Ring of Red est sorti peu de temps après le lancement officiel de la PlayStation 2. Si cette sortie, assez rapide, pouvait nous faire craindre pour l’intérêt du jeu, tel n’est pas le cas. Ring of Red est un jeu original qui propose un gameplay atypique et très intéressant. C’est un habile mélange de RPG tactique en tour par tour avec des phases de combats en temps réel. Un gameplay accrocheur suffit-il à le rendre intéressant à faire ou refaire de nos jours ? C’est ce que nous allons voir maintenant.
Un japon divisé au bord de l'explosion
Nous sommes en 1946, la seconde guerre mondiale fait rage et l'Allemagne a capitulé. Les puissances alliées (États-Unis, Royaume-Uni et URSS) organisent la conférence de Potsdam* afin de décider du sort du vaincu mais aussi pour adresser un ultimatum au Japon. Celui-ci le rejette et appelle à la résistance absolue tout en s’enfonçant inévitablement un peu plus dans la grande guerre d'Asie. Alors que l’essentielle des troupes japonaises livrent des batailles acharnées contre les États-Unis dans le sud du pays, les Soviétiques mettent en place l’invasion par le Nord de l'archipel via l'île de Hokkaido. Devant lutter dorénavant sur deux fronts, le Japon se retrouve rapidement à genoux et doit se résigner à signer sa reddition. Le Japon ayant rendu les armes, les alliés décidèrent de son destin et lui réservent un bien sombre avenir. Le pays fut ainsi divisé, l'île d'Hokkaido devient une terre soviétique et le reste fut séparé en deux. Au nord, la République du Japon sous influence communiste. Au sud, la Démocratie du Japon sous influence américaine. Une telle situation engendra très vite de vives tensions.
En 1950, dans un élan d'unification exacerbé par des tensions économiques, le pays plongea dans une guerre fratricide. Après quatre années d’hostilités et de massacres, un accord de paix fut signé mais qui ne solutionna pas les problèmes à l’origine du conflit. En effet, les Soviétiques souhaitaient, avant tout, étendre leur influence en faisant fi de la stabilité de la région et d'une quelconque résolution des problèmes.
Le monde uchronique retrofuturiste proposé par Ring of Red a pour base les événements de la seconde guerre mondiale (*la conférence de Potsdam a eu lieu, en réalité, en 1945) et transpose la guerre de Corée (1950-1953) au Japon pour proposer son propre dénouement.
Si le décor scénaristique est assez juste car fortement inspiré de faits historiques, le jeu ajoute un élément capital qui change radicalement l'approche. En effet, cette guerre fait intervenir des mechas appelé AFW (Armored Figthing Walker). Afin de rendre cet univers le plus réaliste possible, la vidéo d'introduction qui s'offre à nous est constituée d'archives en noir et blanc de la seconde guerre mondiale où l'on voit sur le champ de bataille des soldats côtoyer des AFW. Le montage est certes perfectible mais non moins saisissant et nous donne vraiment envie de découvrir cet univers.
Dix ans se sont écoulés, mais les anciennes tensions ne se sont pas dissipées.
Vous incarnez Masami Von Weizegger, l'un des meilleurs étudiants de Fuji (Démocratie du Japon) et vous avez été sélectionné pour tester l'un des trois nouveaux prototypes d'AFW. Alors que les essais s’enchaînent dans des simulations d’affrontement, un incident se produit. Le Type 3 engage avec vous un combat rapproché alors que ce type d'attaque est strictement interdit. Le pilote est sommé de s'expliquer sur le champ. Mais le mutisme de celui-ci ne fait qu'accentuer le malaise. Toujours dans votre AFW, vous entendez via votre radio que le pilote du Type 3 vient d'être retrouvé assassiné dans la base militaire. Ne faisant aucun doute que l'auteur du crime est l'imposteur aux commandes du Type 3, vous engagez une conversation virulente avec lui. À votre grande stupéfaction, il s'agit ni plus ni moins que du « Fantôme cramoisi », un soldat d'élite de la République du Japon. Avant de prendre la fuite avec le prototype d'AFW, il vous annonce que ce sacrifice était nécessaire afin de mettre en place un idéal supérieur. Cet événement sera le déclencheur d’un conflit dont vous êtes encore loin de saisir l'ampleur.
