Editeur : Konami Disponible uniquement en dématérialisé
Esper Dream
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Esper Dream
Un bon bouquin et au lit !
Depuis quelques années, les œuvres de fiction du genre "isekai" ont le vent en poupe. Mais cette idée de projeter un individu lambda dans un autre monde n'est pas toute neuve : Alice au Pays des merveilles, le Magicien d'Oz ou même Peter Pan l'utilisaient déjà au XIXe siècle. Le jeu vidéo n'échappe pas à cette tendance et si beaucoup pensent d'emblée à Sword Art Online ou, pourquoi pas, à Final Fantasy Tactics Advance, Konami avait déjà exploré ce thème dès 1987 avec un petit A-RPG sur Famicom Disk System.
Les bienfaits de la lecture
Si les récits de "isekai" actuels envoient plutôt leur protagoniste dans des MMORPG ou des univers virtuels, Esper Dream projette son héros dans un livre tel Richard au Pays des Livres magiques (The Pagemaster). En effet, on nous met aux commandes d'un jeune garçon qui, un soir alors qu'il lisait dans sa chambre, voit se matérialiser une petite fille qui l'implore de venir défendre son village de Brick Town, qui réside au sein des pages du livre. Notre héros est alors aspiré à l'intérieur de sa lecture et fait connaissance avec le maire du village qui le supplie d'aller délivrer sa fille Alice, enlevée par les monstres ayant récemment attaqué la bourgade. Et c'est ainsi que débute une aventure qui durera une dizaine d'heures environ, le temps de sauver la demoiselle et de trouver un moyen de rentrer chez soi. Et oui, c'est ultra-classique et on ne se sent pas vraiment impliqué dans le sauvetage de la fillette qui n'est vraisemblablement qu'un prétexte pour aller explorer cinq mondes, accessibles depuis le village de Brick Town (ce sont les maisons au toit gris), pour y débusquer et y anéantir un boss. Heureusement, le dépaysement est de mise car on devra en effet trouver son chemin dans des lieux aussi différents qu'une maison aux proportions gigantesques, l'intérieur d'un ordinateur, un pays glacé, des temples accrochés aux nuages ou des cavernes souterraines dépourvues de lumière. Deux artefacts devront aussi être découverts et rapportés au village afin d'ouvrir un chemin vers le monde d'origine du héros. Vous pouvez me remercier pour cette information car, comme beaucoup de jeux "d'aventure" de l'époque, les messages des habitants sont plutôt cryptiques et découvrir le fin mot de leurs lignes de dialogue est parfois compliqué.
Footsteps comin' around hauntin' me
Le jeu se présente avec la classique vue du dessus inhérente au genre et à l'époque. On commence donc dans le village qui sert de hub à l'aventure. Après y avoir glané quelques informations et constaté le prix exorbitant des items, on se dirige vers le premier monde à explorer. Là, on remarque des traces de pas se déplaçant sur la zone ; ce sont les monstres qui errent aux alentours. Entrer en contact avec elles propulse le héros dans une petite arène où il devra occire ses adversaires à l'aide de son fusil… ou trouver le mur à démolir en bordure d'écran pour fuir le combat. Certaines de ses "traces de pas" sont, en revanche, fixes et sont placées de telles sortes que le combat est inévitable si on veut progresser. Ce système est plutôt intéressant, car on est rarement surpris par les adversaires, et si les points de vie viennent à manquer, il est facile de faire demi-tour et d'éviter le combat pour regagner le village et se soigner. De plus, les traces fixes donnent une petite indication sur le chemin à suivre : comme si elles "gardaient" un endroit important. On regrettera en revanche, qu'il n'y ait aucune différence de traces de pas entre les ennemis difficiles et les ennemis faciles, comme pouvait le faire par exemple Zelda II. En plus des affrontements, chaque monde possède des "bâtiments" à explorer (temples, grottes, souterrains…) qui abritent d'autres monstres mais aussi des items (sac d'argent, améliorations, parfois des sortilèges). L'un des bâtiments conduit au boss du monde en question, souvent costaud et résistant. Le schéma se répète sur chaque monde mais avec un minimum de variété, dans les décors, les ennemis mais aussi dans le level design : il faudra parfois acheter des clés pour ouvrir des portes au sein des bâtiments, visiter de véritables labyrinthes ou au contraire explorer plusieurs dizaines de petites grottes éparpillées sur la zone. Du coup, le jeu n'est pas trop répétitif et possède juste assez de mondes pour éviter la lassitude. Chaque monde possède aussi son petit village, nécessaire à la deuxième quête, celle de la paire d'artefacts à découvrir pour rentrer chez soi. En effet, on leur mettra la main dessus par un jeu d'échange d'objets avec les habitants, un peu comme ce que proposera Link's Awakening quelques années après. Bon, c'est beaucoup moins construit que dans ce-dernier, ça se limite à trois ou quatre échanges mais ça a le mérite d'exister.
