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Muramasa Rebirth
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Muramasa RebirthBlades of Destiny
On ne présente plus Vanillaware, qui depuis GrimGrimoire et Odin Sphere (2007, déjà !) a su prendre une place particulière dans le cœur des joueurs, notamment grâce à sa maîtrise de la 2D et les graphismes aussi magnifiques que chamarrés qui en découlent. Muramasa: The Demon Blade est ainsi le quatrième jeu de la boite, paru sur Wii courant 2009, et utilise le folkore japonais pour tisser sa toile. Un demi-succès sur la console de Nintendo, qui n'effraie pas vraiment Marvelous AQL dans sa politique de réédition : le jeu sera porté sur Vita et s'appellera Muramasa Rebirth (d'ailleurs pour l'anecdote, le jeu s'est vendu trois fois plus sur Vita que sur Wii). Mais quatre ans après, est-ce que le jeu a quelque chose de neuf à nous fournir ?
Deux poids deux destinsLe jeu prend place durant l'ère Genroku, probablement l'une des plus sombres du Japon féodal : de grandes catastrophes frappent le pays dont notamment Edo, la capitale, la dictature d'un Shogunat ayant soif de puissance est de plus en plus lourde à supporter pour le peuple, sans oublier les démons semant la terreur qui se font de plus en plus nombreux. Et au milieu du chaos sans nom, deux êtres vont se distinguer : Momohime, princesse déchue possédée par l'âme de Jinsuke, un épéiste considéré comme l'incarnation du mal. Et de l'autre Kisuke, ninja amnésique portant six crânes à la ceinture et dont la tête est mise à prix par les siens. Chacun de leur côté, ils vont parcourir le Japon à la recherche de solutions à leurs problèmes : une manière de retrouver son corps pour la première, ses souvenirs pour le second. Chose qui ne se fera pas sans faire couler le sang et accumuler les corps derrière eux, et ils disposent d'une arme quasi-absolue pour en venir à leurs fins : la maîtrise du style Oboro, un art de l'épée permettant de contrôler les Demon Blades, armes maudites dont on dit que la plus puissante permettrait même de couper les fils du destin...
L'inéluctable destin donc, auquel on ne peut échapper, un élément qu'on aime bien chez Vanillaware même s'il faut bien avouer que le scénario de Muramasa est quelque peu en retrait, la faute à une narration quelque peu décousue. Prenant la forme de quelques dialogues à la fin de chaque chapitre, qui présentent à chaque fois les tenants et aboutissants de l'histoire, elle est au final traitée de manière assez expéditive et de manière parfois peu claire même avec le travail de re-traduction/ré-adaptation exemplaire opéré par Aksys. Reste des personnages très attachants par leurs personnalités et leurs devenirs (notamment ce pauvre Kisuke, condamné quoiqu'il arrive à une histoire d'amour tragique), l'utilisation du folklore nippon et des thématiques chères au bouddhisme et au shintoïsme, les deux principales religion du Japon, pour donner un peu de consistante "philosophique" aux évènements, comme les croyances tournant autour de la mort et de la réincarnation. L'histoire de Muramasa reste donc très sympathique, même si en l'état on est clairement loin de la prestance de Odin Sphere. Tranchage, découpage, laminageSeuls contre tous, Momohime et Kisuke vont trancher, découper, laminer dans tous les sens pour se tailler un chemin laissant parler le fer et le fameux style Oboro pour eux. Le jeu s'ouvre avec un tutorial expliquant la large palette de mouvements disponibles et première bonne surprise pour cette adaptation Vita, le jeu dispose d'un système d'affectation des touches, chacun peut donc adapter la maniabilité à sa convenance. Et une fois l'aventure lancée on est directement face à la structure très agencée du jeu. Pour faire simple, l'exploration se limitera à aller d'un point A à un point B (scrolling 2D oblige) en fonction du scénario et il sera difficile de se perdre, car outre la grossière flèche rouge vous indiquant le chemin en plus de l'utilisation de la carte, il y aura également la présence de barrières de couleurs sur votre route, impossibles à passer si on n'a pas la bonne Demon Blade, bonne Demon Blade qui s'obtiendra... en conclusion du combat clôturant un chapitre.
