Genmu no Tou no Tsurugi no Okite (que l’on appellera Genmu tout court pour plus de commodité, et qui se traduit par The Tower of Illusion and the Law of the Sword) n’est autre qu’un nouveau Dungeon RPG en vue subjective sur Nintendo DS, qui a pour ambition de faire rejaillir chez les joueurs la nostalgie d’un bon vieux RPG PC tel que Wizardry ou Ultima. Pour se faire, les développeurs de chez Success ont eu l’ingénieuse idée de proposer le jeu en deux modes distincts une fois le prologue passé: une première version digne de la DS (ou presque) avec des décors surréalistes et un design de qualité, et une autre vision d’apparence vieillotte qui affiche une 3D en fil de fer et en noir et blanc typé Wizardry premier du nom et qui ne nous rajeunit pas. Genmu exhibe donc très clairement sa position: ça sera du RPG de
1984 ou ça ne sera pas. (Retrouvez ce test dans Gameplay RPG 15)
Genmu ou le concept de Meta-Gaming
Genmu se montre dès les premières minutes de jeu plutôt archaïque: il s’agit d’un Dungeon RPG en vue subjective avec des mécanismes de jeu grossiers et des décors non-figuratifs, afin de rappeler aux joueurs les vieux RPG PC textuels. L’histoire est vraiment bateau, et n’est une fois n’est pas coutume, qu’un simple prétexte pour partir à l’aventure: un beau jour un brouillard immense tombe sur le monde et un château ennemi apparaît à la surface de l’horizon... Pourtant, le jeu possède quand même sa propre mythologie et explique à sa façon la création du monde. Une bonne façon d’entrer dans un univers.
On se créé une équipe de guerriers en alignant 4 combattants aux jobs et aux skills personnalisés. On pourra choisir de créer un Humain, un Elf, un Nain ou un Métis à qui seront attribués des points de compétences (en force, intelligence, vitalité, dextérité et chance) qui détermineront le job du personnage: il pourra être attaquant, voleur, magicien ou encore prêtre. Mais c’est une fois le tutorial passé que Genmu montre son vrai visage et offre aux joueurs le choix entre 2 visions du jeu: on pourra jouer dans une version Nintendo 8 bits ou bien profiter d’un mode arrange. On pourrait même, à priori, penser qu’il s’agit d’un remake d’un vieux RPG et que Success nous propose dans sa bonté habituelle la version de 1984 et le remake d’aujourd’hui. Pourtant non, il s’agit bel et bien d’un jeu tout neuf, qui pousse à une réflexion particulière. Success a développé ce jeu à partir d’une idée simple mais attirante: le monde de Genmu n’existe pas, alors il n’est pas nécessaire d’en faire un substitut d’univers pseudo réaliste. Les développeurs peuvent après tout utiliser n’importe quel charte graphique, n’importe quels mécanismes de jeu. Alors pourquoi ne pas adopter un style simple mais surréaliste afin de susciter l’imagination du joueur et ainsi faire écho au genre du RPG textuel ou filaire tel qu’il existait en 1984 ? Genmu est, pour le coup, un Meta-Game : Au même titre qu’un
Mother 2 ou un
Moon Remix RPG Adventure, Genmu est un jeu à propos d’un jeu qui n’oublie jamais que derrière la console il y a le joueur. Dans Genmu, le joueur un peu âgé pourra choisir de pratiquer l’aventure dans le mode 8 bits laid alors que l’ado profitera d’un graphisme plus moderne.
Quelques bonnes idées malgré un déroulement académique
Malgré tout, Genmu se présente dans les deux modes comme un pur Dungeon RPG. Le déroulement du jeu est typique du genre et les amateurs d’
Etrian Odyssey ne seront pas perdus : il y a une ville dans laquelle on préparera son équipe, fera ses emplettes ou acceptera diverses quêtes, et un unique donjon de 7 longs étages infestés de monstres aléatoires, de pièges et de portes invisibles. Une carte en 2D est évidemment disponible et celle-ci se dessinera automatiquement au fur et à mesure de vos découvertes. Lors de la création de vos personnages, chaque race sélectionnée se verra attribuer un alignement (Order, Neutral ou Chaos, comme dans un Megami Tensei) qui influencera la partie: impossible de posséder dans son équipe un membre Order et un membre Chaos en même temps, il faudra obligatoirement faire des choix drastiques. Pourtant, si les mécanismes de jeu sont classiques, le système de gain d’expérience et de level up se révèle assez atypique, lui: si l’on gagne bel et bien des points d’expérience après chaque combat, il sera nécessaire de faire un détour à la guilde pour améliorer ses capacités ou ses skills. Après avoir glané quelques levels, on devra s’imposer des restrictions afin de continuer à gagner des points à chaque combat. Lorsque l’on atteint le level 6, il sera par exemple faisable de se donner comme restriction l’impossibilité de pouvoir manger des fruits ou de viande pour se régénérer. Au level 12 on pourra choisir de ne pas utiliser d’objets durant les combats, ou de ne pas pouvoir changer ses équipements dans le donjon, et ainsi de suite. Cette obligation restrictive apporte un challenge unique et permet de renouveler une aventure à la base un poil répétitive. Le jeu sera donc différent d’un joueur à l’autre et d’une partie à l’autre. Alors que votre grand frère jouera dans le mode Nintendo 8 bits en 3D fil de fer et profitera d’une fluidité accrue, vous apprécierez les graphismes modernes du mode arrange et vous utiliserez les restrictions les plus faciles à vivre. Dans Genmu la différence est plus que jamais accentuée suivant votre style de jeu.
