Radiant Historia, un nom et un character-design qui n'est pas sans rappeler un certain
Radiata Stories qui avait fait son nid sur Playstation 2 et qui avait su glaner son lot de fans. Cependant, qu'on se le dise, ce seront leurs seuls points communs. Avec
Radiant Historia,
Atlus mise sur un mélange audacieux entre le classique de l'ère Snes-Playstation et un concept rafraichissant d'épopée temporelle. En fin de vie, la Nintendo DS aurait-elle trouvé son RPG ultime ? Réponse dans ce test.
The Awaken
Le monde tel que vous le connaissez ne sera bientôt plus. Le continent est menacé par un terrible fléau naturel qui n'a d'égal que le vice logé dans le cœur des hommes belliqueux. La désertification des terres prend de l'ampleur, réduisant tout sur son passage en un amas de sable sans vie, sans espoir, tandis que le genre humain livre bataille à autrui pour occuper les terres qui semblent provisoirement hors d'atteinte de la désertification. Au cœur de ce conflit, deux nations que tout semble opposer : Granorg, un pays gouverné par la désinvolture de la reine Protéa basé sur une tradition monarchiste, et de l'autre côté, Alistel, un État qui accorde de l'importance au progrès technologique mais qui paradoxalement idolâtre un prophète qui dicte les mœurs du peuple. Stocke fait partie de la Special Intelligence, une organisation d'Alistel qui opère dans l'ombre de l'armée et participe à l'effort de guerre. Tout débute lorsque Heiss, votre mentor, vous confie une mission suicide ainsi qu'un étrange livre : The White Chronicle. Bien assez tôt, alors que la mort allait s'emparer de Stocke, le livre réagira à sa présence et révélera ses secrets, de même que son aptitude à vous faire voyager dans un passé qui vous est lié. Commence ainsi votre aventure pour mener le monde vers l'éventualité d'un futur où l'homme perdurera.
Dés le départ, le scénario intrigue : pourquoi Stocke est-il l'élu capable de manier un tel pouvoir ? Pourquoi a-t-il de telles responsabilités ? Comment se fait-il que notre supérieur l'ait eu en sa possession ? Des interrogations qui piquent suffisamment notre curiosité pour nous faire progresser avec intérêt et entrain dans cette quête qui a pour but la découverte de soi-même et la sauvegarde du monde. Au milieu d'un conflit d'une telle ampleur entre ces deux nations guerrières, il sera de rigueur de manier le temps judicieusement, de façon à ce que chacune de nos décisions soit faite en faveur d'un avenir où le monde survit. En effet, s'il est bien une originalité qu'il faut retenir de Radiant Historia, c'est son concept de timelines.
Chronicle of Flux
La White Chronicle garde en mémoire tous nos choix et actes perpétrés durant l'aventure et nous permet de revenir dans le temps à des moments clés appelés "nœuds" afin d'influencer le présent depuis lequel on provient. L'intérêt se trouve donc dans les répercussions des actions que le Stocke d'un instant T, qui a donc acquis certaines connaissances, accomplira dans un passé déjà vécu qui lui est lié et qui influencera les circonstances du-dit instant T, débloquant ainsi une situation qui semblait sans issue. Mais ce n'est pas tout. En plus de cela, un choix très important au tout début du jeu a pour effet de scinder la timeline principale en deux et propose ainsi de vivre le récit sous deux angles différents. Encore une fois, ce voyage dans le temps et l'espace permis par la White Chronicle vous autorisera à passer de l'une à l'autre afin d'acquérir un certain savoir dans l'une qui vous servira dans l'autre. De même que ces timelines ont une action réciproque étroite entre elles, notamment dans le comportement de vos alliés par exemple. Ce concept d'influences croisées entre temps et espace est, il faut le dire, très frais et parfaitement mis en œuvre, de sorte qu'il nous permet d'observer et de mieux interpréter les événements qui ponctuent le scénario. Le pari était très risqué, mais Atlus s'en est sorti à merveille et donne par conséquent un coup de fouet considérable à la narration qui aurait pu être maladroite. Ainsi se dessine votre objectif : agir dans le passé ou dans le monde parallèle pour faire surgir un futur resplendissant.
