En réunissant des personnalités de qualité,
Kazuya Niinou (Game Designer d'
Etrian Odyssey) se permet un petit tour de passe-passe et profite de l'expérience menée sur
Etrian Odyssey pour offrir à nouveau à la Nintendo DS un pur RPG old school, à première vue répétitif et pourtant gravement efficace. Entouré par
Rieko Kodama, l'esprit derrière les premiers
Phantasy Star et
Skies of Arcadia, et d'un character designer appelé
Mota, illustrateur au style très proche de
Yuuji Himukai (toujours
Etrian Odyssey),
Kazuya Niinou nous ressort toute sa science du RPG sans concession mais drôlement bien ficelé. On peut dire que l'homme n'a pas changé grand chose à sa recette pour nous pondre
7th Dragon, tant celui-ci partage des similitudes avec
Etrian Odyssey, mais tout est ici mieux fignolé ;
Etrian Odyssey était pourtant déjà un prototype de haute volée. Et alors qu'on attendait plutôt ce genre de soft chez
Atlus, c'est
Sega qui a récupéré le bijou (
Kazuya Niinou ayant quitté
Atlus peu après le développement de
EO premier du nom).
Sink into Flowers, World
Kazuya Niinou rempile donc avec sa recette du RPG pour vieux routard qui n'a pas évolué depuis 1987, et nous pond à nouveau un scénario simpliste, prétexte à donjons.
7th Dragon prend place dans un monde contrôlé par les dragons et dont 80% de la superficie est rongée par le mal. 666 dragons ravagent en effet le monde d'Eden, qui est littéralement envahi par des milliers de fleurs carnivores, empêchant les habitants de sortir de chez eux. Le rôle du joueur est alors très clair : éliminer tous les dragons afin de faire disparaitre les fleurs malfaisantes d'Eden et ainsi rétablir les affaires politiques du continent, très en
berne depuis qu'il est impossible de se déplacer.
L'histoire se veut simple et en retrait, mais elle propose une bonne continuité tout au long du jeu puisque les différentes villes sont liées par un contexte politique omniprésent : les villages et royaumes communiquent régulièrement entre eux et on a véritablement l'impression de voyager dans un monde cohérent.
Le scénario offre tout de même quelques moments de bravoure qui, en général, permettent de relancer de façon magistrale une histoire qui reste très souvent en arrière plan.
Si l'on devait justifier la légèreté du scénario, on dirait qu'il laisse la place à l'exploration et à la liberté de mouvement à travers la carte du monde au lieu de nous happer la gueule avec 50 cut scenes à chaque coin de rue. En effet, le monde d'Eden s'offre au joueur dans toute sa splendeur dès le début du jeu, le continent pouvant être très tôt bougrement parcouru à la manière de
Zelda ou
Mother premiers du nom. Malgré tout, se mouvoir à travers le continent ne sera pas une promenade de santé puisque le monde est envahi de fleurs maléfiques qui font perdre à nos héros un peu (beaucoup) de vitalité au moindre pas. La sensation de liberté devient alors vite ambigüe puisque l'exploration, à priori totalement libre, est en vérité très limitée : on ne peut pas aller bien loin sous peine de perdre tous ses HP à vitesse grand V. On comprend bien vite que chaque mouvement sera synonyme de douleur ou de game over stupide, à moins de bien réfléchir à chacun de ses pas. Car en effet, chaque fois que l'on marche sur une fleur, celle-ci disparait. On pourra donc avancer, certes péniblement, en traçant son chemin à travers les fleurs, revenir se soigner à la ville, et poursuivre son épopée.
