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Ray Gigant
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Ray Gigant
Ray Gigant
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Ray GigantNeon Genesis Yorigami
Hasard du calendrier ou volonté assumée d'aller au clash de date entre éditeurs concurrents, Ray Gigant sort quelques jours à peine après Stranger of Sword City, l'autre Dungeon RPG d'Experience Inc. Étrange choix pour des jeux au public si restreint, dont les similitudes risquent fort de desservir les ventes des deux opus. Cependant, au-delà d'une forme commune qui - sur le papier - pourrait faire craindre l'indigestion, nous ne sommes pas face à deux clones, très loin de là. Voyons donc les spécificités de la proposition d'Acttil.
Cruel Gigant ThesisSur notre bonne vieille Terre, aux alentours du 21ème siècle, la vie de tous les jours est soudain réduite à néant par l'apparition de formes de vie monstrueuses. Sorties de nulle part, ces créatures que l'on nomme les Gigants s'en prennent aux populations, pulvérisant les métropoles sans que les armées ne puissent rien y faire. Mais c'est au moment où une sorte de dragon apparaît dans les environs de Tokyo que se produit un événement inattendu : le monstre est détruit par un pouvoir inconnu, d'une puissance telle qu'elle rase la majeure partie de la ville, ne laissant d'elle qu'un cratère béant, au centre duquel repose un jeune garçon. On retrouve celui-ci quelques temps plus tard, alors qu'il rejoint les rangs d'une organisation secrète, portant à son cou un médaillon à tête de lion étrangement doué de parole.
Un Tokyo post-apocalyptique, d'immenses créatures aux motivations obscures, un pouvoir difficile à maîtriser remis entre les mains d'adolescents qui pourrait barrer la route à la menace, le tout chapeauté par une jolie prof et d'autres scientifiques plus ou moins patibulaires, tout cela rappelle furieusement quelque chose. Si les prémices du scénario de Ray Gigant n'étaient pas si semblables à un bon millier d'autres références de la japanime et du RPG (les Megami Tensei en tête), on serait en droit de dénoncer le plagiat flagrant d'Evangelion. On ne trouvera ici nulle mention d'anges destructeurs et d’évangiles - les Eva - sauveurs de l'humanité, mais des Titans (de l'allemand gigant) et Kami (divinités japonaises) qui jouent, il faut bien le dire, des rôles similaires. Le souci c'est que contrairement à son modèle volontaire ou non, Ray Gigant balance de la référence cosmogonique au kilomètre, sans se poser de question sur son emploi : on trouvera au sein des Gigants un Loki à la gueule de loup, Kyûbi, Sun Wukong et autres Zeus, dans un mélange des provenances mythologiques gavant, mais assez peu roboratif. Pour déployer sa narration, le jeu prend comme base celle d'un feuilleton en quatre actes. On suivra ainsi, tour à tour, plusieurs groupes de personnages tentant d'endiguer l'avancée des Gigants, chacun de leur côté, sur une demi-douzaine de chapitres, avant que la dernière partie n'en vienne à les réunir à la manière de DraQue IV. Cette façon de faire ne permet malheureusement pas de creuser à fond les relations et la psychologie de tous les personnages, qui frisent parfois l'antipathie, et désamorce toute situation dramatique qui pourrait survenir dans un univers post-apocalyptique. Disons-le tout net, on se fout tout bonnement de ce qui peut arriver aux personnages, et les moments plus légers se contentent d'enfiler les poncifs des histoires de groupes d'adolescents de japanime. La personnalité des membres du groupe ne dépasse jamais le stade de l'archétype. À peine effleurée, jamais développée, il faudra se contenter de rares petites phrases et de scruter leur portrait, au sein du menu, pour reconstruire par bribes des relations demeurant à la marge d'une narration déjà faiblarde. Same old story, not the same old song and danceExperience Inc. a changé son fusil d'épaule, depuis leur petit dernier Demon Gaze. Alors qu'ils s'inspiraient jusqu'à présent des vieux Wizardry, avec leurs équipes à créer avant de les envoyer dans de longs donjons, Ray Gigant utilise une approche plus traditionnelle du JRPG. L'équipe est ici prédéfinie à chaque chapitre, et la progression des protagonistes se fait selon un arbre de talents, avec quelques subtilités. En effet, on n'obtient jamais de points d'expérience en fin de combat, mais uniquement des matériaux d'amélioration des différentes capacités. Enfin, il y aussi les Seeds, qui gouvernent le niveau d'expérience global et peuvent être affectés au paramètre de puissance physique, de magie ou de technique (affectant la vitesse d'exécution, la précision et l'esquive), mais on les obtient au terme des combats de boss ou, plus rarement, dans des coffres plus ou moins bien dissimulés.