Si le monde imaginé est assez intéressant, bien orchestré tout en étant original, malheureusement le scénario est quant à lui trop léger et des plus classiques. De plus, l'histoire reste très focalisée sur le héros et n’offre pas assez souvent de vision globale du conflit.
Un jeu tactique et stratégique
Si Ring of Red surprend agréablement en proposant une aventure qui se déroule en suivant les notes de guerre du héros, il reste néanmoins très classique et rigide dans le déroulement de celle-ci. En effet, le jeu propose systématiquement le même enchaînement constitué d'une phase dans le quartier général suivi par une phase de combat. Ici aucun choix ou déplacement n'est possible, on se contentera de suivre l'histoire comme elle nous est contée.
Une fois au QG, vous aurez accès à plusieurs menus. Tout d'abord la salle des opérations vous permettra d'accéder au briefing de la prochaine mission. Ceci sera l'occasion de connaître vos objectifs mais aussi d'en savoir plus sur les forces ennemies en présences. Ces réunions permettront souvent aux différents protagonistes d'intervenir mais aussi d'avoir des nouvelles de la situation politique du japon. Tous ces moments donneront un peu plus de profondeur et de consistance à l'histoire. Une fois la mission révélée, vous pourrez gérer votre formation via le menu dédié. Celui ci vous permettra de visualiser les compétences de vos escouades ainsi que de les affecter à vos AFW. Si certaines complémentarités seront évidentes, le nombre d'escouades étant limité à trois par mecha, un choix parfois cornélien devra être fait. Votre décision sera d'autant plus importante car n'étant pas exclusive aux compétences. En effet, chaque escouade améliorera différemment les caractéristiques de votre AFW (attaque, vitesse de déplacement, temps de rechargement…). Ring of Red permet d’associer comme bon vous semble tout ce petit monde afin de vous permettre de développer votre propre stratégie en fonction de vos envies mais aussi des situations particulières. Cette partie de gestion est d'autant plus agréable qu'elle est rapide à assimiler et à mettre en œuvre.
Ensuite, le menu information vous sera fort utile pour visualiser les habilités de chacun de vos pilotes, escouades ainsi que les caractéristiques de vos mechas. Il offrira aussi une description de chaque compétence, type d'AFW… Cela sera une aide inestimable pour quiconque voudra peaufiner sa stratégie. Enfin, les menus sauvegarde et fin seront là pour enregistrer votre partie et pour lancer la prochaine bataille.
Entre chaque combat, un interlude présentant les événements marquants viendra ponctuer l'aventure. Si la forme choisie est essentiellement textuelle, il y a aussi régulièrement des vidéos d'archives plutôt agréables. Malheureusement cette surabondance de texte ne permet pas une immersion aussi bonne que nous aurions pu l'espérer.
Entrez dans le feu de l'action
Le champ de bataille est représenté par le célébrissime damier. À son tour, un AFW pourra se déplacer puis choisir une action parmi l'attaque, l'attente ou les réparations. Chacune de ces actions aura un impact direct sur la durée de votre manœuvre. En effet, mettre un AFW en faction met fin à son tour mais vous permet de pouvoir le ré-utiliser assez rapidement alors que la réparation vous permet de remettre en état des parties endommagées de votre mecha mais sera chronophage. Du côté de l'attaque, une fois sélectionnée, un écran récapitulatif des forces en présence, des conditions climatiques mais aussi des bonus et malus liés au terrain, s'affichera. Avant de lancer l’assaut, vous devez choisir parmi vos 3 équipes, laquelle sera embarquée sur la plate-forme du mecha et celles restant au sol. Ce choix se révèle assez important car chaque escouade peut posséder jusqu’à 3 compétences. Ces aptitudes sont liées à un emplacement sur le champ de bataille (plate-forme de l'AFW, au sol devant, au sol derrière). Les compétences offensives peuvent viser soit le mecha ennemi (lance missile…) soit ses infanteries (tirs de sniper, gaz asphyxiant…). Les compétences défensives seront aussi de mise (nuage de fumé, soin…). Ces capacités nécessiteront toujours un temps de chargement avant de pouvoir être utilisées. Une fois l’équipage sélectionné, vous vous retrouvez en plein cœur de l'action, propulsé aux commandes de votre AFW. Ring of Red propose en effet des combats en temps réel, où vos décisions auront une réelle influence sur l'issue du combat. Cette partie est vraiment excellente et représente l’intérêt majeur du jeu.