La quête principale avance de manière étonnante : le joueur devra débloquer des "missions" en parlant à certains PNJ ou en effectuant certaines actions. Les missions sont toutes indispensables au bon avancement de l'histoire principale. On peut, cela étant dit, avoir plusieurs missions en cours et les terminer suivant l'ordre de son choix. En général, l'objectif d'une mission est de débarrasser un endroit de ses dragons ou d'un boss maléfique, ceci afin de faire prospérer le contexte politique d'un royaume et de rétablir les relations entre les continents. En plus de ces missions, le jeu regorge de quêtes plus ou moins secondaires (certaines étant en effet indispensables à la progression de l'aventure) que l'on débloque de la même façon, en parlant au bon personnage un peu au hasard de notre voyage. Le nombre de quêtes disponibles est important, et beaucoup de PNJ nous parleront de leurs problèmes, certaines quêtes étant même liées à plusieurs personnages en même temps. L'idée est vraiment bien pensée, mais un détail vient gâcher le déroulement de ces quêtes et couper un peu le côté aventure et exploration du soft : chaque quête obtenue, avant de pouvoir être exécutée, doit être validée à la guilde que l'on aura nommé au début du jeu. Il faudra donc penser, chaque fois qu'une quête nous est proposée, à bien retourner dans un village afin de la valider par les instances supérieures. Pire encore, une fois la quête achevée, il faudra de nouveau retourner à la guilde pour aller pécho la monnaie. On est donc régulièrement dérangé par ces détours obligatoires si l'on veut parcourir toutes les quêtes.
Il y avait certainement moyen d'optimiser ce système et d'éviter au joueur tous ces détours ennuyeux.
Land of Dragons and Flowers
7th Dragon est un jeu qui n'a de cesse d'agresser le joueur : les fleurs font perdre de la vie, les combats aléatoires sont nombreux, les Dragons aussi. De plus, le pic de difficulté entre chaque donjon est sans concession : le joueur ne se retrouvera jamais en situation de puissance mais pourra quand même progresser, avec frustration et persistance.
Les dragons, ou le réel fer de lance du jeu, sont au nombre de 666 et représentent les véritables ennemis du jeu. Etrian Odyssey avait ses FOE, 7th Dragon a ses dragons, à la différence près que les dragons sont omniprésents dans chaque donjon alors que les FOE étaient disposés avec parcimonie. Car dans 7th dragon, on croise pas moins de 40 dragons par donjon et ce qui faisait peur au début du jeu (croiser des ennemis surpuissants en pleine ballade) devient bien vite une habitude ; un côté affectif finit par s'installer. Dragon Quest premier du nom nous proposait d'aller saigner un unique dragon. 7th Dragon y fait référence avec humour et nous propose un Dragon Quest puissance 666.
Les dragons peuvent attaquer en groupe ou rejoindre un combat aléatoire. Surpuissants mais pas imbattables, on croise souvent le même type de dragons durant les différents donjons : la tactique à adopter finit par être repérée suivant le dragon. La stratégie à privilégier est le buff. En somme, au lieu de foncer tête baissée vers un dragon, mieux vaudra chercher le combat aléatoire sans difficulté et booster ses personnages en sort de statut en tout genre. Un indicateur affichera sur la carte de l'écran inférieur dans combien de tours le dragon le plus proche de vous débarquera en plein combat, soit le temps restant pour vous préparer.
Les dragons anéantis disparaissent de la carte et le compteur (il y a en effet un compteur qui indique le nombre de dragons restants) se met à jour. Attention toutefois, car les dragons peuvent revivre si l'on passe trop de temps à l'hôtel (ou au Love Hotel pour les petits coquins) sans avoir nettoyé définitivement l'endroit. Il vaut donc mieux courir un seul lièvre a la fois, et donc s'attacher à annihiler les lieux un à un.
Underground Grotto
Ceux qui ont déjà tâté
Etrian Odyssey connaissent la chanson tant
7th Dragon lui est similaire sur de nombreux points, notamment concernant le début du jeu.
À peine le jeu lancé,
7th Dragon Ball Z nous propose de créer nos personnages à la guilde. Les sept classes disponibles ressemblent pour beaucoup à celles de
Etrian Odyssey : nous avons le choix entre Rogue, Mage, Fighter, Princess, Knight, Samurai et Healer. Évidemment, un bon management de l'équipe est indispensable tout au long du jeu, car il faudra souvent compter sur toutes les classes afin de vivre sa quête de façon optimale.