Il sera également possible durant cette partie exploration de mettre la main sur des objets et surtout sur des Souls (représentées par des flammes vertes, qu'on peut également ramasser sur les cadavres des ennemis), de visiter quelques maisons et autres restaurants histoire de manger un morceau, d'acheter divers objets aux marchands disséminés ici et là ou de faire une pause dans une source d'eau chaude. Mais dans l'ensemble, cet aspect du jeu n'est pas bien folichon lors de la trame principale car les interactions sont très anecdotiques quand elle dépassent le stade du gameplay. Pas bien folichon voire carrément bien redondant et qui arrive quand même à se planter sur la moitié du jeu, à savoir le scénario de Kisuke. Car autant le scénario de Momohime est très fluide dans son déroulement et fait progresser avec fluidité l’héroïne à travers les régions du Japon, autant celui de Kisuke va se résumer à faire de longs et incessants allers-retours. On pourrait même dire que la moitié de son scénario ne consiste qu'à ça, sans grossir le trait. Mais heureusement l’intérêt est ailleurs. Et l’intérêt il est dans ses combats, car dans Muramasa on va se battre, et souvent. Deuxième bonne surprise, ça répond au doigt et à l’œil aussi bien, voire mieux que sur Wii. Les héros sautent, esquivent, virevoltent et frappent à toute vitesse, enchainent les combo partant du sol au ciel et enchainent les dash dans tous les sens, sans ralentissements ou toutes autres formes de désagrément. Et c'est particulièrement jouissif de contrôler de telles boules de nerfs, d'autant plus que la marge d'apprentissage du système de combat est très large : la palette de coups et de mouvements est plus que bien fournie et permet de faire face à toutes les situations, mais vraiment toutes ; l'aboutissement de cette maîtrise se ressentira par la fierté de pouvoir ressortir totalement indemne d'un combat, boss inclus.
Quelque chose qu'on ne constate pas vraiment contre les monstres basiques, rencontrés au fil des très nombreux combats aléatoires. Dans Muramasa les combats prennent la forme d'arènes fermées utilisant partiellement ou totalement le décor de la carte dans laquelle on est et desquelles on ne peut sortir que de trois manières : la mort, la fuite via un objet ou la victoire. Bien sûr c'est la victoire qui s'imposera d'elle-même, ces combats aléatoires s'expédiant en quelques dizaines de secondes voire encore moins une fois le gameplay totalement maitrisé ; en parallèle le bestiaire de base, peu fourni et disposant de palettes de mouvements assez réduites, ne constitue plus vraiment une menace passé le 176ème groupe de ninjas ou le 87ème de Tengu et contribue à ces combats torchés en deux temps trois mouvements. Un embrochage rapidement routinier à cause du faible bestiaire, heureusement très riche en Souls histoire de compenser une certaine redondance. FIGHT!Contre les boss, c'est une autre paire de manches. Massifs, puissants, disposant d'une barre de vie à rallonge et d'attaques surpuissantes, il faudra savoir jouer de ses réflexes et de son sens du timing pour en venir à bout. Et surtout, avoir un bon sens de la gestion. Momohime/Kisuke peuvent porter trois sabres chacun au choix entre Blade et Long Blade, et n'en utilisent qu'un à la fois en combat, avec la possibilité de switcher librement à tout moment. La Blade (équivalent du katana) est plus léger, offre une meilleure mobilité et permet de frapper plus vite pour moins de dégâts tandis que la Long Blade (équivalent du nodachi, sabre long à deux mains) fait exactement l'inverse. Mais le paramètre le plus important avec ces armes sera le Soul Power, qui se manifeste par une barre bleue en haut de l'écran. Quand cette barre de Soul Power est vide, le sabre se casse purement et simplement, et une arme cassée est une arme tout simplement inutile. Donner des coups ne vide pas la jauge de Soul Power, en revanche se protéger ou renvoyer des projectiles si, les sabres étant également le bouclier du personnage. Chaque arme a également une capacité spéciale qui elle aussi dilapide la jauge de Soul Power si utilisée. Il est bien sûr facile de la vider, un peu moins de la remplir : pour se faire il faudra soit récupérer des Souls, soit laisser les armes reposer dans leurs fourreaux, soit utiliser des consommables. Tout le nerf de la guerre tourne donc de la gestion de ses lames, car autant dire qu'on est sacrément mal barré si les trois sont kaput (d'autant que les boss ont des attaques brisant une arme en un coup !) et qu'on a plus grand chose pour les réparer.
