Le Héros Sans Nom, avatar des deux précédents Gothic, parcourt les mers à bord d'un noble navire qui fait voile en direction de Myrtana, et si ce voyage semble paisible, le débarquement le sera beaucoup moins. À peine posé le pied à terre que nous devons libérer le village d'Ardea en proie à un occupant orc. Cette race semble avoir réussi, avec l'aide du mage humain Xardas, mentor de notre avatar, à asservir tout Myrtana, ancien royaume du roi Rhobar. Toutes les villes et cités sont désormais asservies, les badauds et les débauchés étant réduits en esclavage. Du reste, les humains de Myrtana se sont divisés : certains - les rebelles - résistent dans l'espoir de sauver la capitale, Vengard, entourée d'une barrière magique par le roi et ses mages dans le but de s'isoler de l'envahisseur. D'autres plus couards, ou plus lucides, se sont alliés aux orcs, formant la faction des mercenaires. Ayant pour but de se faire bien voir des hauts responsables orcs, ils effectuent des tâches plus ou moins valorisantes pour de l'or et mènent ainsi une vie confortable.
Le mystère de cette invasion semble très vite converger vers les agissements étranges de Xardas et également l'engagement des Orcs dans des fouilles archéologiques aux quatre coins du monde, de Myrtana jusqu'au désert de Varant.

Gothic III est un RPG occidental ouvert, dans la veine de la série des Elder Scrolls, et comme poseraient en vérité générale les messieurs de chez Square Enix : dans ces conditions, il n'est pas facile de raconter une histoire.
Ils n'ont pas tord sur ce point, l'histoire de Gothic III ne tire pas son intérêt de sa complexité, ou de multiples rebondissements appuyés par des cinématiques grandiloquentes. Elle plonge le joueur dans une sorte de réalité, une ignorance logique lors de l'arrivée sur une terre non familière, dévastée par des évènements inexpliqués. C'est donc lentement, par le biais de contacts avec les factions de Myrtana, que l'on découvrira petit à petit les ficelles de cette guerre : des motivations étranges des Orcs, aux actes de trahison de Xardas. C'est un véritable périple, une immersion totale dans la peau du Héros sans Nom, une identification à sa quête de connaissance et de vérité. Candide ignorant et démuni dans un monde hostile, le Héros sans Nom devra pourtant s'en faire un, qu'il soit source de haine ou d'admiration, car des choix de celui que les druides nomment "le décideur" dépendra l'avenir de ce monde en perdition.

Dépourvu de Manichéisme, Gothic III fera la part belle aux choix du joueur. S'allier aux orcs ou aux rebelles, aux Hashishins, guerriers du déserts à l'apparente neutralité ou aux nomades dont la réputation de pillards leur vaut une exclusion des cités de Varant doit venir d'un choix personnel. Ces alliances ne sont pas rigides car il est également possible, comme dans tout dilemme géopolitique, de retourner sa veste brutalement, mais nous en reparlerons plus tard.
Gothic III fait même plus et s'écartera quelque peu de certains principes de la Fantasy. Malgré leur masse musculaire et leur technique de combat, les orcs ne sont pas que des brutes sanguinaires mais se posent plutôt en vieux vétérans sages. Fumant le calumet, assis, en contemplant la nature ; recherchant calme et quiétude, ils se démarquent également par un design un peu différent de ce qu'on a l'habitude de voir et possèdent au final un certain charisme. Cela contraste avec les modèles humains tout juste corrects et sombrant dans la facilité, affublés d'un design d'un mauvais goût assez prononcé.

Le point fort des RPG ouverts et donc de Gothic III c'est l'univers, véritable réalité parallèle à disposition du joueur où tout acte est possible, où la connaissance du passé du monde est aussi importante que sa maîtrise sur le présent, où le jeu doit être mené par un joueur immergé. Addictif, passionnant, envoutant, le monde de Gothic III n'est que réussite, et ce, à tous les niveaux.

Lâché dans un univers dont on ignore tout, on doit très vite commencer à prendre nos marques dans le monde. Et cela passe par le contact avec les différentes factions. Le plus souvent, chaque place-forte proposera des "sous-quêtes" très classiques qui permettent de gagner expérience, argent et plus important encore, réputation dans la cité. Lorsque l'on sera suffisamment connu pour les actes menés dans la ville, on pourra rencontrer les hauts responsables de la cité ou accéder à des lieux qui nous étaient jusqu'alors interdits. On aura alors à disposition de nouvelles informations sur les évènements et de nouvelles quêtes pour augmenter sa renommée auprès de la faction en elle même.
Il est à savoir que la plupart du temps, à quelques lieues d'une ville orc, par exemple, se trouvera un camp composé de rebelles cachés et embusqués, en préparation pour une attaque. Et, la plupart des quêtes auront une double facette. Par exemple, un chef de camp d'esclaves orcs pourra vous demander de lui ramener des esclaves évadés. Il ne tiendra alors qu'à vous de les lui rapporter ou tout simplement de les aider à rejoindre le camp rebelle le plus proche.