Des combats expéditifs et parfois éprouvants
Comme tout bon A-RPG, les combats occupent une part importante du jeu. Comme précisé plus haut, ils ne sont pas intégrés directement dans l'environnement mais ont lieu dans un autre écran, une arène vue de dessus également. On y affronte au cours des jeux une assez grande variété de monstres : abeilles, robots, aliens, Moai de l'Île de Paques (Konami oblige), spectres, etc. On dispose juste d'un fusil à courte portée pour ces affrontements qu'il faudra apprivoiser car nécessitant une certaine science du placement pour faire mouche (le tir est légèrement excentré par rapport au sprite du héros). Une fois la zone nettoyée, on ramasse ce qui a été éventuellement laissé par les ennemis (souvent de l'argent, plus rarement un objet de soin, non stockable). Un des murs de l'arène disparaît et on peut reprendre l'exploration du monde/donjon. Si on trouve le mur de sortie et qu'on le shoote, on peut quitter le combat, si la situation devient compliquée par exemple ou que la récompense en XP n'est pas intéressante. En effet, les monstres donnent des points d'expérience qui conduisent classiquement à un gain de niveau. À certains paliers, on acquiert un pouvoir magique (qui consomme des EP pour Esper Points) qui peut être un pouvoir offensif, un buff temporaire ou un téléporteur (très utile lorsqu'on est loin dans un donjon et à moitié mort), un sort de soin ou un sort de lumière pour illuminer les cavernes. À noter que les sorts peuvent être achetés en avance mais à un prix peu attractif. Au début, les affrontements sont plutôt simples à gérer malgré un personnage un peu lent mais au fil du jeu, on assiste à des bonds de difficulté avec des monstres occasionnant de gros dégâts, ce qui conduit à quelques séances de grinding. De plus, en particulier dans le dernier monde, non seulement les ennemis se déplacent de plus en plus rapidement et sur la fin, il est impossible de ne pas se prendre de coups lors des combats, mais ils deviennent en outre de gros sacs à PV même avec la dernière arme du jeu (merci l'auto-shot avec une manette qui le permet). Heureusement, il y a une armure cachée quelque part qui rend le héros quasi-invincible, chaque coup reçu n'enlevant plus qu'un seul PV, hormis ceux du boss final bien sûr. Inutile de dire qu'elle est indispensable pour finir le jeu.
Joli mais un peu mou du genou, le gamin !
Sur le plan technique, les graphismes sont variés et assez jolis pour un jeu Famicom de 1987. La musique est bonne et ne lasse pas, tout à fait dans l'esprit du Konami de ces années-là, dommage qu'il n'y ait pas un thème différent pour chaque monde à explorer, cela aurait permis un plus grand nombre de pistes sonores. Il faut malgré tout émettre une réserve sur la maniabilité du titre, le personnage restant tout de même assez lent et pas toujours efficace lors des combats, en particulier contre les monstres les plus rapides.
En définitive, on tient, avec Esper Dream, un jeu agréable plutôt bien réalisé mais qui souffre d'une gestion de la difficulté perfectible. Si la lenteur du personnage, un peu handicapante sur la fin de jeu, et la perspective de jouer à un jeu Famicom pendant une dizaine d'heures ne vous font pas peur, Esper Dream mérite bien un peu de votre attention.