l'apparition de Mickey en fin de vidéo... Tout a été conçu pour retenir l'attention des fans, et les intentions de Square sont alors claires : donner à Kingdom Hearts une suite, suite qui mettra près de trois ans avant d'arriver sur les étalages nippons. L'attente fut longue, mais le résultat est-il à la hauteur de nos espérances?
Grande plongée dans l'histoire...
Les débuts scénaristiques de Kingdom Hearts sont flous. N'étant pas fan du premier épisode (qui reste un jeu sympathique cela dit) que j'ai fait il y a 3 ans et n'ayant pas touché à l'épisode GBA (comme vous le savez, un épisode Game Boy Advance a vu le jour sous le doux nom de Chain of Memories), je me retrouve catapulté dans l'histoire sans trop savoir quelles en sont les ficelles. Ce qui étonnera le non-initié, comme moi, qui n'a pas épluché la moindre info sur le net avec le filet de bave au coin des lèvres, c'est qu'on ne commence pas l'aventure aux commandes de Sora, mais d'un blondinet ma foi fort sympathique bien que plutôt taciturne du nom de Roxas (bon c'est bon tout le monde le sait de toute façon maintenant) et dans une ville inconnue du nom de Twillight Town. Notre jeune ami à la coupe fashion (Nomura au design, allergiques, fuyez !) coule une existence paisible et insouciante faite de petites aventures et de glaces au sel de mer. Mais chaque nuit, Roxas fait de bien étranges rêves. Comme si les souvenirs d'une autre personne étaient enfouis au fin fond de lui-même... J'éviterais d'en dire plus pour ne pas vous gâcher trop le tout, mais vous aurez deviné que tout ceci n'est qu'un prologue à la véritable aventure qui vous attend, aventure dans laquelle vous retrouverez vos compagnons de jeu favoris : Sora, Donald et Goofy (Dingo pour les anglophobes). Le scénario de Kingdom Hearts II possède en fait deux gros problèmes, mais j'y reviendrai quand je parlerai des défauts.
On prend les mêmes, on peaufine et on recommence
Globalement la sauce n'a pas vraiment changé depuis le premier épisode, on se retrouve avec un Action-RPG dont la formule est assez unique il faut le reconnaître. Vous contrôlez Sora en temps réel dans les différents mondes qui compose l'univers et quand un ennemi apparaît vous sortez votre keyblade et commencez à frapper. Si en début d'aventure vous disposerez d'un combo somme toute assez simple, vous allez acquérir de nouvelles habilités en cours de jeu qui vous permettront d'agrandir significativement le nombre de hits au compteur. Les habilités sont attribuables via le menu et sont régies par un système d'AP tout ce qu'il y a de plus classiques, à savoir que chaque habilité (qu'elle serve à effectuer un coup supplémentaire au combo, vous permette de parer les coups, d'empocher plus d'expérience ou de lancer une magie) coûte un nombre d'AP variable selon son utilité. Bien entendu quand vous avez attribué tout l'AP à votre disposition, vous ne pouvez plus associer d'autre technique à votre personnage. Votre nombre d'AP augmentera avec votre niveau, mais surtout grâce à des objets nommés AP Boost que vous récolterez lors de votre périple. Mais ça ne s'arrête pas là, car vous récolterez également des keyblades spéciales (qui ont un design plus léché les unes que les autres) ayant leur propre habilité (sauf qu'ici elles sont toutes activées sans coût d'AP) qui vous seront équipées lors des "Drive". Le Drive est une sorte de furie où votre apparence change et où vous devenez plus fort grâce aux nombreuses habilités des keyblades spéciales. Une jauge de Drive monte à l'écran au fur au mesure que vous tapez et recevez des coups. Quand le Drive est enclenché, cette jauge baisse progressivement jusqu'à atteindre le niveau 0 où vous redevenez normal. Plusieurs formes sont à votre disposition et vous en acquérrez de nouvelles à mesure que vous avancez. Il y a également un système de limites qui elles consomment vos MP. Les limites varieront selon les personnages présents dans votre groupe car ils en existent aussi bien des individuelles que des combinées. On remarquera qu'une fois les MP consommés entièrement, une barre rouge remplace la jauge de MP et décroît progressivement, quand elle atteint 0, tous vos MP sont à nouveau à disposition (il existe un autre système attribuable via le menu, mais celui-ci m'a semblé bien plus efficace). Il y a également les invocations, qui vous permettront d'appeler des personnages de Disney aussi divers que Chicken Little (!), le génie de la lampe, Peter Pan ou encore Stitch (!!). Comme vous pouvez le constater, il y a une légère surabondance de systèmes et on finit par repérer ce qui est le plus efficace et on laisse tomber par exemple les invocations. À mon avis, le Gameplay aurait gagné à avoir moins de systèmes mieux exploités.