Bémol cependant pour ceux qui croiront que Radiant Historia permet une liberté d'action extraordinaire avec des choix aux nombreuses propositions de réponse. Il n'en est rien, ou presque. Le soft exploite le concept à merveille dans le cadre d'une narration dans le fond relativement linéaire et faire un mauvais choix conduira à un Game Over "temporel" illustré par quelques phrases qui expliquent le pourquoi de votre erreur de jugement. Ce qui en soit, évite l'éparpillement et de ce fait canalise une histoire déjà assez alambiquée. Si l'on pense basiquement, le chemin semble tout tracé et s'en écarter en prenant les mauvaises décisions n'aura aucune incidence, mais les nombreuses quêtes annexes nous feront mentir, lesquelles apporteront leur lot de surprises en influant parfois sur l'histoire principale, d'autant que celles-ci sont présentes en nombre et profitent de la qualité de la narration globale du titre !
Mood
Radiant Historia, ce n'est pas pour les petits enfants. Le soft d'
Atlus fait preuve d'une certaine maturité dans ses propos, même si les réflexions ne vont jamais chercher dans les méandres de la philosophie. On trempe dans une ambiance sérieuse où les conflits politiques, la guerre, les dilemmes cruels et les enjeux de taille sont monnaie courante. Pour supporter le tout, les développeurs ont mis les moyens : un héros d'un charisme, d'une classe et d'une intelligence surprenants pour un J-RPG. A cela ajoutons un casting certes hétéroclite au niveau de la profondeur mais attachant, intéressant et développé qui tire l'ensemble vers le haut ainsi que des dialogues (pour la plupart pertinents) à la pelle et l'on obtient un résultat plus que satisfaisant qui favorise l'immersion dans un tout harmonieux.
Néanmoins, rendons à César ce qui est à César, cette atmosphère ne serait rien sans les deux talentueux artistes qui officient sur
Radiant Historia. Le character-designer
Hiroshi Konishi qui était aux manettes sur
Radiata Stories nous livre ici des artworks de toute beauté. Malgré le fait que chaque personnage ne possède qu'une expression, le travail de l'artiste semble donner vie aux sprites et l'on ne peut que s'incliner devant un tel travail. Plus important cette fois, la compositrice
Yoko Shimomura nous honore de sa présence et de ses mélodies ensorcelantes. La justesse des pistes en fonction du cadre visuel rivalise d'ingéniosité, décuplant alors l'ambiance du moment pour nous faire ressentir ce petit quelque chose qui fait que l'on est ému ou touché. On notera également la performance de la dame sur les battle themes. Un regret cependant, celui que l'OST soit relativement maigre (25 pistes) pour un jeu qui se targue d'atteindre les 40 heures de durée de vie. La faute au support ? Peut-être.
On peut toutefois reconnaître à la Nintendo DS ses prouesses en matière de 2D soignée comme c'est le cas ici. Pour peu que l'on soit sensible au charme de la 2D, on découvre ici un univers plutôt chaleureux et accueillant, plein de couleurs et de contrastes, aux animations travaillées. Un atout pour s'imprégner du classicisme avoué à demi-mot du soft.
Let's get down to business
Les combats constituent la seconde importante originalité du soft, et accessoirement, un autre de ses atouts. Expliquons.