Les deux autres branches représentent, d'un côté, l'équipement de nos héros et, de l'autre, leurs Forces. Si les secondes sont assez transparentes, simples techniques actives ou passives (augmentation d'attaque ou autres) qu'ils pourront déployer en combat, les premiers demandent un peu plus d'explication. En effet, on ne trouve aucune arme ou armure en loot ni aucun magasin, et l'inventaire lui-même est inexistant ; le niveau d'armes et accessoires de défense doit, dans un premier lieu, être augmenté par les Materias, après quoi les Breeds généreront un équipement aléatoire correspondant au niveau de l'objet considéré. Rien de très enrichissant du coup, avec une évolution relativement lente et linéaire, mais qui, parfois, peut devenir exponentielle par un jet de dé chanceux. Mais la plus grande étrangeté est bien l'inventaire, ici remplacé par un système de plats à préparer, selon le même principe. Une fois la popote prête, le plat peut être affecté au même titre qu'une technique de combat, et utilisé de la même manière pour restaurer HP et statuts bien plus efficacement que tout sort de soin. Assez déséquilibré. Certains joueurs considèrent les premiers instants d'un RPG comme l'instant le plus intéressant de l'aventure. C'est le moment où tout est à découvrir, où l'on apprend les éléments de gameplay et où celui-ci gagne en épaisseur une fois le tutoriel passé ; tout est alors encore à faire. Il est donc souvent grisant dans un RPG de pouvoir redémarrer de zéro l'évolution des personnages, avec l'ouverture du champ des possibles que cela implique. Mais dans Ray Gigant, ce passage obligé n'a pas grand intérêt. Le fait est que si les personnages contrôlés changent au fil du jeu, leur arbre d'évolution conserve une forme identique, ou presque. Seuls trois archétypes garnissent les rangs des équipes, et on côtoiera systématiquement un puissant attaquant au corps à corps, un mage et un sniper. Peu de surprises également dans leur arbre de talent, repris tel quel sur les premières histoires, et finalement peu modifié par la suite. Tout au plus devra-t-on parfois composer sans la présence d'un soigneur dédié, mais l'arbre de talents culinaires viendra largement compenser ce menu problème.
D'une manière assez insatisfaisante, les niveaux sont, d'ailleurs, largement limités pendant une grande partie du jeu. Bridé à un maximum de 15 jusqu'à l'obtention de l'équipe finale, il n'en reste pas moins qu'il est assez facile d'obtenir un personnage surpuissant, en se contentant d'augmenter son niveau au détriment de celui de ses camarades. Même chose du côté de l'outillage, qui bénéficiera largement plus à un seul attaquant lourdement armé, tandis que les deux autres seront cantonnés à un rôle de soutien ou de soigneur. Au final, les utilisateurs de Yorigamis, les "vrais dieux", disposent d'un potentiel d'évolution de l'arme et d'une puissance globale bien plus étendus en comparaison des Kurogamis (les déités factices), mais c'est peu, bien trop peu pour justifier de ce manque de diversité. Fil d'ArianeEt on retrouve ce manque de substance dans la plupart des aspects du titre, et en particulier du côté des donjons, qui théoriquement devraient être le principal focus d'un dungeon-RPG. Or, non seulement, cet aspect du jeu n'a pas bénéficié d'une vraie refonte, à l'inverse du reste, mais c'est même l'inverse : l'intérêt de la chose est réduit comme peau de chagrin à force de remaniements inexplicables, dont on pourrait faire un top 10. Première idée géniale, les combats aléatoires ont tout bonnement disparus : les Gigants les moins imposants apparaissent directement sur les cases des donjons, laissant tout loisir de les éviter quand il y a lieu, de choisir l'affrontement ou d'en profiter pour regagner ses pénates sans aucun obstacle, d'autant qu'un bouton du menu est prévu à cet effet. Pratique n'est-il pas ?