Reaction Command et dynamisme visuel
Ce n'est pas tout, en combat apparaîtra régulièrement la Reaction Command. La Reaction Command, qu'est-ce que c'est ? Eh bien contre certains ennemis, mais surtout contre les boss, apparaîtra à l'écran une icône de la touche triangle. A ce moment précis (vous avez la possibilité d'appuyer que pendant de courts centièmes de secondes), si vous êtes assez réactif, vous aurez la possibilité d'effectuer une action spéciale très efficace la plupart du temps, qui va par exemple vous permettre de retourner une attaque ou une arme de l'ennemi à votre avantage. Ce système dynamise vraiment les combats et certaines Reaction Command de Boss sont vraiment grisantes. Le problème est que tout cela est bien dirigiste et on a l'impression de se retrouver dans un Sonic où la seule chose qu'on a à faire est d'appuyer sur un bouton pour faire un truc incroyable, surtout que le système ne demande aucun timing et quand vous commencer à voir la la Reaction Command s'afficher, il suffit la plupart du temps de marteler la touche triangle. Et c'est bien là le problème de Kingdom Hearts II niveau gameplay. C'était plus ou moins déjà le cas de son aîné mais l'ensemble est excessivement bourrin. Marteler la touche croix (à l'occasion carré, car certains coups se déclencheront avec cette touche) et triangle quand vous en avez la possibilité sera ce que vous ferez pendant la totalité de la phase action du jeu. Visuellement, ça donne à l'écran l'équivalent du bourrinage à la manette, c'est-à-dire que ça pète dans tous les sens, avec des effets de lumières de partout, tant et si bien qu'on a parfois du mal à comprendre exactement ce qui se passe. Cependant, le dynamisme de l'ensemble est indéniable et les combats sont malgré tout assez plaisants. La mise en scène des boss est admirable et a fait l'objet d'un véritable travail. Cela permet de briser la routine bourrine des combats normaux et à réfléchir quelques instants à comment battre tel ou tel boss (attention, ça reste bourrin malgré tout). On remarquera avec plaisir que deux gros défauts du premier épisode se sont envolés : les caméras désastreuses (bien qu'elles demeurent perfectibles) et les phases de plates-formes.
Et Disney dans tout ça?
Eh bien oui, c'est pas le tout, mais je vous ai toujours pas parlé de Disney moi. Encore une fois, on peut saluer les équipes de Square-Enix qui ont effectué un travail graphique remarquable sur les personnages et les univers Disney. Chaque personnage de la firme de l'oncle Walt a été reproduit à la perfection et est reconnaissable en un clin d'œil. Les voix sont très souvent celles des originaux et le travail sur l'animation, la gestuelle, les expressions faciales est tout bonnement bluffant, on a vraiment l'impression de voir la réplique 3D des personnages en deux dimensions de notre enfance. Cela vaut également pour le reste du casting (Kingdom Hearts + Final Fantasy) également modélisé et animé à la perfection. Les univers Disney visités sont vraiment variées avec de belles surprises comme le monde rétro où vous retrouverez le premier aspect de Donald, Goofy et Mickey en noir et blanc, le monde du film Pirates des Caraïbes où vous retrouverez des Johnny Depp, Orlando Bloom et Geoffrey Rush criant de vérité (les animations faciales sont incroyables) et de moins bonne comme l'univers de Tron (mais cela dépendra de vos affinités avec les différents films). On regrettera une nouvelle fois le manque d'implication de l'univers Final Fantasy qui laisse la part belle à l'univers Disney. Mais si l'est une chose qui ne m'avait pas marqué dans le premier épisode, elle me saute désormais en pleine face avec ce deuxième volet... Et on en arrive aux deux gros points noirs du scénario et accessoirement du jeu dont je parlais précédemment.
