Entre deux parties de Tengai Makyo, Red ne perd pas de temps, puisque l’équipe est sollicitée en 1992 par Silverhill Soft, un studio orienté PC-98, pour travailler sur un petit « bishojo RPG » sympathique, nommé : Princess Minerva.
Bishojo game
Mais tout d'abord, qu’est ce qu’un « bishojo game ». Littéralement, « bishojo » est tout simplement une « jolie jeune fille ». Ce sont donc des jeux, typiquement inscrits dans l’époque (comprenez entre 1985 et 1995), généralement bien réalisés, qui mettent en scène des personnages féminins rarement majeurs, assez peu habillés, réalisés en quelques pixels plutôt bien agencés. Le genre ne tourne jamais au sexuel non plus, comme on peut le voir dans le cas des H-RPG, puisque que les jeux sont réalisés souvent pour des consoles de salon. Sur PC-98, ça va parfois un peu plus loin dans le déshabillé, mais les « bishojo games » ont le devoir de rester softs sous peine de sortir du genre. Très prisé des « otakus », les bishojo games de la bonne époque s’arrachent aujourd’hui à des prix faramineux. Princess Minerva ne fait pas exception à la règle, et une copie en bon état aujourd’hui revient à presque autant qu’à sa sortie en 92, comptez entre 10.000 et 15.000 yens (100 euros). Pour un jeu qui a bientôt trente ans, sur disquettes, ce n’est pas donné, ni sans risque (discs illisibles). Mais qui ne tente rien n’a rien, et j’ai donc décidé de franchir le pas.
Des disquettes à tout va
Première chose à dire, c’est que le package du jeu a la classe. Une boite en carton, magnifiquement illustrée, renferme une autre boite, cette fois en plastique, qui contient les disquettes, les manuels, et autres pamphlets des jeux édités par Riverhill. Oui, j'ai bien dit les manuels, car, comme de nombreux jeux PC-98, le jeu est livré avec un guide en couleur, et un livret d'utilisation imprimé sur du papier Canson. On comprend mieux pourquoi les jeux valaient si chers en 1990 au Japon. Malheureusement le jeu ne peut être installé sur disque dur. On se demande pourquoi, au vu du nombre de softs installables sortis à la même époque. En même temps, cela facilite le lancement du jeu. « Disc system » dans le premier lecteur, « Disc scénario 1 » dans le second, et c’est parti ! Par contre, ne comptez pas rester tranquillement assis pendant toute la durée du jeu, les disquettes suivantes devant être régulièrement insérées, selon les scènes et la progression dans le scénario. Mention spéciale pour les scènes de baignades en petites tenues de nos héroïnes qui demandent l'insertion d'un « disc spécial 1 ou 2 », pour trois petites secondes de voyeurisme ! Je n'ai pas hésité une seconde à lancer les scènes, mais d'autres passeront plus vite leur chemin. Idem pour le casino du jeu, qui demande l'insertion de la même disquette, à chaque fois que l'on lance la roulette ou la machine à sous.
Une princesse sous contrôle
Princess Minerva est jouable à la manette, et ça par contre, c'est super, parce que les scènes de donjons et d'exploration sont vraiment succulentes. Le level design est bon, la carte bien pensée, les combats dynamiques, et l'on s'amuse à chercher des centaines de trésors dans des lieux plus ou moins cachés, à faire progresser nos héroïnes, qui montent, il faut le dire, très facilement en niveau. Mais que font elles là ces jeunes filles ? À combattre à moitié nues des hordes de monstres dans un monde de brutes ? Reprenons à zéro. Minerva est une jeune princesse, surprotégée par son papa, le roi du pays. Elle est entourée de toute une horde de servantes, des professeures, des entraîneuses, des accompagnatrices, et autres professions utiles aux princesses. Tout allait bien dans le meilleures des mondes, jusqu'à ce que Minerva entende parler d'un grave problème touchant le royaume. Des filles (encore !) sont capturées tous les jours sur les chemins, et transformées en monstres par on-ne-sait quelle magie. Minerva décide donc d'explorer le monde avec ses suivantes, pour mettre fin à ce drame. Tout ça bien sûr secrètement, puisque son père ne pourrait supporter que sa fille sorte du palais. Le tout est saupoudré d'humour et de situations burlesques comme savent si bien faire les gens de chez Red.
Au boulot les filles !
L’équipe est composée de trois filles, différentes dans les trois chapitres, qui se retrouveront sous les ordres de Minerva à la fin du jeu. Chaque héroïne a des compétences propres, orientées vers la magie, l'attaque ou les techniques spéciales. En combat cela donne un RPG extrêmement classique, au tour par tour, avec rencontres aléatoires très fréquentes (trop ?), des menus parfaitement ordonnés et reconnaissables (attaques, magies, compétentes spéciales, fuite), mais toujours fun, grâce à la rapidité de l'action (comptez 30 secondes par combat en moyenne). Les animations en combat sont bonnes, et les ennemies plus variées et mieux désignées que je ne l'aurais pensé. À noter que le design a été retravaillé sur les versions PC Engine et SNES, plus cartoon et plus enfantin. La version PC-98 est à mon avis bien plus mature. Je ne me prononcerai pas sur les variantes de gameplay des versions consoles, n'y ayant pas joué. Les villages sont, eux, assez inintéressants passée la moitié du jeu, car très similaires dans leur organisation. Boutiques, auberges, églises. Bien que quelques surprises un peu drôles nous attendent au tournant (Merci Red !). Chose importante à noter toutefois, car c'est une prouesse technique à l’époque dans le J-RPG, chaque armure portée change le design de nos héroïnes. On peut les essayer dans les boutiques, et certaines sont un vrai régal pour les yeux !
Red on PC-98
Graphiquement, Princess Minerva s'en sort vraiment bien en 1992, avec des décors super détaillés, des animations soignées, et de magnifiques couleurs. Le scrolling est étonnamment fluide pour un jeu PC-98, et les déplacements en diagonale sont possibles. Les musiques sont charmantes, bien que répétitives. La bande son est séparée en deux pistes, celles des bruitages, émis par la carte FM, et celle de la musique, qui peut être écoutée sur la même carte son, ou bien sur une carte MIDI GS. Cela demande un certain investissement, mais quand on aime, on ne compte pas !
Si vous cherchez donc à faire un bon petit RPG classique, efficace, fun, avec de jolies filles en trois pixels, ne cherchez pas plus loin, Princess Minerva est fait pour vous ! Le scenario est sympa, mais on peut s'amuser sans rien comprendre au japonais, ce qui en fait un RPG PC-98 vraiment accessible. D'autant plus qu'il ne nécessite pas d'installation compliquée.