Pour résumer, explosif pourrait être le mot qui définirait le mieux le système de combat de Muramasa. Très nerveux et surtout très jouissif une fois le gameplay maitrisé, c'est clairement le gros point fort du jeu (exception de sa plastique), du chemin a été fait depuis Odin Sphere et ça se sent. Tenez et quand je dis que le gameplay est maitrisé et pensé pour faire face à tout : sachez que si vous finissez le jeu en mode Chaos (Hard) vous débloquerez le mode Fury. Il s'agit ni plus ni moins qu'un mode où le personnage reste à 1 point de vie quoiqu'il arrive. Le moindre petit coup de travers et c'est la mort... avis aux amateurs. Un forgeron sachant forgerL'aspect RPG dans Muramasa reste relativement léger, voire inexistant, car le seul élément qu'on y retrouve est la présence de gain d'expérience/de niveau. Et encore c'est plus ou moins anecdotique, car même si votre capital points de vie augmente, les ennemis suivront votre évolution et taperont autant, voire plus fort au fil du jeu. Non le vrai intérêt du leveling sera d'augmenter ses statistiques de Vitalité et de Force, qui seront liées à la capacité à s'équiper des fameuses Demons Blades. Plus ces statistiques seront hautes, plus on pourra équiper de sabres puissants. Au nombre de 108, ces lames démoniaques ne peuvent s'obtenir que de trois manières différentes. La première, c'est via l'histoire. Chaque acte du scénario sera synonyme de l'obtention d'une nouvelle épée, nécessaire pour franchir les barrières bloquant le passage. La seconde, c'est via le post-game. Enfin la dernière c'est la forge, et c'est elle qui fournira une bonne partie des épées.
On y accède simplement via le menu principal et cette fameuse forge prendra la forme d'un diagramme regroupant les épées de Momohime et Kisuke. Mais une fois dedans rien de plus simple : il suffit de se rendre sur l’icône en surbrillance d'un sabre, de valider et la magie se fait ! Enfin elle se fait si vous avez le nécessaire pour : forger un sabre demandera un certains nombres de Souls et des Spirits Points. Ces derniers ne s'obtiennent que d'une seule manière : EN M-A-N-G-E-A-N-T. Et oui on aime la bouffe chez Vanillaware ! Chaque repas sera synonyme du gain d'un certain nombre de Spirits Points, plus le repas sera de qualité, plus de points seront engrangés. La manière la plus simple d'en gagner est de faire des haltes aux restaurants qu'on trouve partout dans le Nippon. La manière la plus subtile est de faire la cuisine soi-même, qui demandera de trouver des recettes et des ingrédients, mais qui offrira des gains beaucoup plus important qu'un restaurant classique. Enfin pour finir, sachez qu'il existe un dernier "mais" avec la forge : le déblocage des lames dépend de l'obtention d'autres lames. Il est impossible d'obtenir les 108 du premier coup, il faudra passer par le post-game et la vision de quatre des six fins. Enfin si vous trouvez dommage qu'au final 105 des 108 épées soit laissées sur la touche, sachez que les développeurs ont pensé à vous : il existe un certain accessoire permettant de mettre la puissance de base de toutes les épées à 700. Le choix est vaste, après ! 10ème artLe jeu est beau. Monstrueusement beau. Vanillaware dépeint le Japon féodal de Muramasa avec le talent qu'on lui connait, c'est-à-dire une maitrise de la 2D dans les règles de l'art. Prairies, montagnes, forêts de bambous, montagnes enneigées ou montagnes escarpées, grandes cités et petits villages, intérieurs de temples et de châteaux, les décors chatoyants aux teintes pastelles s'enchainent au fil de l'aventure et on en prend plein les yeux. Des décors qui s'étalent parfois sur plusieurs plans, qui fourmillent de détails et d'animations comme ces passages d'oiseaux ou ces paysans travaillant au loin, qui font parfois partie intégrante du combat (voir les pétales flotter ou des lampes voler au gré des coups d'épées donne une touche presque poétique aux affrontements), sans oublier la météo jouant parfois de concert avec les panorama, les noyant sous la pluie, la neige ou un lever de soleil, qui contribue à donner une véritable âme à des peintures vivantes qu'on regrette presque de salir de cadavres laissés derrière nous. On pourra dire ce qu'on veut sur les productions Vanillaware, mais ce point là reste inattaquable jeu après jeu.
