Tenait-on avec Rogue Galaxy un énième Rpg, soi-disant mythique dans la mesure où il proposerait une réalisation de haute voltige et des personnages apparemment charismatiques, ou s’agissait-il davantage d’un nouveau RPG classique jusqu’à la banalité qui, une fois son heure de gloire (commerciale) passée, retomberait bien vite dans les ténèbres de l’oubli ? On pouvait craindre qu’il ne s’agisse en effet que d’un (trop) long voyage à travers de multiples planètes sans âme. On pouvait craindre que Jaster Rogue et sa « mystérieuse » cicatrice ne soit que le point de départ d’un scénario cousu de fil blanc et mis en scène de façon prétentieuse. On pouvait le croire en effet, mais cette foi inébranlable pouvait-elle résister aux combats dynamiques, aux situations dramatiques et aux environnements colorés de Rogue Galaxy ?
Je suis venu vous conter l’histoire d’un beau voyage...
Réalisation stratosphérique
Avant même de pénétrer la substance du soft, c’est sa réalisation, dans l’ensemble, qui frappe quiconque s’en approche : si le cel-shading ne s’élève pas, à mon sens, au niveau de la merveille qu’est Zelda: The Wind Waker, on tient là un concurrent de taille sur le plan technique. Plus beau et plus coloré que Wild Arms 3 (pourtant déjà très réussi lorsqu’on y pense), Rogue Galaxy place la barre très haut, à la hauteur de ces étoiles que le héros ne cesse de regarder. L’immersion est garantie, d’autant plus que les environnements sont entièrement ouverts : il n’y a pas de coupure entre les différentes sections d’une planète : les temps de chargement n’interviennent que lorsque l’on monte à bord du Dorgenark ou lorsqu’une cut-scene vient égayer le tout (un peu à la Metroïd Prime, en fait).
Le cel-shading n’est pas la seule force du jeu : les cut-scenes, à la mise en scène ambitieuse (trop parfois, surtout au début) laissent parfois la place à des FMV à couper le souffle, mêlant dessin animé et images de synthèse pour un résultat sidérant de beauté ET de style (ce n’est pas juste détaillé, c’est vraiment réussi, au point de vue esthétique).
Ajoutez à cela que les musiques et les doublages sont d’excellente qualité, que les effets sonores sont nombreux et variés, que vos personnages parlent pendant que vous explorez le monde et vous obtenez une référence (référence pour longtemps à mon sens) au point de vue technique, dotée d’une superbe 3D temps réel (par le biais de laquelle sont modélisés les environnements d’exploration et les combats).
"Make me feel alive" (Fox in Metal Gear Solid)
Le filon de Rogue Galaxy, le filon de ce genre de RPG en général, c’est la liberté, le grand voyage à travers un monde qui flirte avec l’infini. Les cartes qui sont sur la table ne sont pas seulement celles du RPG dit old-school : c’est plus que cela, c’est un véritable Skies of Arcadia-like, référence absolue en la matière jusque là à mon sens. Ce n’est pas seulement un grand voyage, c’est une véritable envolée (ici dans l’espace), envolée qui donne cette tonalité si particulière à ces deux aventures, et dont ne bénéficient pas des jeux comme Grandia ou Lunar par exemple (il ne s’agit pas de critiquer, mais de faire comprendre le concept de Skies of Arcadia-like). En littérature, on parle de roman d’aventures, on pourrait parler ici, au prix d’une tautologie peut-être de RPG d’aventures, mais d’aventures célestes !
C’est de la liberté de Jaster Rogue dont il est ici question, « mystérieux » enfant, dont le visage est marqué d’une « mystérieuse » cicatrice, et qui est protégé par un « mystérieux » guerrier, lequel semble savoir quelque chose sur sa « mystérieuse » identité.
Tous ces mystères sont suffisants pour lancer une aventure qui vous permettra d’explorer tout un système stellaire à bord d’un vaisseau pirate, de rencontrer des personnages hauts en couleur, pénétrés par leurs propres « mystères », de rechercher des trésors légendaires, des planètes perdues, et de faire sa fête à tout ce qui fait preuve d’immoralité manifeste.
Vous acquerrez bien sûr de « mystérieux » pouvoirs, et si le scénario n’est pas si original, il est suffisant, il évite les clichés au prix d’une mise en scène efficace et d’un traitement réussi des émotions. Ne vous attendez pas à trouver des personnages vraiment tordus ou des révélations prétendument philosophiques : le scénario n’a qu’un rôle narratif, il vous entraîne de planète en planète, efficacement, et c’est là l’essentiel.