Petite différence avec
Etrian Odyssey cependant, car
7th Blue
Dragon ne propose de jouer que 4 personnages en combats au lieu des 5 de
Etrian Odyssey. Le jeu ne s'avère pas plus facile ou déséquilibré pour autant, car les skills sont répartis de façon différente et les habitués de
Etrian Odyssey devront légèrement repenser leur formation. Mais
7th Dragon Age Origins propose tout de même ses petites nouveautés :
Rieko Kodama (
Phantasy Star,
Skies of Arcadia) nous a concocté un système similaire à celui de
Phantasy Star IV (ou
Chrono Trigger) pour ce qui est des attaques combinées, appelées ici Synergies. En somme, nous avons la possibilité d'utiliser deux personnages aux affinités de classe importantes (un Knight avec une Princess par exemple) pour créer des attaques généralement dévastatrices.
Chaque montée de niveau offre au personnage un point de compétence à attribuer dans un skill au choix. Comme dans
Etrian Odyssey, il faudra augmenter certains skills de plusieurs niveaux afin de débloquer les skills les plus puissants. Mais
7th Dragon propose un arbre des skills qui montre l'arborescence de ceux-ci et qui apporte ainsi une ergonomie bien pratique, même si cet arbre de skill est rigide à souhait : on ne peut pas mélanger les classes ou les skills. En résulte donc le même problème que sur
Etrian Odyssey : certains personnages finiront à la poubelle car le choix des skills est peu judicieux et se fait souvent de façon aléatoire lors de la première partie. Il faudra donc expérimenter.
Toutefois, nul besoin d'être parano, faites vous plaisir dans la répartition de vos skills : en effet, on trouvera vers le milieu du jeu un item pour remettre à zéro tous les skills points de son personnage. Attention tout de même, le jeu ne propose qu'une seule sauvegarde.
Cependant, quelques skills paraissent indispensables à booster le plus tôt possible, comme "Safe Walk" qui permet de réduire voire d'annuler (suivant le niveau du skill) les dégâts dus aux fleurs.
Swords Bursting
Si les combats se déroulent de manière relativement classique, en restant très proche d'un
Etrian Odyssey,
7th Dragon propose quand même quelques petites particularités qui rehaussent l'intérêt :
Le mode Ex (pour Exhaust), que l'on peut activer trois fois entre chaque repos (comme les HP ou MP, une fois les 3 EX utilisés il faudra aller se reposer à l'hôtel afin de recharger les batteries), permet ainsi de multiplier les possibilités de notre personnage en combat, puisqu'une fois utilisé, le mode EX accélère la vitesse du personnage (qui attaquera désormais presque toujours en premier), augmente de 150% la puissance des attaques, augmente la défense, augmente la qualité des sorts de soins ou de statut, et permet en plus de lancer une attaque spécialement conçue pour le mode EX. Ce "Special Ex Skill" est souvent dévastateur et n'utilise pas de mana. Il faudra donc apprendre à gérer au mieux ses 3 EX durant les longs donjons si on ne veut pas se retrouver vidé devant le boss du niveau et avoir à retourner au village au moment le moins propice. Les amateurs apprécieront également le fait que le mode EX permet de fuir de manière bien plus efficace, car la fuite marchera à tous les coups. Spéciale dédicace à
Kanedo.
Le système de combat en lui-même emprunte également aux
Megaten modernes (
Nocturne,
Persona 3) puisqu'il est possible d'obtenir un tour de jeu supplémentaire (appelé Extra Turn) suivant certaines conditions. Les différentes possibilités d'obtenir ce tour supplémentaire sont définies suivant la classe du personnage : par exemple le Fighter reçoit un extra turn quand il tue un ennemi, le samurai aura un extra turn s'il reçoit un fort taux de dégâts en un coup, etc.
Le jeu permet d'ailleurs aux beaux gosses et autres amateurs de techniques abusées de cumuler les extra tours si on refait la manœuvre pendant le tour supplémentaire déjà acquis. Il y a donc la possibilité de cumuler ad-eternam les tours supplémentaires si la technique est maitrisée.
La combinaison des skills et des classes est donc essentielle pour bien s'en sortir dans
7th Dragon, et pour profiter des particularités du gameplay. Comme énoncé plus haut, il y a même des skills qui se combinent spécialement entre eux, à la
Phantasy Star IV ou
Chrono Trigger, suivant les classes utilisées.
Soaring the Heavens, Travelling the Oceans
7th Dragon, malgré son enrobage clairement rétro, laisse entrevoir une maitrise technique omniprésente.