Sur ce point, Gothic III n'a rien de rigide, vous pouvez jouer la carte d'une faction à fond et aller dans son sens à chaque occasion, ou manger à tous les râteliers. De toutes les manières, pour réussir vos quêtes dans Gothic III, il faudra ruser. Si le commandant rebelle vous demande d'attaquer le chef de la ville Orc pour donner le signal d'attaque à ses troupes, on pourra soit passer sur le corps de tous ses gardes, soit se faire apprécier des orcs pour pouvoir approcher ce haut dignitaire sans avoir à se tailler un chemin à coups d'épée. Et ce, même si cette bonne réputation doit passer par l'élimination discrète de quelques rebelles. Vous pourrez tout autant vous faire apprécier des rebelles en premier lieu, puis décider d'aider les orcs en retournant votre veste.
Cependant, toutes les quêtes n'offrent pas ces possibilités, car on retrouve des missions classiques de chasse, de récolte ou d'escorte qui n'amènent à aucun choix. Elles restent tout de même importantes en raison de l'expérience, l'argent, et la réputation récupérables.

Le système de quêtes de Gothic III oblige le joueur à prendre des décisions en permanence, à mettre à l'épreuve son sens de la morale. Tout cela dans le but d'accéder aux informations les plus importantes sur le conflit, comme l'endroit où demeure Xardas, pour progresser dans la quête principale.

Le Héros Sans Nom progressera de façon très classique : avec de l'expérience gagnée en tuant des monstres et en réalisant des quêtes et des points d'apprentissages obtenus à chaque niveau monté. Via des entraineurs, vous pourrez augmenter les caractéristiques principales (Force, Chasse, Savoir des Anciens, Alchimie, Vol, Forge) à l'aide de ces points et d'un peu d'or. À un certain niveau de ces caractéristiques, les entraineurs vous proposeront de véritables compétences, telle que la parade de coups puissants au bouclier, la capacité de porter deux armes, ou encore de nouveaux sorts. Il sera également possible de monter votre valeur d'endurance (équivalente à la fatigue dans les Elder Scrolls, consommée en cas de sprint à chaque attaque portée ; une jauge vide entrainant alors une incapacité à courir et une baisse drastique de la vitesse d'attaque) et votre valeur de Mana.

En combat, différents coups seront disponibles selon l'arme que vous portez. Chaque coup a un effet différent (comme faire tomber l'ennemi ou l'étourdir un instant), et il faudra tirer partie de ces caractéristiques lors de vos combat et bien utiliser la parade. À l'arc, le jeu fait apparaitre un viseur, cependant les tirs prendront en compte la balistique et ce type de combat demandera une bonne estimation des distances, notamment pour tirer en mouvement. Il se révèlera cependant salvateur lorsque poussé à haut niveau. La magie, elle, est malheureusement moins efficace que d'autres types de combat, et demandera un timing très strict. Au delà de la classique boule de feu qui s'utilise très facilement, d'autres sorts auront un temps d'incantation très important et demanderont donc de se tenir à l'écart des ennemis le temps de lancer la magie. Les combats de Gothic III possèdent cependant un point faible, surtout remarquable au corps à corps, c'est le système de visée. Lorsque l'on se trouve proche d'un monstre, son nom apparait à l'écran, cela signifie qu'il est ciblé. Si d'aventure, on effectuait une attaque, elle serait dirigé vers ce personnage. Le gros problème est que le ciblage a tendance à changer lorsque trop d'ennemis sont présents. Cela pourra être la cause de quelques Game Over absolument rageants.

Le gameplay est également enrichi de moultes possibilités comme la métamorphose en animal pour se fondre dans le bestiaire varié et très réussi au niveau du design, la possibilité de chasser (pour la peau, les griffes et les crocs et surtout la viande à faire griller pour se soigner), l'alchimie, la cuisine, la forge et le minage, j'en passe et des meilleures. Il est également possible de voler à la tire, d'attaquer n'importe quel PNJ, de voler les châteaux et les maisons. Le tout est de ne pas se faire prendre. Si c'est le cas et que vous vous faites frapper, courrez, ne répliquez pas sous peine de vous mettre tout une ville à dos et faites vous oublier pour quelques temps. Tous ces éléments font de Gothic III une véritable expérience de Roleplay, un jeu extrêmement riche et immersif, devenant par là même, très addictif.

Les interfaces sont claires précises et ergonomiques. Il est à signaler que lors de l'ouverture de l'inventaire durant les combats, le jeu passera en semi-pause, les ennemis pouvant avancer mais pas vous frapper.