Pendant une durée de 90 secondes appelée "capacité opérationnelle", vous aurez la possibilité de tirer et déplacer votre AFW ou vos troupes au sol. Si d’un côté, tout mouvement ralentira le chargement de vos munitions, d'un autre côté, la distance jouera un rôle primordial dans le déroulement du combat. En effet, il existe 4 types d'AFW et chacun d'eux a sa distance de prédilection. Ce paramètre influencera grandement sur la précision du tir mais aussi et surtout sur les dégâts infligés. La distance sur l'échiquier, lors du déclenchement de l’attaque, déterminera la distance en début de combat. C'est donc un élément qu'il ne faudra pas prendre à la légère pour éviter toutes déconvenues. Une fois les munitions chargées, vous pourrez commander vos troupes au sol pour les faire se déplacer à l'avant et ainsi leur permettre d'ouvrir le feu mais les exposera aux représailles ennemis. Vous aurez aussi la possibilité de les faire reculer à l'arrière du mecha afin de les protéger contre les attaques directes et leur permettre de recharger leur compétence. Hormis les déplacements, les unités au sol seront autonomes. Attention, un mecha qui a perdu ses escouades sera à la merci de son ennemi et les seules possibilités de soigner ses troupes seront d’utiliser des compétences de soin ou de récupérer dans un village. À propos du pilote, c’est à vous que reviendra la décision de déclencher le tir en fonction du pourcentage de réussite ou alors d’utiliser l’une de vos capacités spéciales. Plus vous attendrez, plus le pourcentage augmentera mais vous exposera à la riposte ennemis. Vous aurez toujours le choix de vos cibles entre l’AFW ou ses escouades. Du coté des compétences, elles sont assez puissantes mais limitées en nombre et spécifique à chaque pilote. Lors de l’activation de l’une d’elles, vous aurez le droit à un artwork, simple mais efficace, représentant le pilote dans son cockpit.
Il est à noter que certain AFW taillé pour le combat rapproché auront la possibilité de déclencher des attaques de corps à corps assez destructrices et qui arrêteront immédiatement le tour, vous évitant ainsi toute riposte ennemi.
Des graphismes un peu fades
Les graphismes de Ring of Red sont clairement le point faible du jeu. Du côté des combats, les cartes proposent une 2D simpliste ou les éléments de décors sont trop peu variés. On a clairement l'impression de voir toujours les même arbres, routes, villages… Et ce n'est pas les éléments comme de la neige ou de la pluie qui suffisent à changer la donne. Certes, cela agrémentera un peu les cartes mais ne les renouvellera pas pour autant. Du côté de la 3D, cela reste malheureusement assez sommaire. La moindre séquence de zoom sur une escouade ou un AFW révélera un manque chronique de détails et une modélisation grossière. Heureusement pour nous, la variété des paysages et des décors compensent un peu. On notera aussi que chaque classe de personnage aura son propre artwork mais aussi sa propre modélisation 3D. Malheureusement cela s'arrête là. En effet, chaque soldat d'une même classe sera identique. Même constat du côté des AFW, si les différents types de mecha sont assez représentatifs de leur type, les AFW ennemis rencontrés tout au long de l'aventure seront peu variés. Finalement, même si les graphismes sont décevants, cela reste jouable de nos jours. On pardonnera aussi plus facilement cette médiocrité car Ring of Red fait partie des RPG sortis rapidement après le lancement de la PS2.