Deuxième constat, les positions des ennemis, et même des trésors, sont dévoilées de base, neutralisant de fait le concept même de dungeon-crawler. Il est très rare d'avoir à explorer, à chercher son chemin plusieurs minutes, et si la seconde partie du jeu offre plus régulièrement des gimmicks (portes cachées, courants marins, interrupteurs) à maitriser pour avancer, et des donjons un peu plus complexes, on n'y trouve rien de très original. En multipliant les facilitations, en supprimant totalement la recherche de trésors ou de monstres puissants, et en rationalisant l'exploration de donjons, Ray Gigant nous dépossède de cette sensation de satisfaction, qui habituellement nous gagne lorsqu'on accomplit un haut fait. Enfin, la forme même de l’aventure pousse au bâillement, tant elle ronronne : un chapitre nous enverra parcourir un donjon, pour récupérer un objet sur un Gigant de moyenne taille, qui attirera un Gigant de type I – les plus imposants – dans le chapitre suivant, non sans avoir traversé un mini-donjon dénué de trésors. Le jeu semble au final plus adapté à ceux qui veulent suivre l'aventure sans se prendre la tête qu'aux hardcore gamers. Sans combats aléatoires, sans peur de mourir du fait d'une régénération automatique en fin de combat, en plus d'une fuite sans faille et de la capacité à rentrer sans encombre aucune au bercail en cas de besoin, les développeurs n'essayent même plus de proposer un quelconque challenge. Ce constat a quelque chose d'assez pathétique, quand on a encore en tête leurs précédentes productions, mais ne peut vraiment pas être ignoré ; pour preuve, le NG+ inclut un "god mode", permettant de rendre l'équipe parfaitement invincible, et donc de se concentrer sur les scènes de dialogues. Dialogues qui, rappelons-le, ne vont pas chercher bien loin, et sont à ce point du jeu déjà connus du joueur. Curieux choix en vérité. Tag BattleLes combats faisaient pourtant preuve d'une réelle envie de dépoussiérer les habitudes, par l'incorporation d'une myriade de petites idées sympathiques. Si l'on est toujours dans une mécanique de tour par tour, chaque personnage peut, ici, agir jusqu'à cinq fois par phase, soit quinze actions - au maximum - pour l'ensemble de l'équipe. Ces actions sont assignées aux boutons Carré, Triangle et Rond tandis que les gâchettes permettent de changer de personnage, avant de laisser les protagonistes donner libre cours à leurs attaques d'une pression sur l'écran. Le truc c'est que ces actions dépensent touts les points d'une même jauge limitée à 100 unités, qui n'augmentent qu'en subissant les coups ennemis, en fin de combat selon la performance réalisée, ou plus simplement en choisissant la technique Wait, au détriment du tour d'un personnage. Avec tant de possibilités, on pourrait être tenté d'ouvrir grand les vannes pour en finir au plus vite, mais cette jauge de points d'action joue le rôle de grandeur limitante qu'il faut régulièrement surveiller, au risque de se retrouver en incapacité d'agir et de se protéger.
Car en plus de penser à l'attaque, il faut être précautionneux : les unités disposent d'esquives ou de gardes certaines de rendre caduques le prochain coup qui les visent, peuvent servir d'appât pour éviter que les plus frêles ne prennent un mauvais coup, et seules les mages possèdent un quelconque pouvoir de guérison relativement efficace mais coûteux ; pour le reste, il faudra se reposer sur les rations de survie. On trouve souvent des combats doublant la consommation de points d’action, ou la divisant de moitié ; si cette mécanique peut sembler d’une importance capitale, elle ne change finalement pas tant que ça la manière de procéder. Tout au plus faudra-t-il être plus prudent avec la dépense d’énergie, et recharger les batteries après un combat « rouge » en affrontant des ennemis « bleus ». Plutôt anecdotique, le parasitisme est une mécanique qui se déclenche à tours fixes durant les combats. Cet état n’a qu’un seul véritable effet : consommer la barre de vie des personnages plutôt que la jauge d’action. Une contrainte à double tranchant, permettant d’agir malgré des AP à zéro mais obligeant à une prudence excessive, probablement la seule cause de Game Over qui guette le joueur tout au long du jeu. Seulement, étant donné que l’état de l’infection est remis à zéro à chaque montée de niveau ou utilisation de certaines attaques, il est possible de parcourir l’intégralité sans en voir la couleur. On s’apercevra, enfin, que les combats contre les véritables boss, les Gigants de type I, entraînent un changement de perspective puisque les trois équipiers se tiennent à distance plus ou moins respectable du monstre. Cela aurait pu être l’occasion de rebattre les cartes, mais n'entraîne au final aucune différence dans la façon de combattre. Les héros ont beau se trouver à plusieurs kilomètres de distance sur d'énormes dénivelés séparés par l'océan, ils trouveront toujours un moyen de partager un sandwich. Sur le papier, Experience Inc. tenait là de très bonnes idées pour son système de combat, suggérant la gestion parallèle des attaques/défense et de leur carburant. Mais, c'était une nouvelle fois sans compter sur la facilité, et sur des choix hasardeux. Pourquoi les personnages ne peuvent-ils pas viser des cibles distinctes ? Pourquoi les ennemis semblent-ils si attentistes dans leurs attaques ? Pourquoi le système de masse corporelle, variable en fonction des actions, et censée augmenter les attaques physiques ou l'esquive, ne fait-il, au final, pas grande différence ? Pourquoi le parasitisme, si contraignant durant tout le jeu, devient-il si laxiste et inutile à l'approche de la fin ? Et surtout, pourquoi le Super Beat Mode, la technique ultime des Yorigamis, est-elle si destructrice ? Là encore, l'idée était au départ sympathique : en visant les points faibles des monstres, nos combattants remplissent une jauge de fury, qu’ils peuvent choisir de conserver ou de déclencher dès le remplissage de sa moitié. Son utilisation va alors sauter le tour d’action de l’ennemi, et laisser libre cours aux instincts destructeurs des divinités, au cours d’un mini-jeu de rythme : il s’agit de presser les boutons d’attaque sur la pulsation d’une mélodie, plus ou moins longue selon la position de la jauge au moment de sa consommation. Seulement, on s’aperçoit vite que la puissance de cette « limite » est disproportionnée, capable d’abattre directement les plus puissants Gigants, même avec une seule moitié de jauge, rendant ainsi parfaitement inutile le reste des systèmes de combat. S’amuser dans le jeu finit par demander de brider soi-même la puissance de son équipe, et d’aller au moins efficace. Il aurait pourtant suffit d’une meilleure phase d’étalonnage pour éviter ce gâchis.