La musique elle aussi contribue grandement à l'ambiance à la fois mélancolique et violente du titre, un titre chouchouté qui a pas moins de 7 compositeurs rien que pour lui, menés par un Hitoshi Sakimoto bien en forme. L'équipe sonore du jeu a ainsi recouru à toute la batterie des instruments typiques de la culture nippone (un peu comme a fait le trio Ueda/Yamaguchi/Kondoh pour Okami) tout en y apportant quelques touches de rock par-ci par-là pour les moments les plus dynamiques du jeu, à savoir les combats. Ce sont d'ailleurs ces musiques de combat qu'on retiendra principalement, explosives et effrénées, accompagnant avec brio les affrontements sanglants du jeu - notamment les boss. En revanche on retiendra un peu moins les pistes accompagnant l'exploration qui, il faut bien l'avouer, sont sympathiques, mais assez passe-partout. On notera aussi qu'un grand nombre de pistes existent dans une version A et B, changeant parfois radicalement d'un bout à l'autre : un exemple avec la piste appelée Boshoku Souzen, version A à gauche et version B à droite. Comptez au maximum 7-10 bonnes heures pour finir le scénario d'un personnage une première fois, donc 15-20h au total, et comptez-en facilement 10-15h de plus pour venir à bout du post-game. Un post-game qui permettra aux héros de ré-affronter les boss déjà battus dans leurs scénarios respectifs en plus de ceux du scénario opposé, et de pouvoir accéder aux derniers Nids de Démons, des lieux de défis extrêmes. Une sur-exploitation du contenu du jeu très généreuse en Demon Blades et en accessoires surpuissants, assez lassante à la longue et par laquelle il faudra passer si on veut voir toutes les fins du jeu, vu qu'il y en a trois par personnage. On ne pourra pas non plus s'empêcher, pour ceux ayant déjà fait le jeu sur Wii, de lancer un petit regard noir à Marvelous AQL et Vanillaware : le seul contenu exclusif de ce portage, à savoir 4 mini-scénarios mettant en scène de nouveaux personnages, et bien c'est du DLC...
Muramasa c'est beau, monstrueusement beau. Muramasa c'est nerveux, diaboliquement nerveux. Muramasa c'est prenant, très prenant. Mais Muramasa c'est aussi une répétitivité très marquée et un déroulement parfois très fastidieux, qui pourra user les moins patients ou ceux restant hermétiques à l'épopée aussi mélancolique que sanglante de Momohime et Kisuke. Ceux qui en revanche se feront à ses petits défauts réguliers se régaleront de l'orgie visuelle constante fournie par le jeu, d'un système de combat à la fois subtile et bien bourrin, de la collecte des Demon Blades et de la recherche de toutes les fins du jeu. Vanillaware a appris plein de leçons à travers Odin Sphere et ça se sent maintenant comme à la sortie originelle du jeu, sur Wii. En attendant, ce portage de Muramasa reste de très bonne facture et est une très bonne valeur sur la portable de Sony.
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