Le jeu utilise des sprites 2D pour les personnages et une 3D relativement simpliste pour les décors. Pour autant, la 3D n'est pas à la ramasse, loin de là même. Les décors sont remplis de détails, les couleurs sont chaleureuses sans pour autant être agressives et kitsch, et les fleurs omniprésentes remplissent les décors tout en créant une atmosphère féérique, bien que parfois proche de la nausée tant ces fleurs sont PARTOUT et semblent entourer le joueur de tous les côtés. Ce qui fait surtout plaisir à voir, c'est la finesse graphique du jeu : tout est simple mais extrêmement élégant et détaillé. Cela crée d'ailleurs un contraste étonnant entre la difficulté du jeu et la bonhommie de l'aspect graphique. Les character et monster design mignons tout plein signés MOTA aident également à créer une atmosphère cohérente, une fois de plus très proche de
Etrian Odyssey. L'aspect super déformé de nos personnage est à la fois super expressif et suffisamment générique, et crée parfaitement l'illusion d'avoir une équipe de personnages unique à chaque joueur et à chaque partie.
Durant les combats en vue subjective, nos personnages apparaissent rapidement pour asséner leurs coups dans un style cartoon et manga mignon à souhait, et les monstres sont parfaitement retranscris grâce à l'excellent monster design. Certains dragons sont d'ailleurs immenses et en imposent sévèrement. Par contre, et voilà bien le seul défaut d'ordre technique que l'on pourra faire à
7th Dragon, les monstres ne possèdent aucune animation et restent donc statiques du début à la fin d'un combat. Décevant, mais on se consolera en se disant, par dépit, que cela aide à créer cet aspect rétro qui colle à la peau de
7th Dragon.
C'est le fier
Yuzu Koshiro qui signe la bande son de
7th Dragon. Bien que l'homme nous ait habitué à des pistes rock & roll avec
Falcom ou à des trips oldschool sautillants sur
Etrian Odyssey, il a décidé de créer ici une OST relativement fraiche, à la fois mélancolique, jazzy, et extrêmement élégante, mais qui pèche un peu par manque de dynamisme. Un comble pour l'homme qui a signé les énormes bandes son de
Street of Rage. Le résultat final est donc un peu fade malgré quelques réussites par-ci, par-là. Bonne surprise cependant, un item disponible à la fin du jeu permet de passer la bande son DS en mode 8 bits qui rappellera les heures de gloire du bonhomme sur PC98 ou sur
Etrian Odyssey. Un item salvateur qui redonne à la bande son tout son caractère enflammé et groovy, mais qui arrive un peu tard...
Excellent RPG tout de même assez ciblé et exigeant, aussi dur qu'un Etrian Odyssey mais toujours réaliste, 7th Dragon remplit à merveille son contrat de RPG old school pas pour tout le monde. Comme Greg le millionnaire, 7th Dragon est dur de partout. Répétitif ? Non, addictif.
Fidèle à son "prototype" Etrian Odyssey, 7th Dragon propose un après-jeu (alors que la quête principale est déjà longue) assez conséquent puisque la fin du jeu ouvre l'accès à un nouveau donjon, des nouveaux dragons à anéantir et surtout un nouveau boss (et des nouvelles musiques !). Il s'agirait même presque d'un épilogue.
Quelques rumeurs promettaient une localisation au moins aux USA, mais il semble clair aujourd'hui que Sega ne laissera jamais sa chance à ce soft outre-Atlantique.
20/06/2010
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- Techniquement d'une grande finesse
- L'exploration
- La rapidité des combats et le rythme du jeu en général
- Les combats efficaces et intéressants
- L'univers cohérent
- Le design !
- Les dragons !
- Les donjons prenants et pas forcément interminables
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- Les détours nombreux et obligatoires (et chiants) à la guilde
- Pas d'animations des ennemis durant les combats
- Musiques un peu fadasses
- L'évolution des personnages un peu aléatoire lors de la première partie
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TECHNIQUE 4/5
BANDE SON 3.5/5
SCENARIO 2.5/5
DUREE DE VIE 5/5
GAMEPLAY 4/5
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