Du côté de l'interface, on regrettera que celle-ci n’est ni originale ni esthétique, mais a le mérite d'être concise.
Des combats longs, très longs...
Si les combats en début d'aventure dureront plusieurs dizaines de minutes. Au fur et à mesure que votre groupe va s'étoffer avec l'arrivée de nouveaux pilotes et leur AFW respectif, les confrontations vont rapidement prendre de l'ampleur et finir par durer plusieurs heures. Heureusement, le jeu vous permet de sauvegarder durant le combat mais cela va interrompre celui-ci et vous rediriger vers l'écran titre. Il faudra faire attention car cette sauvegarde sera automatiquement effacée une fois le fichier chargé. Ce système est identique aux Fire Emblem, mais si ce dernier ajoute une grande difficulté où les erreurs ne sont pas permises, résultant en une tension constante, Ring of Red reste un jeu accessible où la perte d'un AFW n'est pas une fatalité car celui-ci sera de retour pour les combats suivants. Seuls les escouades qui l’accompagnaient seront perdues, or, vous aurez régulièrement de nouvelles escouades comme récompenses de vos victoires voire la possibilité d’en recruter dans les villages durant les combats. Ce système est donc peu contraignant vis-à-vis de la difficulté mais permet d'améliorer le réalisme du jeu en empêchant le joueur de tenter des stratégies parfois risquées et de recharger la sauvegarde si son plan a pris une mauvaise tournure.
Une ambiance excellente portée par les combats temps réel
L'ambiance développée tout au long de l'aventure participe énormément au plaisir de jouer. Les phases de combats temps réel sont saisissantes et des plus réalistes. En plus des conditions climatiques, nous avons aussi le droit à des combats aussi bien diurnes que nocturnes. Ensuite, l'ensemble des troupes au sol mais aussi l’AFW ennemi bougeront pendant vos propres déplacements mais aussi pendant la mise au point de votre tir. Séquence qui accentura d'autant plus le stress que vous verrez aisément le mecha ennemi en train de vous viser. Vous serez donc confronté au cruel dilemme suivant, précipiter votre tir afin de le déstabiliser pendant sa mise au point mais prendre le risque de le rater ou attendre au maximum pour assurer un coup au but mais en prenant le risque de vous faire toucher.
Les bruitages lors des combats sont tous simplement parfaits. Entre les battements de cœur lors de la visé, les bruits des moteurs et de la mécanique en marche, les explosions toutes autour de vous, on se sent parfois bien à l'étroit dans notre cockpit d'AFW. On notera aussi le bruit de pas des hommes, celui de la respiration difficile dans les masques à gaz, les balles qui sifflent et l'angoisse est à son paroxysme. Tous ces bruitages ont été ajoutés de manière intelligente et l'ensemble donne un résultat vraiment excellent et immersif.
Du côté des musiques, le résultat est à l'opposé. En effet, si celles-ci sont présentes, on ne les entend pas vraiment. Pas qu'elles soient inaudibles mais trop peu diversifiées, originales ou audacieuses pour que l'on y prête attention. Une fois le jeu coupé, il nous est bien difficile de se souvenir de la moindre composition.
Un mot sur la traduction française
Elle comporte des fautes et n'est pas très soutenue mais elle a le mérite d'exister.
Ring of Red possède des graphismes trop basiques, une bande sonore sans prétention, mais l’intérêt du jeu est ailleurs. Le système de combat est bien pensé et l’ajout de séquences de jeu en temps réel est très original et efficace. Le tout dans un monde rétrofuturiste mélangeant différents conflits politiques. On obtient un très bon jeu tactique avec une ambiance toute singulière et des plus immersives.
30/11/2019
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- Un gameplay original et immersif
- Des missions variées
- Des bruitages excellents
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- Des combats trop longs
- Des graphismes médiocres
- Une bande son très moyenne
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TECHNIQUE 2/5
BANDE SON 3/5
SCENARIO 3/5
DUREE DE VIE 4/5
GAMEPLAY 4.5/5
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