Une mécanique bancale...
En effet, le scénario de Kingdom Hearts II possède deux gros défauts. Tout d'abord, même si cela ne m'avait pas marqué, mais était sûrement déjà le cas dans le premier épisode, c'est le manque flagrant de lien scénaristique entre la trame principale et la visite dans les univers Disney. Cela donne lieu à des choses assez incroyables. Vous finissez une phase de scénario importante dans Hollow Bastion là où la véritable histoire de Kingdom Hearts a lieu. Il y a quelques minutes encore vous étiez en train d'affronter un mystérieux personnage en manteau noir aux motivations obscures au sein d'une sombre histoire de personnalités multiples. Hop, fin de la phase scénario, vous vous retrouvez sur la World Map, dans votre Gummi Ship (Oh mon dieu, j'allais oublier ces atroces phases de shoot ont été conservées, et même si le tout a été amélioré, quand on essaye d'améliorer un truc naze à la base, ça donne un truc toujours naze, c'est vraiment incompréhensible que Nomura ait décidé de conserver cette idée de merde) et accédez au monde d'Ariel, la petite sirène. S'enclenche un jeu de rythme à la DDR où vous devez faire le guignol avec des poissons et des crabes. Dans la même dizaine de minutes et ce, sans aucun lien scénaristique, vous êtes passé de Kingdom Hearts II au jeu La petite sirène, danse avec moi. Même si j'imagine l'intégration d'univers aussi opposé difficile, je pense que les développeurs auraient gagné à mieux intégrer la partie Disney dans le scénario. Finalement, on ne goûtera que rarement au vrai scénario de Kingdom Hearts II qui tient finalement à peu de choses en terme d'heures de jeu, trop occupé à danser avec Ariel, sauver Mulan ou aider Aladdin, et Donald et Goofy auront beau s'époumoner "Organization XIII ?" à chaque truc louche dans un univers Disney, non, il s'agira encore d'un méchant de l'univers Disney sans aucun rapport avec la trame principale. À vrai dire, le seul vrai lien scénaristique entre les deux univers tient à Maléfice et Pete, et encore ça reste extrêmement superficiel. J'en viens maintenant au deuxième gros défaut du scénario et accessoirement du soft...
Un jeu pour fans
Le problème de KH2, c'est qu'il a entièrement été conçu pour les fans, et cela s'en ressent dans le scénario. Moi qui ait débarqué dans l'aventure avec un vague souvenir de Kingdom Hearts que j'avais fait il y a près de 3 ans et sans aucune connaissance de Chain of Memories, je me suis trouvé complètement largué scénaristiquement en début d'aventure. En fait, le jeu s'adresse clairement aux fans de Kingdom Hearts qui l'ont fait cinq fois et en connaissent l'histoire par cœur et ont également épluché l'épisode GBA dans tous les sens. Le non-initié se retrouvera devant une histoire dont il ne saisit pas la totalité des codes. On aurait aimé que Square-Enix pense aussi à ces joueurs, et propose par exemple un vrai résumé en début d'aventure, et encore je ne pense pas que cela suffise réellement, car KH2 est un jeu conçu pour les fans jusqu'au bout des pixels. Pour ceux-ci, oui, c'est la réponse à la question que je posais en début de test, oui, KH2 répond à toutes leurs attentes et même plus, oui, KH2 est le jeu qu'ils attendaient, et ils peuvent déjà lui accorder la note maximale. De ce côté c'est un manque de génie de la part de Square-Enix qui n'a pas su faire un scénario que pourrait comprendre la totalité des joueurs tout en faisant de subtiles références aux épisodes précédents pour les fans. Que c'est dommage. À vrai dire, je doute qu'il soit possible de faire quelque chose de vraiment cohérent avec la ligne de conduite que s'est imposé Square-Enix (inclure les univers Disney sans en altérer la nature). D'ailleurs, Nomura aurait récemment déclaré que la série allait changer (et c'est pas la vidéo bonus visible sous certaines conditions en fin d'aventure qui le fera mentir...).