Une réalisation en sinusoïdesDévoilé pour la première fois début 2015, Ray Gigant avait de suite frappé par la finesse de son animation, et par le dynamisme que celle-ci semblait apporter aux combats. Ici, pas de sprites fixes, mais des monstres et personnages qui semblent respirer, s'articuler devant nos yeux. Une fois le jeu entre les mains, le constat doit être tempéré : si les combats s'animent agréablement grâce à ce mouvement, un peu à la manière d'un Time and Eternity en moins opulent, que les portraits des phases de dialogues sont bien plus lisses et vivants qu'à l'accoutumée, et que les rares scènes animées donnent à l'ensemble un cachet plus moderne que leurs homologues de Stranger of Sword City, le reste des actifs n'a pas forcément bénéficié du même soin. Les textures des donjons sont à peine plus fines qu'auparavant, les attaques spéciales sont loin d'être accompagnées d'un feu d'artifice d'effets, et pire, les donjons se payent même l'affront d'être parfois accompagnés de ralentissements. Un comble pour un jeu qui ne semble pas du tout à même de mettre la console à genoux.
Si l'on excepte les fréquentes et SONORES alarmes intempestives qui accompagnent la détection des Gigants, ou le moindre événement notable, la bande-son se défend globalement bien, et en particulier les musiques accompagnant les mini-jeux de rythme. On notera également les voix japonaises accompagnant l'anglais intégral des textes du jeu. Quant à l’ergonomie, on trouve encore une fois du très - trop - bon (les facilitations hors combat tendent à rendre l’exploration trop facile) et du très mauvais. L’exemple le plus frappant est certainement celui du système de combat qui, malgré une forme originale, aurait mieux fonctionné en un simple menu. Les personnages disposent de six techniques paramétrables dans le menu, mais seulement 3 boutons en combat. Devoir changer de « set » d’attaques pour choisir une technique en plein milieu d’un jeu de rythme, et contraindre ces boutons à ne recevoir que certains types de techniques n’apporte franchement rien, sinon des choix laborieux et rigides. Heureusement qu’on peut d’une simple pression sur Triangle envoyer la même salve de coups qu’au tour précédent, ça fait des vacances. Enfin, comment cautionner que le système d’évolution déséquilibre à ce point les débats entre personnages définitifs et temporaires, laissant bien plus de matériaux d’amélioration que leur utilisation ne nous en laissera profiter ? C’est à nouveau avec un sentiment de gâchis qu’on quitte Ray Gigant, aventure gentillette mais trop inégale pour tutoyer les sommets. Décidément, Experience Inc. semble ignorer ce qu'est le juste milieu. Leurs précédents D-RPG péchaient, notamment, par des graphismes vieillots, mais proposaient des aventures au gameplay dense, qui demandaient de s'accrocher pour en voir le bout, quand Ray Gigant en prend le contrepied et devient un D-RPG pour néophytes. Mais si l'animation des personnages et des ennemis fait désormais plaisir à voir, on restera circonspects devant les initiatives bancales en matière de gameplay, quoique pas dénuées de panache, et devant le vide absolu que sont devenus les donjons. Peut-être le développeur réussira-t-il un jour à concilier fond et forme, challenge et fun, mais pas certain que son public attendra jusque-là.
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