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Evoland
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Evoland88 miles à l'heure
Pour comprendre d’où vient Evoland, il faut faire un petit retour un beau jour d'août 2012 : le 24ème Ludum Dare 48, une compétition de développement de jeux vidéo, ouvre ses portes. Des milliers de développeurs pour des milliers de projets, avec un thème imposé - "l'évolution", dans cette 24ème édition - et 48 heures pour pondre quelque chose ; Nicolas Cannasse, un des 1400 participants et donc futur papa d'Evoland, décide de mêler ce thème de l'évolution à l'histoire du RPG en créant un jeu qui va littéralement "muer" au fil des minutes comme a su faire le genre durant toutes ces années. Voilà donc pour la genèse du soft, qui passage est couronné meilleur projet de cette 24ème édition. Et ça ne s'arrête pas là puisque la machine Internet fait son boulot et le soft ainsi créé, mis en utilisation libre sur la toile, rencontre un joli succès que son créateur va chercher à capitaliser : le jeu est donc retapé de A à Z pour proposer un concept et un contenu bien plus étoffé, et hop disponible à la vente ! Prêt pour un petit retour dans le temps ?
RPG mon coeurOn a souvent parlé des scénarios tenant sur une feuille de papier-toilette, mais celui d'Evoland pourrait tenir sur un post-it 30*30, le pire étant que chercher à en parler relèverait du spoil tellement il est léger. Mais bien plus que le scénario du jeu, c'est avant tout une petite rétrospective du RPG que Evoland cherche à présenter, s'inspirant de licences majeures comme Dragon Quest, Final Fantasy ou encore Zelda pour tisser sa toile et présenter ainsi l'évolution du RPG.
RPG LightL'aventure commence ainsi sur une jolie bande monochrome qui n'est pas sans rappeler les jeux Game Boy. On fait connaissance avec notre héros, uniquement capable de se déplacer à droite en direction d'un coffre, coffre qui lui offre la possibilité de se diriger à gauche vers un autre coffre, qui lui ouvre l'espace de jeu dans lequel il pourra se déplacer que dans 4 directions. Puis de fil en aiguille et de coffres en coffres il mettra la main sur une épée, une barre de vie, la possibilité de se déplacer librement dans 8 directions ou d'avoir accès à une carte du monde et d'y revivre le fameux Mode-7 par exemple, ça en parallèle de mises à jour graphiques qui marqueront elles aussi cette évolution : on passera du monochrome au 8-bits de l'époque de la NES, et ainsi de suite en traversant les époques jusqu'à atteindre la fameuse ère de la "3D HD". Une évolution qui ne se fera pas non plus sans satire et légèreté, car chaque déblocage sera l'occasion d'une petite phrase humoristique (comment ne pas sourire devant celle offrant la possibilité de "s'incruster chez tout le monde ?", cliché régulier du RPG ?) sans oublier les nombreuses références disséminées tout le long du jeu.