Un très bon jeu malgré tout
Cependant, il est impossible de dire que KH2 est un mauvais jeu ou même un simple bon jeu. Car KH2 a quelque chose, un sens du spectacle, du visuel, de la mise en scène (tant pour les cut-scenes que pour les combats) et surtout du rythme. Même si vous n'accrochez pas vraiment au jeu, vous le finirez sans doute assez rapidement, car KH2 est un jeu au rythme sans faille. Vous y jouerez sans même vous en rendre compte, surtout que vous avancerez sans à coups, car le jeu en mode normal est d'une facilité déconcertante en début d'aventure avant de se corser un peu vers la moitié du jeu (il paraît par contre que le jeu est trop difficile en mode hard, on aurait aimé un meilleur équilibre de ce côté-là). Et puis n'oublions pas la partie sonore tout aussi réussie que la partie graphique, avec l'excellente mise en musique de Yoko Shimomura et les doublages de stars (Haley Joel Osment qui ne voit plus des gens qui sont morts, en tête ^^). Le jeu sortira en version PAL le 26 mai 2006 et espérons que les doublages français seront aussi réussis que pour le premier épisode. Côté durée de vie on a le droit à 30h de jeu si on ne fait rien d'optionnel, ce qui est énorme pour un A-RPG, mais Kingdom Hearts se rapproche bien plus d'un FF dans les mécaniques de jeu, on dira donc que c'est raisonnable.
Un dernier point noir
KH2 souffre également d'un autre défaut. Il y a un surdécoupage entre phases de jeu et de scénario. Si cela confère à l'ensemble un rythme sans faille, un problème fait son apparition. Comme les développeurs ont décidé de ponctuer chaque phase de jeu de phases scénaristiques certes jamais trop longues, il en résulte que l'on est jamais motivé par quelque chose qui a l'air vraiment difficile à réaliser. Je ne sais pas si j'arrive à me faire bien comprendre ici, mais on n'est jamais embarqué dans un donjon long de dizaines de pièces, on ne crie jamais victoire et on n'exulte jamais d'un sentiment de satisfaction quand on arrive enfin au sommet d'un donjon qu'on a mis près d'1h à parcourir. Un rythme aussi parfait imposait un sacrifice et Square-Enix a décidé de concéder à ce sacrifice en livrant un jeu qui se dévore certes en quelques après-midi, mais où l'on n'éructe jamais de joie à la fin d'un donjon. Le donjon final par exemple ne doit pas faire plus de huit écrans toujours ponctués de scénario bien entendu. Par contre, il en résulte une quantité d'ennemis abusive par salle, comme s'ils avaient été obligés de se réunir ici, car il n'y avait pas assez de place ailleurs...
Kingdom Hearts II est un bon jeu, un très bon jeu même. Doté d'un sens de la mise en scène et du spectacle indéniable, le soft dirigé par Nomura possède cependant deux gros défauts : le manque de liens scénaristiques de la partie Disney avec le reste et un scénario qui s'adresse bien trop aux fans. Fans qui seront comblés avec cet épisode qui répond à la totalité de leurs attentes. Le non-initié se retrouvera quant à lui devant un soft sympathique au gameplay agréable bien que bourrin, agréable à suivre et jamais prise de tête.
11/04/2006
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- Un sens du spectacle indéniable
- Personnages et univers Disney reproduits à la perfection
- L'excellente mise en musique de Yoko Shimomura
- Pas mal de défauts corrigés par rapport au premier
- Un rythme sans faille
- Une montée en puissance à la fin
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- Le manque quasi-total de liens scénaristiques entre la partie Disney et le reste
- Un jeu conçu pour les fans
- Toujours injouable pour un Disneyphobe
- Les donjons bien trop courts
- Reaction Command trop scriptée
- Bourrin
- Pourquoi avoir conservé les phases de shoot?
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TECHNIQUE 4.5/5
BANDE SON 4.5/5
SCENARIO 4/5
DUREE DE VIE 3.5/5
GAMEPLAY 3.5/5
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