Radiant Historia n'est pas un Classical-RPG tout à fait ordinaire. Même si on reste dans le domaine du tour par tour, le nerf du système se situe dans la gestion de la queue et du terrain. Sur le côté de votre écran se situe une liste d'icônes où alternent celles des ennemis, celles de vos compagnons et vous même : c'est la queue. Elle définit qui va attaquer, et après qui. On retrouvait déjà ce genre d'indication dans de nombreux RPG (
Final Fantasy X,
Wild Arms 5...), mais la nouveauté de
Radiant Historia est de pouvoir intervertir votre tour avec celui de n'importe qui, ami ou ennemi. Quel intérêt ? Celui de faire grimper le nombre de combos, ce qui a pour effet de renforcer la puissance de vos assauts. Le concept est simple : changer son tour contre celui d'un ennemi afin d'agir juste après notre compagnon et ainsi faire monter le nombre de combos, plutôt que d'être interrompu par une attaque ennemie, ce qui aurait brisé le combo. Ainsi plus on accumule de tours à la suite, plus on augmente la puissance des attaques, mais on devra en contrepartie encaisser les dégâts que nous infligent les ennemis auxquels on a remplacé le tour. Néanmoins, autant dire que lorsque la queue est remplie seulement des icônes de vos alliés, les ennemis ne font pas long feu. D'ailleurs, il s'agit sans doute ici de la meilleure utilisation de la queue dans un RPG qu'il m'ait été donné de voir.
Autre dimension bien plus tactique et intéressante maintenant : le placement des ennemis sur une grille 3*3. Au début de n'importe quel combat, vos adversaires se trouvent placés sur un damier, chacun d'entre eux occupant plus ou moins d'emplacements selon leur corpulence. Le fait étant que les skills - que vous acquérez en montant de niveau – permettent de déplacer vos ennemis ou d'attaquer certaines parties de la grille en particulier, ce qui rend le placement des monstres primordial pour mener un bon combat, ajoutant une bonne partie tactique aux joutes, en particulier contre les boss. Par conséquent, l'établissement de votre équipe de trois ne se fera pas uniquement sur les stats et le niveau mais au contraire en priorité par rapport aux skills nécessaires à une bonne stratégie.
Cette combinaison entre le système de queue qui permet de s'économiser pour ensuite lancer une attaque surpuissante, et la tactique fournie par le damier, renouvelle perpétuellement l'intérêt des combats, en même temps que l'on apprend de nouvelles capacités aux effets inédits qui ouvrent la voie à d'autres stratégies.
Oui mais...
Malheureusement, Radiant Historia n'est pas exempt de défaut et certains pourraient durement noircir le tableau. En tête de liste, un important problème de redondance dans les donjons. Deux explications à ce phénomène : tout d'abord, un univers relativement étroit qui ne dépayse pas assez pour un soft d'une durée de vie telle. Ainsi, on sera quelque fois amené à repasser par les mêmes endroits, faute de nouveauté. On se sent donc quelque peu limité. Seconde raison : les deux timelines prennent place dans le même univers, et donc la redondance dans les zones parcourues est inévitable. Atlus n'a pas pensé à ce détail, et cela lui cause du tort, car pour certains joueurs, cela pourrait les conduire à arrêter le jeu. D'autant que les développeurs n'ont fait aucun effort ou presque sur un level-design qui, force est de constater, reste très pauvre. En effet, bien que les décors soient plaisants à l'œil, on ressent une certaine impression de vide lorsque nous prend l'envie de déambuler plus longuement dans les allées des donjons.
Cela dit, les qualités de Radiant Historia sont telles que l'on aura vite fait d'occulter ce petit écart de conduite.
Radiant Historia, c'est l'ingénieux mélange du classicisme des années Snes et d'une pointe d'originalité bien sentie qui permet d'éviter de tomber dans la pâle copie du RPG d'antan. Mature, envoutant, épique, parfois tragique, mais toujours puissamment orchestré, le titre d'Atlus nous offre une aventure temporelle qui n'a pas à rougir des grands. L'OST de choix et le sublime chara-design parachèvent le travail et érigent Radiant Historia comme l'un des principaux ambassadeurs du RPG DS.
06/03/2011
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- Un scénario et une narration de qualité
- Stocke
- Les influences temporelles
- Une OST particulièrement adaptée
- A la fois original et classique
- Gameplay bien pensé
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- Certaines redondances agacent
- OST peu fournie
- Maniabilité au stylet
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TECHNIQUE 4/5
BANDE SON 4/5
SCENARIO 4.5/5
DUREE DE VIE 4.5/5
GAMEPLAY 4/5
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