Une galaxie de caractères
On rencontre vraiment beaucoup de monde dans Rogue Galaxy : les personnages jouables sont nombreux, différents, et en dépit de la fadeur qui se dégage en premier lieu de quelques-uns d’entre eux, le scénario leur réserve un petit moment personnel qui leur permet de gagner le cœur du joueur : oui ! Rogue Galaxy n’est pas un jeu pour les cérébraux, il se joue avec le cœur à fleur de peau, prêt à sombrer dans l’épopée et à compatir envers un personnage rencontré au fond d’une mine.
Les PNJ sont très nombreux, mais certains parmi eux, récurrents, finissent par devenir véritablement attachants : vous serez poursuivis par un archéologue, vous épaulerez un ancien guerrier à la morale secrète, et vous rencontrerez tantôt ces deux personnages mystérieux qui partout cherchent un père de famille. Le monde, immense, se traduit par la multiplication des personnages, la richesse de l’univers rejaillit sur le traitement qui leur est réservé. Là encore, après un départ hésitant, cela se met en place, l’aventure trouve son rythme, l’immersion agit.
Star Ocean + Tales of + Grandia = ...
Évidemment, au cours de vos explorations, vous ne manquerez pas de rencontrer une foule d’adversaires, tous plus laids et plus cruels les uns que les autres. Mais autant être tout de suite rassuré : les combats sont réussis. Non seulement il est possible de s’engager pleinement dans la bataille puisque les points de sauvegarde - incroyablement nombreux - soignent les personnages, mais ceux-ci sont franchement dynamiques, sans être complètement bourrins (ah… un peu quand même).
Parmi vos trois personnages, deux sont contrôlés par une IA… satisfaisante. L’aire de combat prend place dans l’aire d’exploration, si vous vous éloignez trop des adversaires, vous fuyez le combat. Le déplacement est libre, et vous pouvez, à loisir, utiliser des objets, utiliser des capacités, frapper avec votre arme primaire, frapper avec votre arme secondaire, sachant que tout cela consomme petit-à-petit votre barre d’action qui, une fois vide, commence à se recharger. Par ailleurs, l’arme secondaire (souvent une arme à longue portée) dispose de sa propre barre d’action, qui une fois vide, se recharge (mais pas plus d’un certain nombre de fois par combat).
Mais le zeste tactique intervient dans la mesure où certains ennemis ne peuvent être touchés que d’une certaine manière : parfois il faut sauter, parfois il faut casser la barrière, grâce au Gun-anti-barrière ou grâce à une attaque spéciale. On ne peut pas (toujours) foncer dans le tas.
La difficulté est raisonnable, certains boss sont difficiles, mais rien d’insurmontable (le leveling n’est pas nécessaire), et le jeu, s’il n’est pas aussi long que le boîtier le prétend, tiendra toutefois en haleine les joueurs les plus expérimentés plus de trente heures.
Musiques galactiques
Tout cela ne se déroule pas dans le silence : et il eût été dommage de nous priver des fabuleuses compositions qui accompagnent l’aventure dans Rogue Galaxy. On ne se risquera pas à comparer la bande son avec des monstres comme Final Fantasy (ante-X), d’autant plus que le genre n’est pas le même. Peu de thèmes ici, mais un nombre conséquent de musiques d’ambiance, volontairement répétitives, qui provoquent l’immersion et qui restent dans la tête. Par ailleurs, les quelques thèmes qui subsistent sont réussis, et les chansons sont remarquables.
Enfin, on ne peut pas ne pas s'arrêter sur les musiques qui accompagnent les combats contre les boss (elles sont, principalement, au nombre de deux), renversantes d’efficacité, motivantes.
"Aye Aye Captain" finira par dire le joueur, en chœur avec l’équipage, le joueur qui se laissera porter par la magie de Rogue Galaxy, RPG riche, diablement bien réalisé et frôlant la perfection dans son genre. Ceux qui ont adoré Skies of Arcadia n’ont pas le droit de passer leur chemin, ils trouveront ici son rival le plus sérieux. Non, définitivement non, Rogue Galaxy n’était pas le jeu que l’on pouvait craindre. C’est un voyage fantastique à travers les étoiles, un périple pirate que l’on n’oubliera pas et dont résonneront toujours en nous quelques-unes des fantastiques musiques.
"Aye Aye Captain", Mariglenn vous attend!
12/11/2007
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- Réalisation d'ensemble réussie
- FMV de toute beauté
- Environnement musical de grande qualité
- Combats dynamiques
- La grande aventure
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TECHNIQUE 4.5/5
BANDE SON 4/5
SCENARIO 4/5
DUREE DE VIE 4.5/5
GAMEPLAY 4/5
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