Le jeu est difficile, et s’il semble qu’explorer seulement 7 étages c’est un peu cheap, on est vite rassuré par la taille de ceux-ci et le grand travail d’exploration demandé. Du reste, les nombreuses quêtes annexes proposées apportent de la variété (comme dans
Etrian Odyssey) et le principe de restriction est formellement excellent. Ajoutons à cela un étage secret ainsi que des quêtes bonus accessibles uniquement une fois le jeu fini, et on en aura pour son argent. Le fait que chaque joueur vivra l’aventure différemment grâce aux deux modes distincts et aux restrictions choisies est évidemment l’argument principal pour une durée de vie sans cesse renouvelée.
Une technique bien pensée
Genmu se distingue grâce à ses deux styles de jeu, surtout parce-que chaque mode a bénéficié d’un soin tout particulier. Le mode 8 bits est un clone parfait des RPG PC de l’époque 80s, et s’il ne paie pas de mine à première vue, il est en vérité un parfait compromis au mode Arrange. Ce mode old-school est en effet plus fluide et les perspectives sont moins trompeuses. Mais si les décors en fil de fer et les 8 couleurs maximums vous dérangent un peu, le mode Arrange saura combler vos attentes. Adoptant une allure de jeu Flash, chaque étage propose un décor surréaliste où la couleur est mise en avant. Dans ce mode de jeu, les déplacements sont un peu moins rapides, mais la qualité du design général est exceptionnelle. Les monstres sont très bien dessinés, impressionnants à plus d’un titre, et même s’ils restent statiques en combats, de très beaux effets visuels assez manga viendront faire briller tout ça. Les deux modes proposent donc leurs qualités et leurs défauts récurrents, les mêmes différences que l’on a nous même relevé au cours des années entre les premiers RPG qui allaient droit au but et les soft modernes qui nous maternent un peu trop.
Kenichi Arakawa (dont Genmu est quasiment le premier travail) a fait du bon boulot: la bande-son est là encore découpée en deux versions: le mode 8 bits contient des musiques sautillantes et des mélodies simples afin de contourner la limitation technique, alors que le mode arrange propose des musiques variées et de qualités. Les thèmes de combats sont particulièrement dynamiques et la qualité sonore est plutôt au rendez-vous (on a même des chœurs féminins sur certains titres !). Kenichi Arakawa, voilà un nom à retenir.
TAKAGISM
Toshimitsu Takagi, alias Takagism, est un créateur d’animations et de jeux Flash. On lui doit entre autre son fameux « Escape Game »: Crimson Room, édité sur DS par Success dans la gamme SuperLite2500, mais aussi QP-Shot. L’homme est lié à Success ; il a aidé au développement de Genmu et en a créé une version Flash, disponible à l’adresse suivante :
http://www.success-corp.co.jp/software/ds/genmunotou/taiken.html. Le style graphique si particulier de Takagi s’exprime avec élégance sur la version finale de Genmu, qui adopte une charte graphique typée jeux Flash. L’homme est né à Hokkaido en 1965 et sort diplômé d’histoire des arts occidentaux. Dès 1993 il découvre le multimédia et créé de nombreuses animations. Son site officiel est rempli de ses petites animations et ses minis-jeux. A ne pas manquer sur :
http://www.takagism.net/.
Inaccessible
Malheureusement il faudra attendre une hypothétique sortie US (voire même Euro) pour véritablement profiter de Genmu, le jeu n’étant pas accessible pour un sou. En effet Genmu est assommé par des menus fort nombreux et des kanji complexes. De plus, la difficulté est bel et bien présente et les grandes libertés offertes au joueur sont difficiles à cerner. Toutefois on pourra sûrement compter sur Atlus USA pour éditer ce titre en Amérique dans un futur proche, Atlus USA édite régulièrement les RPG Success (Izuna, Drone Tactics, Operation Darkness ou encore Rondo of Swords, tous sont parvenus aux USA grâce à Atlus) et il s’agit là tout à fait du genre de jeu qu’apprécie l’éditeur. Car au même titre qu’Etrian Odyssey ou Baroque, Genmu no Tou no Tsurugi no Okite mélange progression archaïque et idées atypiques. Espérons qu’Atlus Usa nous entende !
Genmu est un jeu particulier. Son attachement au genre du Dungeon RPG en fait d’apparence un clone d’Etrian Odyssey mais Genmu possède ses propres particularités. Le système d’évolution et de restriction est unique et bien pensé, et le cachet esthétique est prometteur. Pourtant répétitif, Genmu fait montre d’une grande inventivité grâce à ses deux modes graphiques, et chaque joueur vivra l’aventure à sa manière. Genmu est quand même limité en terme de gameplay pur, et inaccessible au tout venant. Attendons une sortie US pour vraiment profiter de ce soft qui mérite largement le coup d’œil.
08/09/2008
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- Les 2 modes de jeu proposent leurs propres caractéristiques
- Le système de restriction est vraiment bienvenu
- Les musiques sont dynamiques quel que soit le mode choisi
- Le jeu a un charme particulier, et nous fait rejaillir de vieux souvenirs
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- Genmu est relativement inaccessible pour les non japonisants
- Assez répétitif
- Le gameplay est efficace mais manque de profondeur
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TECHNIQUE 4/5
BANDE SON 4/5
SCENARIO 0.5/5
DUREE DE VIE 4/5
GAMEPLAY 3.5/5
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