On est ainsi face à une sorte de madeleine de Proust quasi-permanente, où chaque geste et chaque feature nous rappelle le chemin parcouru depuis les années 80 avec en parallèle un renvoi à tous ces jeux ayant bercés notre enfance. Un héros du nom de Clink habillé de vert et ayant une certaine similitude avec un autre personnage, un vaisseau volant avec un propriétaire au nom évocateur ou une épée ressemblant furieusement à la Buster Sword de Cloud, par exemple. Cet aspect nostalgie et référence fait son œuvre et touche le (vieux ?) joueur comme il faut tout le long du jeu, et sera malheureusement la seule motivation du joueur pour avancer passer un cap. Car passé ce fameux cap qui représente le premier tiers du jeu, Evoland aura réalisé la quasi-intégralité de sa transformation et laissera plus transparaître ses lacunes évidentes du gameplay. On pourrait aussi regretter le relatif hermétisme du jeu sur cette histoire du RPG qu'il cherche à narrer, qui ne parlera ainsi pas vraiment aux plus jeunes. Evoland va aller piocher du côté de Zelda, Final Fantasy et Diablo pour créer la base de son gameplay. L'inspiration Zelda prendra la bonne moitié du jeu avec un Clink que l'on contrôlera directement au pad et qui, au choix, balancera coup d'épées, bombes ou flèches pour détruire des monstres, des buissons et des pots, et de temps en temps quelques boss qui seront la conclusion de donjons ultra-basiques à base de labyrinthes pas vraiment labyrinthiques avec de blocs à pousser et des interrupteurs à activer. L'inspiration Final Fantasy se ressentira elle plutôt sur la carte du monde et dans certains donjons spécifiques où notre héros prendra part à des combats au tour par tour dans lesquels une curieuse barre d'action qui n'est pas sans rappeler l'ATB conditionnera les tours d'attaques. Quand à Diablo, son influence se ressentira dans un seul lieu du jeu qui prend la forme d'un hack'n'slash light avec une grosse boule rouge représentant la vie du héros et des objets qui seront aussi inutiles que leurs noms sont à rallonge et leurs effets improbables (c'est le genre qui veut ça, après tout !) . Les trois styles s’enchaînent au fil de la progression, il n'est ainsi pas rare de passer de combats Final Fantasiens à de l'action directe d'une minute à une autre.
Et c'est à peu près tout. Evoland reprend ainsi des concepts de jeux très basiques pour poser son gameplay, sans réelle ambition derrière. Ironiquement, l'humour du jeu pointera du doigt certains défauts ou mécaniques inhérentes au genre mais ne cherchera pas à s'en dépêtrer. La partie action-RPG souffre d'une maniabilité assez raide couplée à un personnage manquant cruellement de punch, ce qui se traduit par des combats très douloureux dès que les ennemis commencent à être un peu trop nombreux à l'écran. La partie tour par tour elle se distingue par un choix rachitique d'actions qui variera de rares fois durant l'aventure, tandis que la partie hack'n'slash invitera juste à massacrer sa touche d'action tout le long d'un seul donjon. A ça se rajoute un bestiaire très réduit qui amusera 5 minutes par ses références avant de lasser à son tour, sans oublier une partie exploration/aventure réduite à peau de chagrin. Le seul coup d'éclat viendra d'un lieu appelé le Bosquet Sacré, dans lequel la progression sera conditionnée par un jeu de passage de 2D/3D. Bref pour l'aspect vidéo-ludique, Evoland rate le coche et de loin. La peau sur les osLa musique et les graphismes suivent donc cette évolution narrée par le jeu : du monochrome à la couleur, de la 2D pré-calculée aux balbutiements de la 3D, du pixel jusqu'à la finition de la HD, les graphismes du jeu sont ainsi très mignons sans casser des briques et rappelleront irrémédiablement à tous les vieux briscards l'évolution qu'ont connues leurs séries au fil des ans. Une chose similaire pour la musique, qui même si elle ne restera pas en mémoire remplie très bien son rôle d'accompagnement en rappelant elle aussi que du chemin a été fait depuis les petites puces des 8 bits aux orgies symphoniques servies aujourd'hui. Il faut dire que l'idée de départ était tout simplement excellente : l'évolution du RPG, couplée à la nostalgie et à un humour bien présent, tape dans le mille pour tous ces joueurs ayant traversé et évolué en même temps que leur genre préféré. Peut-être un peu moins pour les autres. Mais passé le sympathique petit cours d'histoire qui aurait peut être gagné à un être un peu plus renseigné (par exemple en allant au delà de Zelda et Final Fantasy ? Le RPG c'est un peu plus que ça !), on ne peut que constater le relatif vide entourant Evoland. Car aussi excellente que peut être une idée, c'est son utilisation et son application qui seront déterminantes. Contenu tristounet, gameplay creux et insipide, durée de vie riquiqui et ambition qui l'est tout autant, le jeu aligne les tares tout en faisant rager sur tout ce potentiel gâché. Vraiment dommage. En tout cas l'idée reste originale et aura peut-être une seconde chance un jour, l'originalité en moins, mais en attendant ce premier essai n'est pas vraiment concluant.
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