Cependant, le jeu est exigeant, et les combats, s'ils semblent très orientés "matraquage de souris" au premier abord, sont en fait très techniques et surtout très difficiles notamment contre les bêtes sauvages. Les loups ont d'ailleurs une fâcheuse tendance à envoyer un combo d'une dizaine de morsures au rythme de deux morsures par seconde, ne laissant place ni à la réaction, ni à la parade, pouvant même envoyer ainsi au tapis un maître-bretteur aguerri. Il sera alors question de timing, de bien se positionner par rapport au terrain (sur une pente on préfèrera être en aval de son adversaire qu'en amont, au corps à corps), de bien utiliser tous ses atouts pour s'en sortir et ce pendant tout le jeu. En effet, les moments épiques, comme les libérations de villes effectuées tout seul contre une cinquantaine d'orcs, sont légions mais très exigeants, la touche F5 de sauvegarde rapide étant à solliciter le plus souvent possible.

Que dire à propos de la bande-son de Gothic III ? Que les doublages français, vivants et parfois caricaturaux collent très bien à l'univers et à la tête pittoresque de certains personnages ? Et que les voix rendent justice à l'écriture très soignée des dialogues ? Oui, clairement, et cela contrastera avec leur mise en scène absolument affreuse aux animations oubliables.

Mais que dire des musiques qui nous accompagnent tout au long du jeu ? Elles sont magnifiques. Des airs de violons qui partent en envolées lyriques lors de l'exploration des contrées paisibles de Myrtana, aux mélodies à la guitare sèche, discrètes et planantes, parfois accompagnées d'une flûte de Pan qui anime les nuits; des sonorités orientales accompagnées de chœurs du désert de Varant, aux souffles de cornes de brume, accompagnés de grincements de violons plus rudes en Nordmar. Tout est sublime, tout est à propos, tout accompagne le jeu avec une perfection inégalée dans un RPG occidental.
"Recherche musciale" érigée en maître-mot, Rosenkranz frappe d'une puissance à envoyer n'importe quel amateur du genre à mordre la poussière de fascination...

Des vallons verdoyants aux sombres forêts, des montagnes escarpées aux dunes orangées, des rivières paisibles aux chutes d'eau majestueuses, Gothic III propose des décors qui émerveillent. Sur ce plan là, on ne peut s'empêcher de le comparer au désormais très connu Oblivion, qui propose des graphismes ayant la même ambition. Cependant, force est de constater que Gothic III réussit bien mieux sur ce plan là. Les textures sont fines, fouillées (les sols forestiers sont superbes) et variées, les reliefs sont bien mieux pensés et ne se contentent pas d'une simple pente parsemée de rochers. La végétation est également éblouissante, diverse, et superbement animée par le vent. De plus, Gothic III propose trois types de décor, le désert, le grand nord et un paysage au climat plus océanique: cela permet de rompre la monotonie qui s'installait dans Oblivion.
Mais là où Gothic III fait très fort c'est dans certains aspects du level-design : les montagnes du Nordmar seront de véritables labyrinthes et il sera réellement difficile de se repérer, et le plus souvent, le chemin que vous devrez emprunter sera un immense détour par rapport au "vol d'oiseau" ce qui apportera un sentiment de réalisme et d'immersion assez poignant. De plus tout le jeu est géré uniquement en Streaming, c'est à dire sans aucun temps de chargement entre les zones. Un bon point pour l'immersion mais qui nous oblige a payer un lourd tribut.

Gothic III semble, sur ce point, perpétuer la tradition de ce type de RPG ouverts, là ou Oblivion s'en était plus ou moins débarrassé : les bugs. Car c'est le cas, ce titre est fini avec les pieds : il est difficile de concevoir une telle catastrophe. Débordant de bugs en tous genres, et surtout de ralentissements, freezes et crashes insupportables, Gothic III ne se jouera pas SANS patch. Heureusement, récemment, un patch communautaire de 900 Mo a été officialisé par Jowood et règle tous les bugs, tous les crashes et améliore légèrement l'optimisation. De quoi avoir une expérience de jeu agréable sur le plan technique même s'il faudra accepter des ralentissements et chutes de framerate régulières.

Au final, Gothic III surpasse Oblivion, son "concurrent" direct, même si le soft de Piranha Bytes est beaucoup plus exigeant, et moins guidé (pas de marqueur de quête, indications parfois floues) mais au final beaucoup plus libre. Il perdra cependant une grande partie de son public à cause de la difficulté, et de son optimisation désastreuse qui suivront le joueur pendant une soixantaine d'heure au moins.

Note: Ce test a été réalisé avec les derniers patchs (version recommandée : community patch v1.7.3). À noter également, que ce patch propose une option "alternative balancing" changeant certains points du gameplay en profondeur pour offrir une expérience plus équilibrée. Je n'ai moi même pas utilisé cet AB pour parler du gameplay du titre original.

Volke13 07/03/2010

Le Background Immersif Addictif Gameplay complet bourré de subtilités Liberté totale Les musiques C'est vraiment très beau Trame simple et efficace

Optimisation désastreuse Exigeant et difficile, parfois trop Design des humains affreux Visée pour le corps à corps un peu à la rue Les bêtes sauvages bien plus dangereuses que les humanoïdes armés jusqu'aux dents

TECHNIQUE 3.5/5 BANDE SON 5/5 SCENARIO 4/5 DUREE DE VIE 4.5/5 GAMEPLAY 4.5/5